Italie : cinq choses à savoir sur le Mouvement 5 étoiles, arrivé en tête des élections législatives
Le mouvement antisystème a réalisé une percée historique, avec un score dépassant les 30%, lors des élections législatives en Italie. Franceinfo liste cinq choses à savoir sur le M5S.
Moins de dix ans après sa création, le Mouvement 5 étoiles (M5S) est en passe de devenir la première formation politique d'Italie. Le mouvement antisystème obtiendrait plus de 32% des voix aux élections législatives, selon des résultats provisoires publiés lundi 5 mars. C'est une victoire sans précédent pour le M5S, même si ce score n'est pas suffisant pour que la formation gouverne seule.
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Le Mouvement 5 étoiles se risquera-t-il à une alliance ? Une large coalition de droite prendra-t-elle le pouvoir ? Ou, plus probable, ce statu quo sera-t-il maintenu le temps d'organiser de nouvelles élections ? En attendant de savoir lequel de ces scénarios se concrétise, franceinfo liste cinq choses à savoir sur le M5S.
C'est un mouvement antisystème
Le Mouvement 5 étoiles refuse le nom de "parti" et se définit comme opposé au Parlement, aux partis et aux médias. Lors de sa création en 2009, la formation antisystème et antiélites voulait ainsi faire table rase des politiciens, en les renvoyant "tous chez eux", rapporte Le Figaro. Résultat, elle refuse toujours aujourd'hui de faire alliance avec d'autres partis lors des élections.
Le M5S repose en outre sur la démocratie participative. Les adhérents peuvent exprimer leur opinion sur un site web. Cette plateforme doit permettre aux partisans d'orienter le programme du M5S, en votant pour ou contre différentes mesures, et même de choisir les candidats qui les représenteront lors des différents scrutins.
Son programme est en évolution
Le M5S est un véritable ovni politique, dont le programme emprunte des thèmes aussi bien à l'extrême gauche qu'à l'extrême droite. "Au début, il a utilisé une rhétorique de gauche, contre la corruption, sur l’écologie, éclaire Rinaldo Vignati, chercheur à l’Istituto Cattaneo de Bologne, interrogé par Ouest-France. Mais sur d’autres thèmes, comme l’immigration, la fiscalité, l’euro, la rhétorique s’inspire de la culture de droite."
Huit ans plus tard, de nombreux éléments du programme du M5S restent inchangés. La formation défend toujours la création d'un revenu universel, la lutte contre l'austérité budgétaire et l'immigration massive, une politique écologique forte pour parvenir à "l'Italie 100% renouvelable" ou encore la "valorisation et la protection du Made In Italy", précise Le Journal du Dimanche.
Le Mouvement 5 étoiles s'est en revanche radouci sur la question européenne. Les nombreuses attaques contre Bruxelles ont laissé place à un discours plus modéré. Le référendum sur la sortie de l'euro, un des leitmotivs de la formation, est tombé aux oubliettes. "L'Union européenne, c'est la maison naturelle de notre pays, mais aussi du Mouvement 5 étoiles, assurait ainsi Luigi Di Maio en février, selon Le Figaro. L'Union européenne, c'est le giron naturel dans lequel l'Italie doit continuer à développer ses relations économiques et politiques." Selon le quotidien, ce changement de discours entre dans la stratégie de "normalisation" entamée par le parti pour s'assurer un succès plus large aux élections législatives.
Il s'est trouvé un leader plus crédible
Autre signe du virage pris par le M5S : le changement de dirigeant. Le mouvement a été fondé en 2009 par le truculent comédien Beppe Grillo. Le comique organisait depuis 2007 des manifestations massives contre la classe politique, intitulées "Journées va te faire foutre". A l'époque, Beppe Grillo avait su séduire de nombreux Italiens, notamment les jeunes, grâce à son blog (le plus lu d'Italie) et son franc-parler.
Il a désormais laissé sa place à un leader beaucoup plus policé, Luigi Di Maio, élu député en 2013 sous l'étiquette du M5S. A 31 ans, il est à l'origine de la "normalisation" et du discours plus mesuré de la formation politique. Selon le JDD, il tente même de charmer à l'étranger, "en tenant des discours dans des universités renommées ou en rencontrant des ambassadeurs européens pour les rassurer".
Avec un objectif en ligne de mire : gouverner l'Italie. "Nous serons la première force politique, mais surtout, les autres partis n'arriveront pas à se mettre ensemble, assurait Luigi Di Maio au Monde, en février dernier. Et ils devront en passer par nous pour former un gouvernement."
Il a déjà remporté des élections
Le M5S n'a jusqu'ici jamais réussi à remporter une région ou à dominer le Parlement. Le mouvement a toutefois déjà connu plusieurs succès électoraux. Lors des précédentes législatives, en 2013, 109 députés et 54 sénateurs ont été élus sous l'étiquette du Mouvement 5 étoiles. Ils n'étaient toutefois plus que 88 députés et 35 sénateurs en 2018 : plusieurs ont quitté la formation ou en ont été exclus après divers scandales de détournement de fonds.
Le M5S a surtout remporté d'importantes victoires lors des élections municipales, prenant la tête de quelques grandes villes comme Turin, Parme et Livourne. La formation antisystème a également remporté le scrutin à Rome, première ville du pays, en 2016. L'avocate Virginia Raggi est alors devenue la première femme maire de la capitale italienne, à l'âge de 37 ans.
Il a été éclaboussé par des scandales
Le Mouvement 5 étoiles reproche fréquemment aux élus et partis italiens d'être "tous pourris", faisant de la moralisation de la vie politique l'un de ses objectifs. Pourtant, ses membres ont, eux aussi, été éclaboussés par différents scandales. Le mouvement impose à ses parlementaires de reverser la moitié de leurs salaires et primes d'élus à un fonds de solidarité, qui permet de financer des micro-crédits aux PME, rapporte Le Figaro. Plusieurs d'entre eux ont toutefois modifié leurs notes de frais sur Photoshop ou "annulé leur ordre de versement après en avoir transmis la photocopie" au M5S, afin d'empocher cet argent. Luigi Di Maio a évincé ces parlementaires, dont huit avaient commis des fraudes supérieures à 800 000 euros, selon Le Figaro.
Virginia Raggi est, elle aussi, engluée dans plusieurs affaires. Le parquet de Rome a demandé, en octobre 2017, son renvoi devant la justice. L'édile est accusée de faux dans une affaire d'embauche, après qu'elle a assuré avoir choisi elle-même le directeur du tourisme de la mairie. Renato Marra avait en fait été engagé par son frère, ancien bras-droit de Virginia Raggi.
La maire de Rome était également mise en examen pour corruption, après la découverte de plusieurs assurances-vie souscrites en sa faveur par l'un de ses anciens proches collaborateurs. Le parquet a finalement classé sans suite ce dossier, estimant que Virginia Raggi n'avait pas commis de délit. Mais l'affaire a contribué à dégrader l'image du Mouvement 5 étoiles.
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