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Etats-Unis : l’article à lire pour tout comprendre aux "midterms" avant la nuit électorale du 6 novembre

Article rédigé par Camille Adaoust
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9 min
Des électeurs votent pour les élections de mi-mandat à Atlanta (Etats-Unis) le 18 octobre 2018. (JESSICA MCGOWAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Les élections de mi-mandat se déroulent le 6 novembre aux Etats-Unis. Franceinfo vous résume tout ce qu'il faut savoir de ce scrutin crucial.

Ces élections pourraient faire basculer le mandat de Donald Trump : bloquer ou, au contraire, renforcer sa fin de mandat. Le 6 novembre, les Américains sont appelés à voter pour les midterms. Depuis plusieurs semaines, la campagne bat son plein. Démocrates et républicains s'affrontent pour remporter la majorité au Congrès et ainsi prendre la main sur la politique aux Etats-Unis. Mais à deux ans de la prochaine présidentielle, cette élection est-elle vraiment importante ? Quels en sont précisément les enjeux ? Qu'est-ce qui fait de cette campagne un moment inédit dans la politique américaine ? Franceinfo vous explique la situation.

Les "midterms", c'est quoi exactement ?

Les midterms sont des élections organisées à mi-mandat, c'est-à-dire deux ans après la précédente élection présidentielle et deux ans avant la prochaine. Elles se déroulent toujours le mardi suivant le premier lundi de novembre. Cette année, elles tombent le 6 novembre. Les électeurs sont notamment appelés à renouveler les deux chambres du Congrès, soit la totalité de la Chambre des représentants et un tiers des 100 sièges du Sénat.

Il s'agit d'un rendez-vous crucial de la politique américaine. "Les midterms sont importantes parce qu'elles déterminent quel parti aura la majorité au Congrès et pourra ainsi définir l'agenda législatif du pays", explique le magazine Time*. Selon la Constitution américaine, le pouvoir législatif revient au Congrès et toute loi passe donc par ses chambres. Ces élections peuvent donc chambouler l'agenda politique des deux prochaines années et la fin de mandat de Donald Trump.

Le Capitole, qui abrite les deux chambres du Congrès américain, à Washington le 6 juin 2018. (ALEX EDELMAN / CONSOLIDATED NEWS PHOTOS / AFP)

Quels postes vont être soumis au vote ?

Dans le détail, les 435 parlementaires de la Chambre des représentants, élus pour deux ans, remettent leur mandat sur la table, ainsi qu'un tiers des 100 membres du Sénat, élus pour six ans. Mais ce n'est pas tout : les élections de mi-mandat ne sont pas seulement nationales. Au total, "6 665 sièges au niveau des Etats et un millier de plus à un niveau plus local" vont également être soumis au vote des citoyens, précise encore le New York Times*.

Trente-six des cinquante Etats américains vont par exemple élire leur gouverneur. D'autres vont choisir leur shérif, leur juge, leur procureur général ou leur maire, comme le détaille le site du gouvernement*. Et certains électeurs vont se prononcer dans le cadre de référendums locaux, appelés ballot initiatives, sur des sujets de société très variés, tels que la légalisation du cannabis à usage récréatif, les impôts, l'assurance-maladie, l'avortement, le salaire minimum, indique le site Ballotpedia*.

Quelles sont les forces en présence ?

Depuis la déroute de Barack Obama et la "vague rouge" des midterms de 2014, les républicains sont majoritaires dans les deux entités du Congrès. Ils détiennent 236 des 435 sièges à la Chambre des représentants et 51 sur 100 au Sénat (voir infographies ci-dessous). Du côté des gouverneurs, l'avantage se trouve aussi côté républicain : à la veille des élections, le Grand Old Party dirige ainsi 33 des 50 Etats américains, relève le site Vox*.

L'enjeu est donc grand pour le camp démocrate qui espère reprendre des couleurs. "Pour prendre le contrôle de la Chambre, les démocrates doivent gagner au moins 23 sièges de plus [qu'actuellement]. Au Sénat, ils auraient besoin de deux sièges de plus", explique la chaîne ABC*. Un pari loin d'être gagné, d'après les derniers sondages.  

Pourquoi ces élections sont-elles capitales ?

