Témoignages "Cette loi qui nous a libérés" : la communauté LGBT se souvient de la dépénalisation de l'homosexualité par Robert Badinter

En 1982, après un long combat de Robert Badinter, les homosexuels sortent de la clandestinité. Au lendemain de la mort de l'ancien garde des Sceaux, des militants de l'époque se souviennent.
Article rédigé par Farida Nouar
Radio France
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Temps de lecture : 2 min
Robert Badinter, alors garde des Sceaux, quitte l'Elysée en sortie de Conseil des ministres, 1981. (MICHEL CLEMENT / AFP)

Robert Badinter, mort dans la nuit du 8 au 9 février à l'âge de 95 ans, ancien ministre de la Justice et avocat, artisan de l'abolition de la peine de mort, a aussi mené un autre grand combat : celui de sortir les homosexuels de la clandestinité. Il y parvient, le 4 août 1982 avec la loi Forni qui dépénalise l'homosexualité. Ce n'est plus un délit et c'est la fin d'un cauchemar pour cette communauté stigmatisée.

Le 20 décembre 1981, Robert Badinter prend la parole juste après Gisèle Halimi. Il est alors garde des Sceaux, nous sommes à l'Assemblée nationale : "L'Assemblée sait d'ailleurs, quel type de société, dans l'histoire, et aujourd'hui encore, toujours marquée par l'arbitraire, l'intolérance, le fanatisme ou le racisme, a constamment pratiqué la chasse à l'homosexualité. Il n’est que temps d’ailleurs, à cet égard, de prendre conscience de tout ce que la France doit aux homosexuels comme à tous ses autres citoyens, dans tant de domaines."

Le temps est venu, pour l'Assemblée, d'en finir avec ces discriminations indignes de la France.

Robert Badinter

Discours à l'Assemblée nationale, le 20 décembre 1981

Bernard Bousset, 81 ans, se souvient : "J'avais 42 ans. C'était très émouvant d'entendre cet homme, qui défendait une cause, qui, à cette époque-là, était vraiment le dernier des soucis des gens. L'homosexualité était un délit, également une maladie pour l'OMS, c'était aussi un fléau classé comme la prostitution, l'alcoolisme."

"On ne vivait que vraiment cachés, avec la peur au ventre"

Dernier condamné de France pour "délit d'homosexualité", Bernard Bousset est devenu l'une des figures de la communauté homosexuelle parisienne en ouvrant plusieurs bars gays dans le Marais. Il sait ce qu'il doit à Robert Badinter : "Pour moi, il est au Panthéon des grands hommes. Tellement de combats pour en arriver à cette loi qui nous a quand même libérés. Nous, homosexuels qui étions opprimés, emprisonnés et on ne vivait que vraiment cachés, avec la peur au ventre en permanence. Aujourd'hui, je suis franchement ému. C'est une époque qui s'éteint."

Comme Robert Badinter était combattant des Droits de l'homme, pour lui ça ne s'arrêtait jamais. Ca ne pouvait s'arrêter qu'avec son décès.

Michel Chomarat, militant homosexuel

franceinfo

Pour Michel Chomarat, militant homosexuel, Robert Badinter était une icône : "C'est une grande figure qui disparaît." Invité par le barreau de Paris l'année dernière, pour parler de ses trois arrestations pour homosexualité, Michel Chomarat se souvient de l'intervention de Robert Badinter, toujours aussi combatif au sujet de la dépénalisation de l'homosexualité : "Nous dire, et dire surtout aux jeunes, que si on a gagné une bataille en France, il y a plein de pays dans le monde ou les choses se passent très mal." Un hommage national sera rendu à Robert Badinter a annoncé le Président de la Republique.

La communauté LGBT se souvient de la dépénalisation de l'homosexualité par Robert Badinter - Reportage de Farida Nouar

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