Cet article date de plus de sept ans.

Récit "J'ai attrapé ma fille et on a couru" : à 22h30, le concert d'Ariana Grande à Manchester vire au cauchemar

Plusieurs milliers de spectateurs ont assisté lundi soir à la performance de la star américaine. A la fin de la soirée, une explosion, revendiquée par le groupe Etat islamique, a tué 22 personnes.

Article rédigé par Vincent Daniel
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Des spectactrices présentes au concert d'Ariana Grande sont prises en charge par les secours, dans la nuit du 22 mai 2017, à Manchester (Royaume-Uni).  (PAUL ELLIS / AFP)

Le concert d'Ariana Grande à la Manchester Arena touche à sa fin. Il est 22h30, lundi 22 mai, et la star de la pop américaine chante le tube – qui est aussi le titre de son album et le nom de sa tournée internationale – Dangerous Woman. Les lumières se rallument, laissant apparaître de nombreux enfants et adolescents, ballons roses à la main. Les haut-parleurs diffusent de la musique et le public commence à évacuer la salle, d'une capacité de 21 000 places.

>> Attentat à Manchester : suivez notre direct

"Nous étions en train de sortir (...) lorsqu’on a entendu un 'bang', comme une explosion, qui a effrayé tout le monde", raconte Majid Khan, 22 ans, à l'agence britannique Press Association. Gary Walker est à quelques mètres de l'explosion, qui s'est vraisemblablement produite à l'extérieur de la salle de concert. Avec sa femme, ils attendent leurs deux filles qui assistent au show d'Ariana Grande. "On a entendu la dernière chanson et tout d'un coup, il y a eu un énorme flash, suivi d’une explosion et de fumée", témoigne le père de famille, auprès de la BBC (en anglais).

"J'ai ressenti une douleur à mon pied et à ma jambe", raconte encore Gary Walker. Au sol, il voit des "écrous métalliques", résidus de l'engin explosif déclenché par l'individu qui s'est fait exploser. Ce père de famille se retourne vers sa femme, elle lui dit qu'elle a besoin de s'allonger. "Elle est blessée à l'estomac et elle a peut-être une jambe cassée", témoigne-t-il. "J’ai un trou dans mon pied où j’ai quelques éclats de shrapnel", explique Gary Walker.

"L'explosion m'a fait voler dans les airs"

Lorsque l'explosion retentit, Elena Semino attend également sa fille de 17 ans, près du guichet où sont vendus les billets, accompagnée de son mari. "Je n'arrive pas à décrire ce moment", s'excuse-t-elle dans The Guardian (en anglais).

J'ai senti une chaleur dans mon cou et quand j'ai relevé la tête, il y avait des corps partout.

Elena Semino

dans "The Guardian"

"Le souffle de l'explosion m'a fait voler dans les airs sur dix mètres", raconte Andy Holey, à la BBC. Lui aussi est venu chercher sa femme et sa fille. "Quand je me suis relevé, j'ai vu des corps au sol. Mon premier réflexe a été de rentrer dans la salle pour trouver ma famille."

A l'intérieur de la Manchester Arena, après le "bang", les cris, la panique et le chaos règnent. "Tout le monde hurlait et courait, il y avait des manteaux et des téléphones sur le sol, les gens ont tout abandonné", se souvient Robert Tempkin, 22 ans. Il décrit à la BBC le mouvement de panique et la confusion du public dans la salle : "Des gens hurlaient qu'ils avaient vu du sang, mais d'autres disaient que c'étaient des ballons qui avaient explosé ou une enceinte qui avait claqué." Les haut-parleurs diffusent alors un message demandant au public de rester calme et de "prendre [son] temps" pour évacuer la salle : "Vous n'avez pas besoin de courir."  

Des parents angoissés

Pour beaucoup, il faut fuir rapidement et coûte que coûte. "J'ai attrapé ma fille et on a juste couru", explique Rachel, à la BBC. Mais très vite, le public paniqué fait face à des issues de la salle de concert engorgées. "Des gens étaient écrasés au sol." "Tout le monde paniquait, ça poussait dans les escaliers", raconte aussi Isabel Hodgkin à la chaîne de télévision Sky News. "Le couloir était plein de monde, il y avait une odeur de brûlé, il y avait beaucoup de fumée pendant qu'on sortait."

La seule chose dont je me souviens, c'est que tout le monde était en train de courir. Les gens étaient couverts de sang, d'autres personnes se battaient, c'était effrayant.

Un spectateur

dans "The Independent"

A l'extérieur, les policiers et les services de secours prennent en charge la soixantaine de blessés, avant qu'ils ne soient dirigés vers huit hôpitaux locaux. Certains spectateurs ressortent les vêtements déchirés. "Quand nous avons fini par trouver les portes principales [de la Manchester Arena], il y avait des gens qui pleuraient partout", ajoute Sebastian Diaz, à la BBC. De nombreux parents anxieux regardent frénétiquement leurs smartphones dans l'attente de nouvelles de leurs enfants.

Un élan de solidarité se crée

Juste à côté de la salle de concert, la gare Victoria est prise d'assaut par les spectateurs pressés de s'enfuir. Certains hurlent. Mais rapidement, le trafic est interrompu. Alors un élan de solidarité, similaire à celui qui s'était mis en place à Paris le 13 novembre 2015, émerge sur les réseaux sociaux. Le hashtag #RoomForManchester est utilisé pour trouver un hébergement aux personnes qui cherchent un endroit où passer la nuit. Taxis et VTC proposent leurs services gratuitement. Et l'hôtel Holiday Inn ouvre ses portes, notamment à une cinquantaine d'enfants séparés de leurs parents dans la panique de la fuite. D'autres établissements hébergent aussi des spectateurs, offrant des boissons et leur permettant de recharger leurs téléphones afin de rassurer leurs proches. 

Pour de nombreux parents, une nuit d'attente et d'angoisse commence. Sur Twitter, ils cherchent des nouvelles de leurs enfants sur le hashtag #MissingInManchester, avec des messages souvent accompagnés de photos. "Quelqu'un doit l'avoir vue", se désespère Charlotte Campbell devant la caméra de la BBC (en anglais). Elle brandit la photo de sa fille, Olivia, 15 ans, dont elle est toujours sans nouvelles, mardi. A la mi-journée, les identités des 22 personnes tuées dans cet attentat-suicide revendiqué par l'Etat islamique sont dévoilées petit à petit. Parmi elles, Saffie Rose Roussos, 8 ans, et Georgina Callander, 18 ans. Ressortie indemne avec sa fille, Stephanie Hill témoigne, effondrée, auprès de l'AFP : "Il y avait beaucoup d'enfants et d'adolescents. C'est une tragédie."

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.