Cet article date de plus de huit ans.

Un vaisseau du siècle des Lumières à vendre

Une petite annonce qui intéressera peut-être tous ceux qui se sont imaginé un jour capitaine, pirate ou grand découvreur du siècle des Lumières : un trois-mâts du XVIIIème siècle est à vendre : le Götheborg, en Suède. C'est en fait la réplique exacte d'un navire de la compagnie des indes suédoise de 1745. Un navire qui a très fortement inspiré l'Hermione, à Rochefort.
Article rédigé par Grégoire Lecalot
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (Le Götheborg sous voiles. © SOIC/Götheborg)

Avec ses grandes voiles carrées et sa poupe, son arrière, sculpté, le Götheborg inspire immédiatement tous ceux qui un jour dans leur vie, se sont rêvé aux côtés de Cook, Bougainville, Surcouf, Latouche-Tréville ou Long John Silver. Ce trois-mâts du XVIIIème siècle, réplique à l'identique d'un vaisseau marchand de la Compagnie des Indes orientales suédoises de 1745 est à vendre. La fondation à qui il appartient l'a annoncé cette semaine, refusant toutefois de communiquer un prix d'achat, qui reste à négocier avec un éventuel acquéreur. Il s'élevera sans doute à plusieurs millions d'euros. Dix ans après son voyage inaugural, la fondation n'a plus les moyens de l'entretenir. L'affaire est suivie avec intérêt en France, du côté de Rochefort, où l'équipage de l'Hermione connaît bien le navire suédois, qui a en quelque-sorte fait office de parrain à la frégate de La Fayette.

615 jours de mer

Les deux aventures se suivent et se ressemblent en effet. Comme l'Hermione , le Götheborg est un pari fou de quelques passionnés. Et comme l'Hermione , sa construction s'est étendue sur plusieurs années : de 1993 à 2005 en Suède. Le public était invité à la suivre. Et en 2005, là encore une ressemblance entre les deux histoires : le Götheborg se lance dans un grand voyage inaugural. Il ne fait pas route vers les Etats-Unis, mais vers la Chine comme son illustre ancêtre de 1745.

Ses marins ne sont pas prêts d'oublier ces 615 jours de mer : le bateau qui part sans être fini. Il a fallu le terminer en mer. La chute d'une partie d'un mât dans un coup de vent. Un équipage de jeunes volontaires lancé dans un relais sur la moitié du globe. Un accueil triomphal : le voyage se termine avec le vice-président chinois et le roi de Suède à bord. L'Hermione aura eu la visite du président de la République, du Premier ministre et les souhaits de bon vent de Barack Obama.

A LIRE AUSSI :

►►► De l'arbre à la frégate, le roman de l'Hermione

►►► Des dauphins aux coups de vent : scène de la vie de l'Hermione

►►► Revivez la traversée de l'Atlantique sur l'Hermione

Et le parallèle ne s'arrête pas là puisque sans le Götheborg , l'Hermione aurait été beaucoup plus difficile à construire, en particulier sa partie mâts, cordages, voiles, bref son gréement. L'expérience des marins suédois a été vitale pour donner des ailes à la réplique de la frégate rochefortaise. Ces gréements du XVIIIème siècle sont très compliqués. Sur l'Hermione , il y a 36 km de cordages. Et n'existe pas véritablement de manuel pour mieux les connaître car à l'époque, les constructeurs de navires écrivaient très peu.

Compagnonnage

Ce sont donc les concepteurs du Götheborg qui ont travaillé sur l'Hermione et le compagnonnage ne s'est pas arrêté là. Lors de ses essais en mer à l'automne 2014, la frégate a embarqué une petite dizaine de marins suédois au total, qui ont donné un coup de main à l'équipage français novice. Certains sont devenus incontournables, comme l'emblématique maître d'équipage de l'Hermione, le bosco, Jens Langert, un des pères fondateurs du Götheborg , qui a traversé l'Atlantique aller et retour l'été dernier avec l'Hermione .

  (A gauche, le bosco suédois de l'Hermione, Jens Langert, sur le pont de la frégate.  © Association Hermione-La Fayette)

1,3 millions d'euros par an

Dans ces conditions, l'Hermione ne risque-t-elle pas un jour de connaître les mêmes difficultés et le même sort que le Götheborg ? Financièrement, l'année a été plutôt bonne pour la frégate depuis le retour du voyage américain. Les visiteurs n'ont pas déserté le site de Rochefort et elle verra sans doute encore défiler des milliers de personnes lors de ses navigations d'été à Saint Malo et à Brest.

Mais les deux modèles économiques sont tout de même proches. Et ces navires coûtent terriblement cher à entretenir et faire naviguer. Le Götheborg doit trouver 1,3 million d'euros par an pour l'entretien et la navigation. Le budget d'entretien de l'Hermione tourne autour de 800.000 euros, rien que pour l'entretien du navire. Comme l'Hermione , le Götheborg compte d'abord sur ses resources propres : visites et activités du navire. Mais l'association Hermione-La Fayette en a su en générer de plus abondantes : elles représentent plus de 60% des revenus. Ensuite le vaisseau suédois reçoit des aides de la ville de Götheborg , tandis que l'Hermione a noué des partenariats avec les collectivités territoriales de la région.

Vaisseau de Louis XIV en construction

Les partenaires privés sont peu nombreux et l'abandon de l'un d'eux a contraint le navire suédois a renoncer à un nouveau voyage en Chine en 2014. Depuis il se débat avec les difficultés financières. De quoi faire réfléchir donc, sur les bords de la Charente mais pas seulement. D'autres projets de grands navires sont en cours ou en gestation. Le plus avancé se trouve à Gravelines, dans le Nord, où l'association Tourville reconstruit le Jean-Bartun grand vaisseau de l'époque de Louis XIV.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.