: Témoignage "Nos réserves s'épuisent très vite" : un "Fantôme de Kiev" alerte sur les limites de la défense aérienne de l'Ukraine
En février, au début de l'offensive russe, un escadron de pilotes réussit à arrêter les troupes ennemies aux portes de la capitale ukrainienne. L'un d'eux, "Juice", se confie à franceinfo et en appelle à l'aide de la communauté internationale.
On a d'abord cru à un héros providentiel venu défendre Kiev. Quand, en février, la Russie lance son offensive en Ukraine, des pilotes à bord d'avions de chasse ukrainiens viennent empêcher les troupes ennemies de pénétrer dans la capitale. Face au succès de l'opération, l'escadron se fait surnommer le "Fantôme de Kiev".
franceinfo a pu échanger avec l'un de ces pilotes. Il se fait appeler "Juice", car il ne boit pas d'alcool. Pour des raisons de sécurité, il ne peut dévoiler ni son nom, ni celui de son unité. Confronté aux limites de la défense aérienne de l'Ukraine, le pilote en appelle à la communauté internationale pour leur livrer de nouveaux systèmes antiaériens et des avions de chasse plus modernes pour mieux protéger les villes.
franceinfo : Pourquoi votre escadron porte-t-il le surnom de "Fantôme de Kiev" ?
"Juice" : Parce que nous protégeons la capitale, ainsi que le centre et le nord de l'Ukraine. Ce nom est apparu par hasard sur les réseaux sociaux. Au début de la guerre, un habitant de Kiev a vu un avion survoler la ville. Il est apparu à travers les nuages et a disparu très vite, donnant l'impression d’un ange gardien. Ainsi est née cette légende du fantôme de Kiev. Mais, en réalité, c'est toute une unité dont les avions décollaient les uns après les autres pour intercepter des missiles, des avions et des hélicoptères russes.
Quelle a été votre dernière mission ?
C’était une mission assez standard, il y a une semaine. Notre tâche consiste à intercepter des missiles de croisière russes lancés en direction du nord. Malheureusement, ça ne dépend pas uniquement du pilote.
"La possibilité de détecter et de détruire des missiles russes est assez faible... Avec nos armes et nos avions, c'est presque impossible."
"Juice", pilote ukrainienà franceinfo
Pourquoi ? Quelle est la différence entre les avions russes et ukrainiens ?
La différence est énorme. C'est ce qu'on ne cesse de répéter. Les Russes ont un avantage technique dans l'air et dans la confrontation, avec des radars embarqués beaucoup plus perfectionnés et des missiles à longue portée avec des têtes chercheuses. Du coup, on les voit même pas sur nos radars alors qu'ils nous tirent déjà dessus. Ils ont aussi des systèmes de défense et de navigation plus avancés. Nous, on vole sur des avions soviétiques avec des munitions qui datent de cette époque.
Avez-vous assez d’avions ?
Bien sûr que non ! Surtout, il ne s’agit pas de quantité mais de qualité. Nous avons réussi à retaper certains de nos anciens avions grâce à nos partenaires qui nous ont fourni des pièces détachées. Mais, avec ces avions, on ne peut accomplir que des missions de base. Nous n'arrivons pas à être très efficaces avec nos capacités techniques pour défendre nos villes, nos infrastructures vitales, soutenir efficacement notre infanterie au front et pour détruire l’infrastructure ennemie...
"Avec l’intensité des combats, nos réserves s’épuisent très vite. Un jour, nous n'en aurons plus. C’est pourquoi il faut passer très vite aux standards occidentaux en matière d’armement."
"Juice", pilote ukrainienà franceinfo
Quels sont vos besoins ?
Pour l’armée de l’air, la priorité est la défense aérienne, c'est-à-dire tout ce qui peut être plus efficace pour contrer les missiles russes. Aussi, nous avons besoin de nouveaux avions de chasse multirôles qui pourront contribuer à la défense de nos villes et infliger des lourdes pertes aux positions ennemies et à leurs infrastructures.
Quelle est la mission dont vous êtes le plus fier ?
Au tout début, quand l’ennemi était au nord, dans les régions de Kiev, Tchernihiv et Soumy, nous avons accompagné des bombardiers ukrainiens qui attaquaient des convois et des positions russes. Je soutenais les opérations de notre armée au sol. J’attirais l’attention des avions de l’ennemi pour que nos bombardiers puissent accomplir leur mission et rentrer sains et saufs. Grâce à mon action, la mission a été une réussite.
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