Depuis la France, elle n'en a pas l'air, mais oui, ce rendez-vous est crucial. En règle générale, ces élections de mi-mandat "sont une sorte de sondage grandeur nature des deux premières années de la présidence", analyse le spécialiste de la politique américaine Corentin Sellin pour franceinfo. Ces midterms représentent la première occasion de voter depuis l'élection de Donald Trump, qui a beaucoup divisé en deux ans à la Maison Blanche. Ses opposants pourront exprimer leur mécontentement dans les urnes et ses fidèles y voient une "chance de montrer leur soutien à Trump et son administration", décrit ABC. Et ils sont encore près de 43% à défendre le président, selon le site FiveThirtyEight*.

Pour ces midterms, le défi se trouve surtout du côté démocrate. Après la déconvenue de l'élection présidentielle de 2016, le parti cherche à se reconstruire et surtout, tente d'avoir de nouveau voix au chapitre. Car, depuis deux ans, le large avantage pris par les républicains leur permet de "mettre pleinement en œuvre le programme" de Donald Trump, explique Le Monde.

Les démocrates espèrent donc conquérir a minima la Chambre des représentants, voire le Sénat. Une telle cohabitation leur permettrait de faire barrage à l'agenda législatif du président, mais aussi de multipier les enquêtes parlementaires contre l'administration Trump, notamment sur les soupçons de collusion entre l'équipe de campagne du milliardaire et la Russie en 2016. "Les derniers exemples américains montrent que la majorité parlementaire nouvelle, quand elle est opposée au président après les midterms, est très agressive et cherche absolument à imposer son agenda par rapport à celui du président", note Corentin Sellin. 

Sur quoi s'écharpent les candidats ?

Principalement sur... Donald Trump ! Le nom du président est sur toutes les lèvres. Les clips de campagne en sont un bon exemple. Dans leurs vidéos, certains de ses opposants le prennent directement pour cible, comme Rich Madaleno*, et ses soutiens le présentent en modèle, comme Ron DeSantis* dans ce clip de campagne.

Au-delà de sa personnalité, les débats portent souvent sur le bilan et l'action du chef de l'Etat. Les sujets qui lui sont chers se retrouvent donc au cœur de la campagne, comme la santé et l'encadrement de la vente d'armes à feu, d'après un sondage réalisé par YouGov pour le HuffPost* (document PDF). "Pendant les débats, démocrates et républicains s'opposent sur la qualité de l'[Obamacare]", la réforme de santé mise en place par le précédent locataire de la Maison Blanche, précise le New York Times. Au Texas par exemple, Beto O'Rourke défend fermement l'idée d'un système de santé universel face à l'actuel sénateur républicain Ted Cruz. 

A l'image des deux dernières années, l'immigration est aussi un sujet central. Lors de ses derniers meetings, le président a ainsi attiré l'attention sur la caravane de migrants partis du Honduras pour trouver refuge aux Etats-Unis. Objectif : en faire "un argument contre les démocrates", décrit Libération.

Qu'est-ce que cette élection a de particulier ?

Conséquence du mouvement #MeToo, les femmes occupent une place inédite dans ces élections. "Cent femmes pourraient être élues pour siéger à la Chambre des représentants", titre NBC*. Ce serait historique. Les candidatures elles-mêmes ont battu tous les records : 257 femmes (198 démocrates et 59 républicaines) se sont présentées pour siéger au Congrès, où elles n'occupent encore que 20% des sièges. Des candidates pourraient aussi briller à des postes de gouverneures, "vus comme traditionnellement masculins", explique Libération. Parmi elles, Stacey Abrams en Géorgie, Michelle Lujan Grisham au Nouveau-Mexique ou encore Lupe Valdez au Texas. Elles "ont remporté les primaires dans neuf Etats. Quatre d'entre elles pourraient devenir les premières femmes à occuper ce poste" dans leur Etat, décrit le New York Times*

Alexandria Ocasio-Cortez s'exprime à Boston (Etats-Unis), le 1er octobre 2018. (SCOTT EISEN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Poussées par une hostilité viscérale à Donald Trump, de nombreuses personnes ont aussi décidé de se lancer pour la première fois et engager un renouvellement des élites politiques, notamment côté démocrate. La militante noire de Boston Ayanna Pressley a ainsi battu lors d'une primaire un sexagénaire, qui siégeait au Congrès depuis vingt ans, promettant un "mouvement qui apportera du changement et un nouvel horizon à Washington". D'autres victoires surprises sont venues confirmer la tendance, insufflant au passage plus de diversité : celle d'Alexandria Ocasio-Cortez (photo ci-dessus) à New York, une femme hispanique du Bronx, ou encore celle d'Andrew Gillum en Floride, maire noir de Tallahassee de 39 ans investi par les démocrates pour briguer le poste de gouverneur.

