"Ce 'Woody Allen-bashing' prend un tour de folie" : Jack Lang défend le réalisateur, accusé d'agression sexuelle
L'ancien ministre de la Culture a affiché sur Twitter son plein soutien au réalisateur américain, de nouveau dans la tourmente. Franceinfo l'a interrogé sur cette marque "d'amitié".
Il a tenu à lui afficher publiquement son soutien. Sur son compte Twitter, l'ancien ministre de la Culture, Jack Lang, a rédigé deux messages à destination de Woody Allen, aujourd'hui rattrapé par le mouvement #MeToo. "I love you", lui écrit-il dans le premier, tandis que le second le représente sur une photo en compagnie du célèbre cinéaste. "Malaise", "mauvais timing", "on a perdu Jack Lang", réagissent les internautes.
>> Du tapis rouge à la liste noire : comment le mouvement #MeToo a fini par rattraper Woody Allen
Car le réalisateur de Manhattan est aujourd'hui dans la tourmente. Dylan Farrow, sa fille adoptive, a réitéré ses accusations, dans un entretien diffusé jeudi par la chaîne CBS : Woody Allen l'aurait agressée sexuellement alors qu'elle n'avait que sept ans. Des propos fermement démentis, de nouveau, par le cinéaste.
Mais dans la foulée, plusieurs acteurs, dont Natalie Portman, Colin Firth ou encore Reese Witherspoon, ont fait part de leurs regrets d'avoir travaillé avec Woody Allen. Une condamnation bien trop rapide pour Jack Lang, ancien ministre de la Culture désormais président de l'Institut du monde arabe.
Franceinfo : Pourquoi avoir eu envie d'afficher publiquement votre soutien ou plutôt votre amour à Woody Allen ?
Jack Lang : C'est en effet affectif et admiratif. Je ne suis pas juge pour démêler le vrai du faux mais il y a manifestement un "Woody-bashing" qui ne date pas d'aujourd'hui. Il y a aussi un harcèlement permanent qui vient de sa famille depuis dix, vingt ans. Je le connais un peu, je sais bien à quel point lui et Soon-Yi [son ex-belle-fille devenue son épouse] ont été l'objet de harcèlements constants. Ce sont des choses qui remontent à très loin.
Je ne m'érige pas en juge ou en Cour suprême de la morale mais dans cette période, aux Etats-Unis, il y a eu une sorte de chasse aux sorcières dans la presse, dans certains médias.
Jack Langà franceinfo
Ça prend un tour violent, brutal. Il y a des pressions innombrables qui s'exercent pour ne pas diffuser ses films, pour contraindre les acteurs à se retirer des castings. J'admire l'œuvre de Woody Allen. J'ai eu le désir de dire mon amitié à quelqu'un qui se trouve dans une situation très dure, mais je n'en tire pas de conclusion sur l'affaire.
#WoodyAllenforever pic.twitter.com/iZ9haPaasa
— Jack Lang (@jack_lang) 19 janvier 2018
Est-ce que vous comprenez que vos tweets puissent choquer alors que sa fille adoptive a réitéré ses accusations d'agression sexuelle à son encontre ? Des acteurs d'Hollywood ont aussi annoncé qu'ils ne travailleront plus avec lui...
On peut argumenter dans les deux sens. L'accusation qui est portée remonte à fort loin même si elle a été réitérée récemment. On en tire la conséquence que Woody Allen devrait être mis au banc de la société. C'est la position de certains acteurs. Je ne suis pas seulement un ami, je suis aussi très attaché aux droits et à la présomption d'innocence. A ce jour, aucun magistrat n'a démontré que Woody aurait commis je ne sais quel acte répréhensible. Jusqu'à preuve du contraire, Woody a dit et redit qu'il était totalement étranger à ces accusations.
Pourquoi en cette période spéciale faudrait-il jeter l'opprobre sur Woody ? Ça se traduit par la pire des choses : une censure économique, un interdit professionnel à l'égard d'un grand-maître du cinéma mondial.
Jack Langà franceinfo
Les accusations ainsi portées méritent d'être entendues, mais elles ne valent pas condamnation, excommunication, interdit, censure ou opprobre.
Est-ce que vous êtes d'accord avec la tribune du Monde sur "la liberté d'importuner" ? Les signataires s'inquiétaient justement de la "censure" d'artistes ou d'œuvres après la vague #BalanceTonPorc...
Je n'approuve pas tous les termes de cette tribune et l'usage qui en a été faite par certaines jusqu'à justifier le viol, c'est intolérable. Catherine Deneuve a eu raison de s'en désolidariser.
Je suis totalement contre le harcèlement sexuel et les discriminations à l'égard des femmes mais en même temps ce beau combat ne doit pas éventuellement servir à justifier, dans certains cas, des censures et des interdits.
Jack Langà franceinfo
Catherine Deneuve parlait d'œuvres peintes mais là, il s'agit d'un être vivant, Woody Allen. Il faut être tous attentifs à éviter les amalgames. Ce "Woody-bashing" prend un tour de folie. Mais je ne prétends pas être détenteur de la vérité.
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