Chef d'Al-Qaïda tué par les États-Unis : "Les Américains ne lâchent pas" ceux qui ont commis "des crimes épouvantables" dans leur pays, explique un spécialiste
Les États-Unis ont affirmé lundi que le leader du groupe terroriste Al-Qaïda, Ayman Al-Zawahiri, avait été tué dans une frappe aérienne en Afghanistan.
"Les Américains ne lâchent pas quand ils ont ciblé un certain nombre de chefs terroristes qui ont commis des crimes épouvantables aux États-Unis", explique l'ancien colonel de réserve opérationnelle, spécialiste des questions de défense, Pierre Servent mardi 2 août sur France Inter, après que les États-Unis ont annoncé avoir tué le désormais ex-n°1 d'Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri, à Kaboul.
franceinfo : Cette annonce américaine est-elle une surprise pour vous ?
Pierre Serven : C'est une surprise parce qu'évidemment aucune information ne pouvait filtrer sur le fait que les Américains étaient en train de préparer quelque chose contre le nouveau chef d'Al-Qaïda. Mais en même temps ce n'est pas une surprise, dans le sens où on sait que les Américains ne lâchent pas et que quand ils ont ciblé un certain nombre de chefs terroristes qui ont commis des crimes épouvantables aux États-Unis, ils peuvent mettre dix ans - c'est ce qui s'est passé pour Ben Laden - ou 20 ans comme pour celui-ci, voire 30 ans si éventuellement il y a d'autres cibles. Donc j'étais surpris sur le moment, mais pas surpris sur le fond par rapport à l'attitude américaine.
Que sait-on de cette opération ?
Pour l'instant peu de choses. Ce qu'il faut savoir c'est qu'avant ce type d'opérations, vous avez toute une filière de renseignement qui est mise en œuvre, qui passe aussi bien par des observations de satellites, des observations de drones, des systèmes d'écoute et, surtout, ce qui est très important, mais là-dessus on n'en saura rien avant très longtemps, du renseignement humain qui permet de tracer le parcours, les habitudes, les lieux où se trouve la cible. Là, en l'occurrence, comme c'est assez classique, il semblerait que la CIA ait d'abord identifié la famille de l'Égyptien avant de remonter jusqu'à Ayman al-Zawahiri. Après, la CIA propose au président américain plusieurs options militaires en évaluant les risques, notamment les risques de pertes collatérales et de dégâts collatéraux et c'est le président qui tranche.
Cela veut-il dire que c'est une préparation de plusieurs semaines, de plusieurs mois ?
Voire de plusieurs années. Je pense que les Américains ne se sont pas du tout démobilisés sur cette cible et sur d'autres. Il y a deux ans, le numéro deux d'Al-Qaïda, Abdullah Ahmed Abdullah, avait été tué à Téhéran par une opération sans doute conduite par les Israéliens mais commanditée par Washington. Ce sont des opérations qui peuvent demander des mois, des années de renseignement. Ça a été le cas aussi pour les Français. Ils ont mis hors de combat ou tué au combat Abdelmalek Droukdel qui était l'émir d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
C'était en juin 2020 et bien avant d'arriver à cette élimination de ce chef majeur d'Al-Qaïda, il y a eu des mois de renseignement, d'écoute, de traçage de l'environnement de ce personnage pour recueillir ce que les militaires appellent le renseignement à fin d'action, c'est-à-dire la fine pointe du renseignement qui permet de passer à l'action, après feu vert évidemment, des chefs des armées ou des commandants en chef.
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