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Sanction économique, refus de dialoguer... La Russie multiplie les représailles contre la Turquie

Trois jours après la destruction d'un bombardier russe par des avions de chasse turcs à la frontière turco-syrienne, la Russie riposte.

Article rédigé par Elise Lambert
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Un manifestant dénonce la destruction d'un bombardier russe par des avions de chasses turcs devant l'ambassade de Turquie à Moscou (Russie), le 25 novembre 2015. (KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP)

Après l'attaque, la riposte. Quatre jours après la destruction, mardi 24 novembre, d'un bombardier russe Su-24 par des avions de chasse turcs à la frontière turco-syrienne, et la mort d'un pilote et d'un soldat russe, les actes antiturcs se multiplient en Russie.

Alors que le bombardier revenait d'une mission de combat dans le nord-ouest de la Syrie, les forces aériennes turques ont abattu l'appareil, soutenant qu'il avait violé l'espace aérien de la Turquie. Cet incident est le plus grave pour Moscou depuis le début de son intervention militaire en Syrie le 30 septembre.

L'ambassade de Turquie à Moscou saccagée

L'Ambassade de Turquie à Moscou, le 25 novembre 2015, après que des manifestants russes se soient rassemblés pour contester l'attaque d'un bombardier russe par les forces turques. (EUGENE ODINOKOV / RIA NOVOSTI)

Mercredi, environ 500 personnes se sont rassemblées en début d'après-midi devant l'ambassade de Turquie à Moscou. Les manifestants, quasiment tous des hommes âgés de 20 à 30 ans, ont crié des slogans hostiles au président turc Recep Tayyip Erdogan, sans aucune intervention de la police présente sur les lieux.

Des bouteilles et des avions en papier ont été lancés sur l'ambassade. Certains manifestants portaient des pancartes sur lesquelles était écrit "La Turquie va rester sans gaz" ou "Coup de poignard dans le dos", reprenant les mots du président russe Vladimir Poutine. Selon la radio indépendante Ekho Moskvy, citant des témoins oculaires, une dizaine de manifestants ont fini par être arrêtés par les forces de l'ordre.

Vladimir Poutine boude son homologue turc

Sept ou huit heures après l'incident, le porte-parole du Kremlin a annoncé que le président russe Vladimir Poutine avait refusé de répondre au président turc Recep Tayyip Erdorgan au téléphone. "Jusqu'à maintenant, Vladimir Poutine n'a toujours pas répondu à mon appel", a confirmé le président turc, dans une interview à France 24 jeudi.

"Il faut qu'on parle, qu'on voit de quoi il en retourne. Il faut qu'on continue à œuvrer ensemble", a ajouté le chef de l'Etat turc. Mais Vladimir Poutine continue de bouder son homologue : le président russe a aussi refusé la rencontre proposée par Recep Tayyip Erdogan, justifiant que ce dernier a refusé de lui présenter ses excuses.

Les Turcs devront de nouveau se doter d'un visa

Autre représaille diplomatique, la Russie a décidé de rétablir les visas pour les Turcs, mettant fin au régime d'exemption en vigueur entre les deux pays. "Nous avons de plus en plus de questions sur la volonté réelle d'Ankara d'éradiquer le terrorisme", a déclaré Sergueï Lavrov, le ministre des Affaires étrangères russe lors d'une conférence de presse vendredi. 

"Cette décision s'appliquera à partir du 1er janvier", a précisé le chef de la diplomatie russe. Sergueï Lavrov assure pourtant qu'il ne s'agit pas de vengeance : "La menace est réelle. Ankara a dépassé les limites de ce qui est acceptable."

Des sanctions économiques contre l'agriculture turque

Le ministère de l'Agriculture a également renforcé ses contrôles sur les produits agricoles et alimentaires importés de Turquie en raison de "violations répétées des normes" sanitaires. Un motif souvent évoqué par la Russie en fonction de ses nécessités géopolitiques. Alexandre Tkatchev, le ministre de l'Agriculture russe, a assuré que la Russie pourrait d'ailleurs se passer des produits turcs. "Nous remplacerons les importations de légumes, surtout les tomates, par d'autres pays : l'Iran, le Maroc, Israël, l'Azerbaïjan, l'Ouzbékistan", rapporte Le Monde.

Les importations turques en Russie ont dépassé trois milliards de dollars (environ 2,8 milliards d'euros) sur les trois premiers trimestres 2015, dont 280 millions de dollars (264 millions d'euros) pour les tomates. Selon la presse russe, les douanes inspectent déjà toutes les marchandises arrivant de Turquie sans se limiter à la nourriture, entraînant retards et blocages.

Les ressortissants russes en Turquie invités à rentrer

Les Russes séjournant en Turquie sont enfin appelés à rentrer en Russie. Le ministère des Affaires étrangères invoque "l'actuelle menace terroriste en Turquie". Mercredi, l'un des plus grands tours-opérateurs russes, Pegas Touristik, a annulé d'un coup ses réservations vendues pour la Turquie, jusqu'au 29 décembre. Les clients ont été invités à se reporter sur d'autres destinations.

Cette annonce pourrait priver la Turquie de plus de trois millions de touristes par an. Son attraction s'était pourtant renforcée à la suite de l'attentat le 31 octobre, d'un avion russe dans le désert du Sinaï, en Egypte.

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