Affaire Benalla : les Français ont le "droit d'entendre ce que les responsables ont à dire"
Jean-Christophe Lagarde, député de Seine-Saint-Denis et président du groupe UDI, Agir et Indépendants à l'Assemblée se félicite sur franceinfo que l'audition du ministre de l'Intérieur, lundi, ne soit finalement pas à huis clos.
La commission des Lois de l'Assemblée nationale, dotée des pouvoirs d'enquête, entendra lundi 23 juillet le ministre de l'Intérieur, Gérard Collomb, dans le cadre de l'affaire Benalla. Cette audition sera publique, ont décidé les parlementaires, après de longs et vifs débats.
Une disposition pour laquelle a milité Jean-Christophe Lagarde, député de Seine-Saint-Denis et président du groupe UDI, Agir et Indépendants à l'Assemblée : "C'est le droit des Français d'avoir toute la lumière, toute la vérité et d'entendre ce que chacun des responsables que nous allons auditionner a à dire", a-t-il affirmé sur franceinfo, samedi 21 juillet.
franceinfo : Que va changer le fait que l'audition de Gérard Collomb soit publique ?
Jean-Christophe Lagarde : L'audition devait évidemment être publique. Il y a manifestement une crise majeure au sein du pouvoir exécutif et quand il y a crise, ce sont les institutions qui doivent permettre d'en sortir. L'institution qu'est le Parlement, ou l'Assemblée nationale notamment, doit pouvoir garantir à la France et aux Français à la fois toute la transparence, toute la vérité, mais doit aussi permettre de tirer les conclusions des dysfonctionnements, des mensonges, des erreurs, des omissions qui ont pu avoir lieu, pour que ça ne se reproduise pas. Chaque Français a le droit de pouvoir manifester, sans risquer d'être atteint par les violences de quelqu'un qui fait semblant d'être policier et qui s'abrite au sein du pouvoir. Maintenant, il faut savoir qui est responsable de cette dérive et comment éviter qu'elle ne se produise à l'avenir. Depuis deux jours, l'Assemblée nationale a été paralysée, d'abord car le gouvernement a refusé de venir s'y exprimer alors qu'il l'avait fait au Sénat, ensuite parce qu'il fallait une commission d'enquête et que la majorité a fini par être obligée d'y concéder. Et puis hier soir, on nous expliquait du côté de la majorité qu'un certain nombre d'auditions devait être à huis clos, c'est-à-dire secrètes. Nous avons exigé et obtenu que rien ne soit secret, puisque c'est le droit à la fois naturellement des parlementaires, mais c'est le droit des Français d'avoir toute la lumière, toute la vérité et d'entendre ce que chacun des responsables que nous allons auditionner a à dire. Ils déposeront sous serment et s'ils mentent, ils seront sanctionnés sévèrement.
Vous disiez hier que l'Assemblée était "en train de se suicider", finalement comment se porte-t-elle ?
Heureusement, la nuit a porté conseil à la majorité, qui a changé d'avis et qui accepte cette transparence, car c'est notre devoir vis-à-vis des Français. L'Assemblée nationale était bloquée, parce que les institutions ne fonctionnaient pas, parce que la commission d'enquête ne pouvait pas fonctionner. Dès lors qu'elle peut à nouveau fonctionner, il faut que l'Assemblée nationale reprenne son travail et tire une conclusion. Nous sommes en train de réviser la Constitution. Que se passe-t-il ? Nous avons le président de la République le plus puissant de tous les dirigeants occidentaux et le Parlement le plus faible de toutes les démocraties occidentales. Quand il n'y a pas équilibre des pouvoirs, quand il n'y a pas un pouvoir qui arrête le pouvoir, comme le disait Montesquieu, alors à ce moment-là il y a des excès de pouvoir. Pour sortir de la crise, j'attends du président de la République qu'il tire des conséquences, qu'il réorganise son équipe pour faire en sorte que les gens qui ont fauté s'en aillent, et profite de la révision constitutionnelle pour qu'on rééquilibre les pouvoirs. Non pas pour déstabiliser l'exécutif, mais pour protéger l'exécutif et les Français contre les risques de ces excès de pouvoir. Dans d'autres démocraties, ce genre de choses n'arrive pas, parce que les choses s'équilibrent. Chez nous ça peut arriver, car depuis la Ve République, il y a un excès de pouvoir d'un côté et de trop faibles pouvoirs au Parlement pour contrôler, pour garantir que les Français ne connaissent pas et ne voient pas ce genre de dérives.
Le préfet de police de Paris, Michel Delpuech, sera aussi auditionné lundi, qu'en attendez-vous ?
Il y a trois procédures distinctes : une procédure judiciaire, qui doit établir les responsabilités et prendre des sanctions pénales, une procédure interne à l'exécutif pour découvrir ce qui s'est passé et il y a la procédure parlementaire. On auditionnera le préfet de police comme tout un tas d'autres personnes, pour savoir quel rôle chacun a joué, quels manquements éventuels ont été commis et pourquoi ça a dysfonctionné. Si on veut que l'Assemblée nationale fonctionne, il faut auditionner toutes les personnes liées à cette affaire, mais uniquement ces personnes. Nous ne souhaitons pas, au groupe UDI, Agir et Indépendants, faire de la politique politicienne. On a besoin d'entendre le directeur de cabinet du président de la République, ainsi que son chef de cabinet, mais je ne crois pas qu'on ait besoin d'entendre le secrétaire général, qui n'a jamais été cité dans cette affaire. Il faut entendre le porte-parole de l'Élysée, mais je ne vois pas l'intérêt, comme certains le proposent, d'entendre Christophe Castaner, car LREM n'est pour l'instant pas mise en cause. Je veux qu'on fasse de la vérité mais pas de la politique. Ensuite, si le gouvernement est mis en cause, si des responsabilités graves sont établies, alors nous pourrions nous associer à une motion de censure comme le propose Jean-Luc Mélenchon. Mais nous ne pouvons pas commencer une enquête en déterminant déjà son issue, sinon nous sommes dans une justice médiatique.
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