Qui sont les têtes d'affiche ?

Si quelques nouveaux se sont fait remarquer comme Andrew Gillum, candidat démocrate au poste de gouverneur en Floride, ou Alexandria Ocasio-Cortez, les projecteurs ont surtout mis en lumière des personnalités nationales. Avec en tête : Donald Trump. Si son nom n'apparaît pas sur les bulletins de vote, le président est omniprésent dans cette campagne. Wisconsin, Texas, Nevada, Arizona... Entre la fin août et la date de l'élection, la Maison Blanche lui a prévu 40 déplacements en deux mois. Le président américain vient défendre les candidats républicains et martèle son message de campagne devant des supporters galvanisés, le regard déjà porté sur la présidentielle de 2020.

Donald Trump arrive à un meeting pour les "midterms" à Houston (Etats-Unis) le 22 octobre 2018. (SAUL LOEB / AFP)

De l'autre côté, "le manque criant de leadership au sein du camp démocrate", comme l'analyse Libération, a porté sur le devant de la scène une autre figure nationale : Barack Obama. "Depuis début septembre, l'ex-président de 57 ans multiplie les meetings. Il a aussi apporté son [soutien] à plus de 340 candidats à travers le pays", relate le quotidien français. L'ex-président appelle d'ailleurs le camp démocrate à voter massivement pour mieux contrer les alliés de Donald Trump. 

A quels résultats s'attendre ?

L'histoire est favorable au parti d'opposition. Première occasion d'un vote sanction, les élections de mi-mandat sont traditionnellement défavorables au camp du président au pouvoir. NBC* confirme : "Depuis la guerre de Sécession, le parti du président a perdu en moyenne 32 sièges dans la Chambre et deux au Sénat lors de chaque élection de mi-mandat." Et Donald Trump est particulièrement impopulaire dans les sondages d'opinion. Les démocrates se sont donc pris à rêver d'une "vague bleue" dans les deux chambres. Mais à l'approche du scrutin, ce scénario est de moins en moins crédible, notamment après la déconvenue liée à la nomination du juge conservateur Brett Kavanaugh à la Cour suprême. 

Si, pour la Chambre, l'objectif de 23 sièges à conquérir semble atteignable (le site FiveThirtyEight*, référence dans les prédictions électorales, leur donne cinq chances sur six à deux semaines du scrutin), le Sénat paraît plus difficile à reprendre. Les démocrates y font face à une conjoncture plus difficile : ils doivent défendre 26 des 35 sièges remis en jeu, dont plusieurs dans des Etats qui ont voté majoritairement pour Donald Trump à la présidentielle. FiveThirtyEight* ne leur donne qu'une chance sur cinq de le reprendre. Et les républicains pourraient même renforcer leur majorité. 

J'ai eu la flemme de tout lire, vous me faites un résumé ? ;)

Le 6 novembre prochain, les électeurs américains sont appelés aux urnes. A l'occasion des midterms ou élections de mi-mandat, ils vont renouveler l'intégralité de la Chambre des représentants et une partie du Sénat, à majorité républicaine. Ce n'est pas tout : dans certains Etats, ils vont également élire leurs gouverneurs, des maires ou encore des représentants locaux. Cette élection d'ampleur, en termes de sièges à renouveler, ressemble aussi à un référendum pour ou contre Donald Trump. Ces midterms "sont une sorte de sondage grandeur nature des deux premières années de la présidence", décrypte le spécialiste Corentin Sellin. Le résultat pourrait bloquer ou renforcer sa fin de mandat.

La campagne s'est donc faite en grande partie autour de la personnalité et du bilan du président en place. Il s'est d'ailleurs engagé avec ferveur dans la campagne afin d'enrayer une possible "vague bleue". Face à lui, de nombreuses personnalités dont beaucoup de femmes, poussées par leur hostilité envers le milliardaire, ont décidé de se lancer pour la première fois en politique. Misant sur ce renouvellement, le camp démocrate joue gros : il espère regagner des sièges pour influencer la politique des deux prochaines années et surtout se reconstruire en vue de la présidentielle de 2020.

* Tous ces liens renvoient vers des contenus en anglais

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