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Entre soupçons de jihadisme et roues arrière sur le périph, qui sont les Kamikaze Riders ?

Le club de motards belges est cité dans une enquête ayant abouti à un vaste coup de filet antiterroriste cette semaine. Ses membres rejettent tout lien avec la mouvance jihadiste.

Article rédigé par Kocila Makdeche
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Capture d'écran d'une vidéo YouTube montrant un rassemblement des Kamikaze Riders. (YOUTUBE)

Une nouvelle fois, les Kamikaze Riders se retrouvent cités dans les dossiers du parquet antiterroriste de Belgique. Les autorités belges et françaises ont procédé, dans la nuit du mardi 4 au mercredi 5 juillet, à un coup de filet simultané en arrêtant une personne dans la banlieue lilloise et quatre autres à Anderlecht, une commune populaire de l'agglomération bruxelloise. Lors des perquisitions, les autorités ont saisi un véritable arsenal de guerre : des armes, dont trois kalachnikovs, des munitions, des détonateurs, des gilets pare-balles...

Parmi les interpellés belges, deux ont été remis en liberté et deux autres ont été inculpés pour "participation aux activités d'un groupe terroriste" et placés en détention provisoire. Ils sont suspectés d'avoir "un lien direct avec des membres des Kamikaze Riders", a précisé Eric Van der Sypt, le porte-parole du parquet fédéral belge. Mais qui sont vraiment les membres de ce club de motards ? Franceinfo donne des éléments de réponse.

Des membres incarcérés pour "appartenance à un groupe terroriste"

Les deux personnes inculpées mercredi – Akim et Khalid Saouti, 40 et 37 ans – sont les grands frères de Saïd Saouti, le fondateur des Kamikaze Riders. Le cadet de la fratrie, âgé d'une trentaine d'années, avait été arrêté en décembre 2015 avec un autre membre du gang de motards : Mohamed Karay. Les autorités les soupçonnaient de préparer un attentat contre "des lieux emblématiques" de Bruxelles.

La page YouTube de ce Saïd Saouti – toujours en ligne – est à l'image du tournant pris par ce fan de grosses cylindrées. Des prêches islamistes y cohabitent avec des vidéos où des membres des Kamikaze Riders font des acrobaties à moto sur des rythmes de beatbox, qu'on devine enregistrés dans une chambre. Sur la photo de profil, Saïd Saouti apparaît de dos, le doigt levé vers le ciel, portant un pull à capuche frappé du sigle de l'organisation Etat islamique.

Lors de son procès, l'an dernier, le parquet avait fini par demander un non-lieu pour les accusations portant sur la planification d'un attentat : aucune arme n'avait été retrouvée pendant l'enquête. Saïd Saouti a finalement été condamné à six ans de prison l'an dernier pour "appartenance à un groupe terroriste", incitation à commettre des "infractions terroristes" et "apologie du terrorisme" sur les réseaux sociaux.

De son côté, Mohamed Kalay a écopé de trois ans de prison, dont une partie avec sursis. A l'époque, de nombreux articles de presse questionnaient les relations supposées entre le groupe de motards et la mouvance jihadiste.

Deux fratries dans le viseur des enquêteurs

"Il n'y a que des conneries qui sortent sur nous dans les médias", s'indigne un membre des Kamikaze Riders, interrogé par franceinfo. S'il confirme que Saïd Saouti a bien fondé les Kamikaze Riders, il assure que son club de moto n'a aucun lien avec ses deux frères, inculpés mercredi.

Les frères de Saïd ne sont pas des Kamikaze Riders ! Ils n'ont jamais roulé avec nous ! Et le clampin arrêté en France, on ne sait même pas qui c'est !

Un membre des Kamikaze Riders

à franceinfo

Une source judiciaire belge, interrogée par franceinfo, confirme que les deux hommes n'entrenaient aucune relation avec les Kamikaze Riders, hormis leur lien fraternel avec Saïd Saouti. 

Une autre fratrie a été, pendant un temps, dans le viseur des enquêteurs : les Elouassaki. Houssein et Hakim, 26 et 24 ans, étaient membres de Sharia4Belgium, un groupuscule islamiste basé à Anvers et dissout en 2012. Ils sont partis combattre en Syrie, puis ont été condamnés à de la prison en 2015. Le frère aîné, Abdelouafi était membre des Kamikaze Riders, avant de se tuer lors d'un accident de moto en 2013. A l'époque, ses proches avaient nié tout soupçon de radicalité chez le motard. "Oui, c’est un musulman, c’est sa confession et sans rien d’anormal. Il était blessé qu’on ait sali le nom de sa famille !, s'était indigné son meilleur ami auprès de La Capitale. Mais regardez les photos et les vidéos sur le site internet. Est-ce qu’Abdelouafi a le profil d’un extrémiste ?"

Après-midi barbecue et acrobaties à moto

Les vidéos postées sur YouTube montrent, dans leur grande majorité, des motards filer à vive allure sur le "ring", le périphérique bruxellois. On peut notamment y voir plusieurs jeunes hommes, réunis autour d'un barbecue sur un parking, pendant que d'autres font des roues arrière en moto ou en quad.

Loin des Harley-Davidson, affectionnées par les gangs de motards internationaux, les Kamikaze Rider ont des cylindrées sportives ou, pour certains, de simples scooters. Ils n'ont pas non plus de vestes en cuir ou de tatouages obligatoires, comme c'est le cas chez les Hell's Angels, par exemple. Ils arborent néanmoins un logo imprimé sur des tee-shirts : une silhouette de samouraï, katana à la main. 

Le club de motards a été créé en 2003, regroupant initialement des jeunes passionnés par le vélo acrobatique. D'après les membres du club, ils seraient désormais une centaine de passionnés de deux-roues, répartis dans toute la Belgique.  

A en croire l'un de ces motards, le choix du terme "kamikaze" n'aurait rien à voir avec l'imaginaire jihadiste, mais ferait référence au sens premier du terme, aux pilotes d'avion japonais qui se lançaient dans des missions suicides lors de la seconde guerre mondiale. Il précise que les membres du club sont loin d'être uniquement musulmans. "Je suis chrétien, j'en fais partie depuis plus de dix ans et je n'ai jamais eu aucun souci au sein du groupe !"

Pour redorer sa réputation, le club de motards prévoit d'organiser un "show contre la pauvreté", samedi 8 juillet à Charleroi. "Nous allons faire une distribution pour les SDF. Voilà à quoi participent les Kamikaze Riders : à des bonnes actions !", conclut-il. 

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