Mini-sommet européen sur les migrations : "Il y a une sorte de fuite en avant"
Les dirigeants de seize pays européens se retrouvent dimanche pour tenter d'apaiser les tensions dans l'Union européenne face au défi migratoire. Pour le chercheur François Gemenne, "les gouvernements ne savent plus que faire".
"Il y a un décalage évident entre la crise politique que l'on vit [...] et la réalité des migrations" estime François Gemenne, chercheur à l'université de Liège et à Science Po Paris. Le spécialiste des flux migratoires était invité de franceinfo dimanche 24 juin, à l'occasion de la réunion préparatoire au conseil européen de jeudi et vendredi. Les dirigeants de seize pays européens se retrouvent alors que le bateau humanitaire Lifeline est toujours bloqué dans les eaux internationales de la Méditerranée, son accostage refusé par l'Italie et Malte.
franceinfo : La réunion s'annonce-t-elle comme un échec ?
François Gemenne : Bien entendu. Le mini-sommet a été convoqué par Jean-Claude Juncker pour essayer de sauver Angela Merkel, en grande difficulté en Allemagne du fait de sa mise sous pression par le parti bavarois CSU, qui lui intime de trouver une solution. De plus, plusieurs pays, notamment d'Europe centrale et de l'Est, membre du groupe de Visegrad, ont annoncé qu'ils ne viendront pas. Il y a une sorte de fuite en avant. Plus personne ne sait que faire face à cette question, face à une crise montée en épingle, qui menace le projet européen lui-même.
L'Europe est en pleine crise alors que les arrivées de migrants baissent année après année. N'est-on pas dans une sorte de paradoxe ?
Il y a un décalage évident aujourd'hui entre la crise politique que l'on vit, la rhétorique pratiquée par les gouvernements et la réalité des migrations. La demande d'asile en Europe est en baisse de 44% entre 2016 et 2017 et les arrivées ont été divisées par trois entre 2017 et 2018. Il n'y a donc plus du tout de crise migratoire aujourd'hui en Europe. Nous sommes revenus aux chiffres de 2012 et 2013. En revanche, il y a une vraie crise politique parce qu'il y a des gouvernements populistes, un peu partout en Europe, qui ont intérêt à faire de cette question une crise. Ils savent qu'ils vont en retirer un profit électoral. C'est donc un jeu politicien sordide sur le dos de migrants en détresse.
Que penser de la solution proposée par la France et l'Espagne, visant à créer des centres fermés sur le sol européen dès le débarquement ?
C'est une nouvelle fuite en avant. Les gouvernements ne savent plus que faire. Il y a deux jours, on envisageait des plateformes de débarquement hors de l'Union européenne, en Tunisie ou en Albanie. Ces pays ont fait savoir qu'il n'en était pas question et on cherche donc désormais une autre solution. On est malheureusement toujours dans cette solution du repli et de la fermeture des frontières, où on va enfermer des gens simplement parce qu'ils auront tenté de traverser la Méditerranée.
Selon vous, fermer les frontières ne sert absolument à rien. Vous estimez qu'il faudrait les ouvrir parce que ça ne provoquerait pas un flux migratoire énorme. Vous avez bâti cette théorie sur des études qui datent d'il y a quelques années. Cette situation géopolitique s'applique-t-elle encore aujourd'hui ?
Absolument. On constate que la fermeture des frontières n'a aucun effet sur les flux migratoires. Les gouvernements restent pénétrés de cette idée que c'est le degré d'ouverture ou de fermeture des frontières qui va déterminer les flux migratoires. En réalité, ce n'est pas le cas. On le voit bien avec la politique de Matteo Salvini : ce n'est pas en fermant la frontière italienne que les gens vont arrêter de venir. Idem aux États-Unis avec Donald Trump. Mon option n'a cependant aucun droit de cité dans le débat public parce que les gens sont convaincus que l'ouverture des frontières amènerait le chaos. En réalité, c'est une manière beaucoup plus pragmatique et rationnelle de gérer les grands défis migratoires du XXIe siècle.
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