Cet article date de plus de deux ans.

On vous résume en cinq actes la polémique autour du député Eric Coquerel, mis en cause pour "son comportement avec les femmes"

L'élu de la France insoumise est mis en cause depuis plusieurs jours pour des soupçons de comportements inappropriés "avec les femmes". Sophie Tissier, une ancienne proche du Parti de gauche, a saisi les instances de LFI, après des "gestes déplacés", lors d'une soirée, en 2014.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Le député LFI de Seine-Saint-Denis Eric Coquerel, le 3 mai 2022 à Paris. (BERTRAND GUAY / AFP)

Les accusations visant le député LFI Eric Coquerel se précisent. Alors que la journaliste Rokhaya Diallo évoquait, jeudi sur RTL, des suspicions de comportements inappropriés "avec les femmes", le député de Seine-Saint-Denis dénonçait, dans une tribune au Journal du dimanche, des "rumeurs infondées". Une militante de gauche, Sophie Tissier, a finalement saisi dimanche 3 juillet le comité contre les violences sexuelles de LFI. Elle évoque des "gestes déplacés" lors d'une soirée en 2014.

1La journaliste Rokhaya Diallo relaie des témoignages de "sources internes"

Le point de départ de cette affaire est l'intervention de la journaliste Rokhaya Diallo, invitée jeudi soir sur RTL. Alors qu'elle réagissait à la nomination d'Eric Coquerel à la présidence de la commission des finances de l'Assemblée nationale, cette dernière a fait part de son "étonnement" et a évoqué la question "assez sensible" de témoignages concernant "la personnalité" du député de la France insoumise (LFI). "J'ai plusieurs sources au sein de LFI, j'ai entendu plusieurs fois des femmes qui m'ont parlé du comportement qu'il aurait avec les femmes", a déclaré la journaliste, sans préciser ce que recouvrait ce terme.

"J'ai conscience que ce sont des accusations", a-t-elle reconnu, après avoir cité un article du magazine Causette, publié en décembre 2018 et intitulé "La France insoumise les préfère soumises ?" Cette enquête évoquait, sans le nommer, "un responsable, aujourd'hui député LFI" accusé de "dérapages connus et courants" par plusieurs jeunes militantes de l'époque. Interrogée sur l'absence de plainte contre Eric Coquerel, Rokhaya Diallo a fait valoir que Taha Bouhafs, journaliste et ex-candidat de la Nupes aux législatives dans le Rhône, avait mis fin à sa campagne à cause, notamment, d'un signalement envoyé à la cellule contre les violences sexistes et sexuelles de LFI, comme l'a rapporté Mediapart. Cet organe est chargé de recevoir les alertes concernant des membres du mouvement, d'éventuellement enquêter et de transmettre ensuite les informations circonstanciées aux instances dirigeantes de LFI.

2Le comité contre les violences sexuelles de LFI n'a reçu "aucun signalement"

Cette instance du parti est montée au créneau dès jeudi soir. "Depuis plusieurs semaines, le député Eric Coquerel est l'objet d'attaques sur les réseaux sociaux portant une suspicion sur son comportement envers les femmes. Attaques qui se sont amplifiées ce jour suite à son élection comme président de la commission des finances", écrit le comité. La cellule, qui assure être indépendante de la direction politique de LFI, atteste n'avoir "jamais reçu aucun signalement" concernant Eric Coquerel, "pour quel que fait que ce soit".

Alors que Rokhaya Diallo assure simplement vouloir "que la lumière soit faite" sur ces rumeurs, le comité se dit "à disposition pour écouter les femmes et recevoir leurs témoignages" mais déplore "la mise en circulation de rumeurs ne s'appuyant sur aucun élément concret".

3Des cadres de la Nupes mettent en garde contre "des accusations sans aucune preuve"

Invité de BFMTV jeudi soir, Manuel Bompard, député LFI (Nupes) des Bouches-du-Rhône, a déclaré que "jeter des accusations sans aucune preuve" était "très grave", dans un contexte qui l'est tout autant. "Les violences sexistes et sexuelles, c'est un sujet suffisamment sérieux pour que ça ne soit pas sur l'angle des rumeurs, des choses qui circulent sur les réseaux sociaux (…) Si Rokhaya Diallo a des informations, qu'elle oriente les personnes vers les instances mises en place au sein de notre mouvement. Elles seront traitées", a-t-il lancé.

