Avortement en Argentine : le pape François "va peser sur les consciences" car " c'est la mission de l'Église de préserver la vie"
Le pape "condamne et d'un autre côté veut montrer que l'Église se montre miséricordieuse et présente", affirme l'historien Philippe Levillain, spécialiste du catholicisme, invité de franceinfo mercredi.
Le pape François, qui est contre l'avortement, "va peser au moins sur les consciences", a estimé mercredi 8 août sur franceinfo Philippe Levillain, historien, spécialiste du catholicisme, alors que la légalisation de l'avortement divise depuis des semaines l'Argentine.
Le Sénat doit voter pour ou contre mercredi. La session s'ouvre à 15h30, heure française, et va durer toute la nuit. Les députés argentins ont donné en juin leur feu vert de justesse mais le dernier mot revient à la chambre haute. Depuis plusieurs jours, les pro et les anti IVG font pression et multiplient les manifestations.
franceinfo : Le pape François a toujours dit qu'il ne voulait pas interférer dans les décisions politiques de son pays mais il a multiplié les déclarations contre l’avortement. Il a malgré tout pesé sur ce débat en Argentine ?
Philippe Levillain : Il a pesé, et il va peser. Le pape François a été archevêque de Buenos Aires et président de la conférence épiscopale. Il est une image mondiale de ce que représente le message évangélique. Il va peser au moins sur les consciences à défaut de le faire par des déclarations qui sont toutes très mesurées d'ailleurs. Il faut dire aussi que c'est la mission de l'Église de préserver la vie à tout prix, il pratique une pastorale très recommandée qui invite à apporter de l'aide aux femmes qui ont avorté, à entendre leurs souffrances. C'est son style au pape François, d'une certaine façon : il condamne et d'un autre côté il veut montrer que l'Église se montre miséricordieuse et présente. L'Église ne peut pas beaucoup changer sur cette question, elle peut simplement témoigner de sa volonté d'être là en tant que mère consolatrice. Cependant, il y a tout de même une évolution, qui est lente certes, mais l'avortement après un viol est autorisé en Argentine.
L'Argentine a voté pour le mariage homosexuel. Comment expliquer de telles crispations sur la question de l'avortement ?
Ce n'est pas du tout pareil. Dans le cas du mariage homosexuel, on peut considérer que c'est la reconnaissance qu'il y a un amour vrai entre deux personnes du même sexe. L'avortement, c'est l'interruption de la vie, c'est tout à fait différent. L'Église ne l'acceptera jamais de façon ouverte, et de la même façon qu'elle vient de condamner la peine de mort de façon absolue, jamais l'Église, conformément à ce qui est sa mission, n'acceptera l'interruption volontaire de la vie.
Si le oui l'emporte en Argentine au Sénat, ce serait aussi une décision historique pour le continent latino-américain plus largement ?
Oui tout à fait. C'est le continent du pape. Il a vocation à être le représentant universel de la foi, ce sera un cas d'école ou un effet boule de neige. La région latino-américaine est une région catholique aux deux tiers. Ajoutés aux catholiques, les évangélistes, qui sont également anti-avortement, sont très nombreux en Amérique latine. Cela fait un poids de conscience énorme qui refuse l'avortement. Cependant, au Chili, on autorise l'avortement même en cas d'anomalie du fœtus, ce qui est rarissime. Le Chili est un cas très avancé.
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