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"La fermeture de la route des Balkans va pousser les réfugiés à prendre des chemins encore plus dangereux"

Après le probable naufrage de 500 migrants en Méditerranée, francetv info a interrogé l'un des responsables de Médecins sans frontières.

Article rédigé par franceinfo - Recueilli par Pierre Lecornu
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 3min
  (ITALIAN NAVY / ITALIAN NAVY)

Quelque 500 migrants sont probablement morts en Méditerranée dans le naufrage de leur embarcation. C'est en tout cas qu'estime le Haut commissariat aux réfugiés (HCR), qui se base sur les témoignages d'une quarantaine de rescapés secourus entre les côtes de la Libye et celles de l'Italie, samedi 16 avril. Après ce nouveau drame, francetv info a interrogé Stefano Argenziano, coordinateur des opérations sur les migrations pour Médecins sans frontières (MSF).

Francetv info : Y a-t-il une augmentation du flux migratoire en Méditerranée depuis la fermeture de la route des Balkans ?

Stefano Argenziano : La fermeture de la route des Balkans va avoir des conséquences, ça on en est certain. Fermer les frontières n’empêchera pas le flot de réfugiés de continuer vers d’autres chemins. Et ces chemins sont de plus en plus dangereux, de plus en plus risqués.

On voit déjà très clairement une augmentation du flux en Méditerranée centrale par rapport à l’année passée. Mais on ne peut pas associer directement cette augmentation à la fermeture de la route des Balkans, car ce sont pour l’instant des populations différentes qui tentent la traversée. Il est encore trop tôt pour déclarer de manière certaine que la Méditerranée centrale est la nouvelle route de fuite des réfugiés syriens.

Que redoutez-vous pour les mois à venir ?

Le nombre de morts, la souffrance et la perte de vie humaine sont directement proportionnels au degré de fermeture des frontières. Nous sommes très pessimistes sur la façon dont l’UE est en train de gérer la situation. L’année 2015 a donné une légitimité à des initiatives comme la fermeture des frontières. Les Etats membres semblent remettre en cause des acquis importants pour l’humanité et l’assistance humanitaire.

Nous redoutons que cette attitude perdure en 2016. Le risque, c'est d'avoir de plus en plus de morts en mer, ou de personnes prises au piège en Libye, où la situation est extrêmement difficile.

Médecins sans frontières est prêt à intervenir et à jouer son rôle pour venir en aide aux populations en détresse en Méditerranée, mais ce sont des actions qui devraient être assurées par les Etats concernés.

Que réclamez-vous ? La réouverture des frontières ?

MSF n’a jamais demandé l’ouverture des frontières. Ce que nous demandons, c'est l’établissement d’alternatives sûres et légales. On demande que les Etats membres assument leur rôle vis-à-vis de leurs voisins.

La fermeture de la route des Balkans va pousser les réfugiés à prendre des chemins encore plus dangereux, mais cette route elle-même n'était ni sûre ni légale. C'était un théâtre de souffrances pour des milliers de personnes. Celles qui ont traversé la route des Balkans et qui ont eu accès à une protection ont d’abord dû mettre leur vie en danger. Ce n’est pas un exemple.

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