Le député a par ailleurs questionné la mention de l'article de Causette lors de l'intervention de la journaliste : "Je ne sais pas de quels éléments elle dispose pour faire le lien avec ce député [Eric Coquerel]. Je trouve cela assez curieux qu'on se permette de lancer ce type d'accusation au moment où Eric Coquerel a été nommé président de la commission des finances de l'Assemblée nationale", a-t-il réagi.

De son côté, la députée EELV (Nupes) Sandrine Rousseau a déclaré vendredi matin à l'antenne de BFMTV qu'elle ne disposait pas de "témoignage direct" concernant de tels faits, "dont on ne sait pas du tout l'ampleur, ni sur quoi est fondée cette rumeur", a-t-elle souligné. "Et ce n'est pas faute d'avoir cherché, j'ai vraiment essayé (...) de trouver, car moi aussi, on m'a rapporté cette rumeur", a ajouté l'élue écologiste, qui évoque une enquête personnelle effectuée sur les dernières semaines.

Pour Sandrine Rousseau, la diffusion d'accusations sans preuve risque surtout de "nuire au combat des femmes". "J'envoie un message à toutes les victimes, s'il y en a : j'écouterai avec beaucoup de respect leur parole, a assuré la députée de la 9e circonscription de Paris. Mais pour l'instant, je n'ai aucun témoignage."

4Eric Coquerel évoque des "rumeurs infondées"

Eric Coquerel a réagi "pour la première fois" dans les colonnes du Journal du dimanche, évoquant des "rumeurs infondées". "Je fais cette tribune pour affirmer que je n'ai jamais exercé une violence ou une contrainte physique ou psychique pour obtenir un rapport, ce qui caractérise la porte d'entrée d'un comportement délictuel dans le domaine des violences sexistes et sexuelles", écrit-il dans un texte publié samedi soir sur le site de l'hebdomadaire (abonnés).

"Plusieurs rédactions ont mené des enquêtes journalistiques", rappelle-t-il, estimant que "rien n'est jamais sorti faute d'avoir trouvé un témoignage pouvant s'apparenter à un comportement délictuel, a fortiori criminel".

Dans cette tribune, le député de Seine-Saint-Denis mentionne le témoignage de Sophie Tissier. Cette ancienne militante du Parti de gauche s'était confiée anonymement en 2018 auprès du magazine Causette. Dans un nouvel article, publié samedi sur Mediapart, elle raconte désormais publiquement plus en détail une soirée de 2014 pendant laquelle elle explique avoir dansé avec lui. Elle affirme que celui-ci a eu "la main baladeuse toute la soirée" et évoque "plusieurs SMS" de la part d'Eric Coquerel pour qu'ils rentrent ensemble. "Ce n'était pas une agression", déclare-t-elle, ajoutant qu'elle n'a pas souhaité saisir la cellule de LFI à l'époque car, selon elle, "ce n'était pas suffisamment grave". Auprès de Mediapart, Eric Coquerel reconnaît simplement un "flirt".

5La militante Sophie Tissier déclare avoir saisi le comité de LFI

Sophie Tissier a finalement annoncé dimanche en fin de matinée avoir saisi le comité de suivi contre les violences sexistes et sexuelles de La France insoumise. "Je ne veux pas minimiser les faits. Ce n'était pas une agression physique violente, mais c'était quand même des gestes déplacés", a-t-elle déclaré à franceinfo. "J'ai vu que tout le monde disait que la cellule n'avait pas été saisie, que ce n'était que des 'on dit'. Alors, puisqu'il faut en arriver à saisir, je saisis", a-t-elle ajouté, pour expliquer son changement de décision.

Interrogé dimanche sur BFMTV sur ce signalement auprès des instances de LFI, Eric Coquerel a nié "absolument les gestes déplacés, des gestes de drague agressive" envers Sophie Tissier. "Je n'exclus pas de porter plainte pour diffamation", a-t-il ajouté.

Dans la foulée, la députée LFI Danièle Obono a confirmé sur BFMTV que le comité de suivi du mouvement "est saisi et va voir quelles sont les caractéristiques qui sont dans ce signalement (...) Il est important qu'on sache exactement de quoi il s'agit."

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.