Guerre en Ukraine : comment l'UE compte poursuivre sa politique de sanctions contre la Russie
Les sanctions contre Moscou doivent se renforcer dans les jours à venir. L'Union européenne entend mettre fin aux importations de charbon russe, limiter encore davantage les importations et les exportations et geler les avoirs des oligarques.
La pression économique contre la Russie s'intensifie. L'Union européenne et le G7 prévoient d'adopter un cinquième paquet de sanctions après l'onde de choc provoquée par la découverte de scènes de massacres à Boutcha, dans la banlieue de Kiev. "Nous devons à nouveau augmenter la pression sur Poutine et le gouvernement russe", a déclaré la présidente de l'exécutif européen, Ursula von der Leyen, sur Twitter mercredi 6 avril.
We must increase pressure on Putin and the Russian government again.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) April 6, 2022
So we propose to tighten our sanctions even further.
They limit the Kremlin´s political and economic options.
They affect Russia much harder than us.
And they will not be our last sanctions. pic.twitter.com/2ihQiz0Yqx
"Nous proposons donc de durcir encore nos sanctions, a déclaré la présidente de la Commission européenne sur Twitter. Elles limitent les options politiques et économiques du Kremlin. Elles affectent la Russie beaucoup plus durement que nous. Et ce ne seront pas nos dernières sanctions."
Les expulsions de diplomates russes s'accélèrent dans différents pays européens depuis lundi, avec plus de 200 renvois cumulés en 48 heures. Et les représentants des Vingt-Sept discutent, mercredi, des nouvelles sanctions à adopter à l'unanimité, avant une réunion des ministres européens des Affaires étrangères, lundi prochain, pour valider ces sanctions. Franceinfo fait le point sur les cartes dont dispose l'UE pour accentuer sa pression contre Vladimir Poutine.
Un embargo sur les importations de charbon
La Commission européenne propose "d'interdire toutes les importations de charbon en provenance de Russie, d'une valeur de 4 milliards d'euros par an", a précisé Ursula von der Leyen. Le charbon russe représente 45% des importations de l'UE, selon la Commission.
Cette sanction aurait moins de conséquences sur le marché énergétique des Vingt-Sept que des embargos sur le pétrole (qui représente 25% des achats européens), ou sur le gaz (45% des importations de l'UE), selon l'institut Bruegel, un groupe de réflexion européen spécialisé en économie. Le charbon russe est en effet plus facilement remplaçable par d'autres sources d'approvisionnement, contrairement aux deux autres énergies russes.
La présidente de la Commission européenne a précisé que l'UE envisageait aussi des sanctions supplémentaires,"notamment sur les importations de pétrole". Une sanction que n'écarte pas Emmanuel Macron. Le président français a confirmé, mardi, qu'il était "favorable à une interdiction d'importation de pétrole et de charbon", selon l'Elysée. La France fait partie, avec l'Italie, des pays de l'UE pour lesquels ce blocus serait le plus indolore, car elle est peu dépendante des importations russes. Moins d'un tiers du charbon consommé en France est acheté à Moscou, à peine 20% du gaz et seulement 13% du pétrole, selon le ministère de la transition écologique.
L'hypothèse avancée d'un embargo européen sur les importations de charbon russe a déjà dopé les prix. La tonne de charbon, sans atteindre son record historique du 7 mars (465dollars), a passé à nouveau la barre des 300 dollars, mercredi.
La fermeture des ports européens aux navires russes
A l'image du Royaume-Uni qui a déjà mis en place cette interdiction, l'UE souhaite interdire aux bateaux contrôlés par des entités ou des ressortissants russes l'accès aux ports européens. Néanmoins, cette interdiction ne concerne pas les navires "couvrant des produits essentiels, notamment agricoles et alimentaires, l'aide humanitaire ainsi que le secteur de l'énergie".
"L'UE va devoir surmonter de sérieux défis, car il va falloir identifier tous les navires russes, ce qui pourrait être difficile en raison de la complexité des structures de propriété des sociétés qui les affrètent, les contrôlent ou les exploitent", a averti Niels Rasmussen, un expert maritime suédois, à l'AFP. "En outre, les navires battant pavillon russe changent de pavillon à un rythme record afin d'éviter les sanctions", a-t-il ajouté.
Côté terrestre, la Commission propose d'interdire les opérateurs de transport routier russes et biélorusses sur les routes européennes, dans le but de "limiter considérablement les possibilités pour l'industrie russe de se procurer des composants essentiels".
De nouvelles limitations des échanges commerciaux
Concernant le commerce, Bruxelles entend limiter l'exportation de produits stratégiques vers la Russie. Cette restriction concerne des équipements et des composants industriels comme les semi-conducteurs avancés ou les ordinateurs quantiques.
L'exécutif européen veut également élargir la liste des produits russes interdits d'importation dans l'UE. Objectif : "stopper le flux d'argent de la Russie et de ses oligarques", et ce pour une valeur estimée de 5,5 milliards d'euros par an. L'exécutif européen propose également d'empêcher les entreprises russes de participer aux marchés publics à l'intérieur de l'Union européenne.
Le gel de nouveaux avoirs de personnalités russes
La liste noire des personnalités russes et biélorusses dont les avoirs dans l'UE sont saisis peut être élargie à des "dizaines de personnes", actives notamment "dans la politique, les milieux d'affaires et la propagande", selon le chef de la diplomatie de l'UE, Josep Borrell. Ce gel des avoirs garantit que l'argent visé ne peut être utilisé pour soutenir le régime russe.
Actuellement, 877 personnes et 62 entités ont vu leurs avoirs gelés et sont interdites d'entrée sur le territoire de l'UE ou de transiter par celui-ci, que ce soit par voie terrestre, aérienne ou maritime. En France, le ministre des Finances, Bruno Le Maire, avait déjà annoncé le 20 mars le gel de 850 millions d'euros d'avoirs financiers et de biens appartenant à des oligarques russes sur le territoire français.
L'interdiction des transactions de nouvelles banques
Côté financier, les Vingt-sept envisagent d'interdire totalement les transactions avec quatre grandes banques russes représentant un quart du secteur bancaire du pays. Parmi elles, VTB, le deuxième établissement de Russie.
L'UE a déjà privé sept banques russes d'accès au système financier international Swift et a interdit toutes les transactions avec la Banque centrale de la Fédération de Russie. Celle-ci n'a plus accès aux actifs qu'elle a stockés dans les banques centrales et les institutions privées européennes. Le Conseil européen estime que "plus de la moitié des réserves russes sont déjà gelées". Enfin, l'Union européenne et le G7, en coordination avec les Etats-Unis, envisagent d'interdire "tout nouvel investissement" en Russie, selon une source proche du dossier.
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