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Crise en Ukraine : les pays baltes ont-il raison de s'inquiéter?

Selon le "JDD", la France veut rassurer les pays de cette région, inquiets face à la démonstration de force de Moscou en Ukraine, en envoyant des Rafale dans les pays baltes. 

Article rédigé par franceinfo
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Un avion Rafale français atterrissant sur le porte-avions "Charles-de-Gaulle" dans le golfe d'Oman, le 31 janvier 2014. (PATRICK BAZ / AFP)

Jean-Yves Le Drian se rend, vendredi 21 mars, à Vilnius, en Lituanie, pour rassurer les dirigeants d'une région qui s'inquiète du déploiement militaire russe en Ukraine. Selon le Journal du Dimanche, le ministre français de la Défense vient proposer aux pays baltes, et à la Pologne, de déployer trois avions Rafale pour participer à une mission de surveillance aérienne dans la zone baltique. Il serait également question de missionner un avion radar français de type AWACS.

Par ailleurs, des F-16 américains ont été déployés en Pologne. Le vice-président Joe Biden a effectué une tournée à Varsovie et dans les trois Etats baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie), tous membres de l'UE et de l'Otan. L'objectif de ces initiatives : ne pas laisser penser l'Estonie, la Lituanie, la Lettonie et la Pologne que Moscou agit en tout impunité vis-à-vis de l'Union européenne et des Etats-Unis. Pourquoi ces pays s'inquiètent-ils de l'attitude de Moscou ? 

Ils craignent d'être les prochains sur la liste 

Les pays baltes et la Pologne sont-ils menacés par le projet d'union eurasiatique, dont rêve Vladimir Poutine ? "Il suffit de regarder une carte pour s’en rendre compte !", a lancé le ministre estonien des Affaires étrangères, Urmas Paet, interrogé le 5 mars par Le Monde (article payant)"Toute la communauté internationale, toute l’Europe doit être préoccupée [par la situation en Ukraine]. C’est un problème grave. Il s’agit d’envahir un pays voisin !" 

Avec le rattachement de la Crimée, effectif depuis mardi 11, la présidente lituanienne Dalia Grybauskaité a estimé dès le lendemain que le comportement de la Russie constituait "une menace directe pour la sécurité régionale" dans les pays baltes et que toutes les mesures nécessaires devaient être prises pour parer ces menaces.

D'autant plus que le dirigeant russe n'a jamais caché que, selon lui, la dislocation de l'URSS avait été "le plus grand désastre politique du siècle dernier".  Alors, pour Xavier Follebouckt, de l'université catholique de Louvain (UCL), "nous ne sommes pas au bout de la crise".

Comme l'Ukraine, ils ont une communauté russophone

En Lettonie, 27% de la population est russophone, rappelle Arte.tv. En Estonie, elle s'élève à 25% de la population, contre 5% en Lituanie. Avec l'indépendance de ces Etats en 1990, cette minorité a été tenue à l'écart, victime notamment de l'exclusion de leur langue dans les administrations, explique PressEurop.com.

Après l'intégration de ces pays à l'UE en 2004, la question du statut des minorités russophones dans ces pays est restée "une source de préoccupation pour les autorités russes", explique une note du Sénat.

L'enclave de Kaliningrad les préoccupe

Cette même note rappelle que la Lituanie, même libérée des troupes russes au début des années 90, continue de se méfier de Moscou. Et pour cause, "les troupes russes ont continué de transiter par la Lituanie, cette route étant la plus courte entre Kaliningrad et le reste de la Fédération", indique le document. Si des accords douaniers ont été signés, cette région russe, coincée entre la Pologne, la Lituanie et la mer Baltique, demeure une source d'inquiétude.  

Surtout depuis décembre 2013 : à cette date, le porte-parole du ministère de la Défense russe, Igor Konachenkov, a annoncé que "les systèmes de missiles opérationnels et tactiques Iskander [avaient] en effet été déployés dans la région militaire de l'ouest [qui comprend notamment Kaliningrad]". Selon le quotidien allemand Bild, ils ont été installés le long de la frontière russe avec les pays baltes.

Le Kremlin avait averti en 2011 que la Russie pourrait installer dans la région de Kaliningrad des batteries de missiles Iskander, afin de répondre aux "menaces" représentées par le projet de "bouclier antimissile" de l'Otan en Europe. L'Alliance atlantique à laquelle appartiennent la Pologne et les pays baltes. Ils se sont d'ailleurs tournés vers elle pour réclamer de l'aide. 

Ils sont dépendants du gaz russe

Les pays baltes dépendent entièrement du gaz russe. Quant à la Pologne, elle figure, avec l'Allemagne et l'Autriche, parmi les pays les plus gourmands en gaz russe. Ainsi, les initiatives de ses pays de l'Union européenne pour s'extirper de cette dépendance sont vues d'un très mauvais œil par Moscou. A tel point que la Lituanie a déposé en janvier 2011 une plainte à Bruxelles contre Gazprom, qu'elle accusait de position dominante. 

"Les raisons vraisemblables de cette politique discriminatoire appliquée à la Lituanie sont sans doute à chercher en partie du côté de la célérité avec laquelle Vilnius a décidé de mettre en œuvre la directive européenne sur le découplage en matière de gaz et d’électricité, réforme communautaire assez directement destinée à contrer les intérêts de la Russie en Europe", expliquait en 2012 la revue Regard sur l'Est.

Ils estiment que les sanctions européennes ne sont pas assez dissuasives

Les pays baltes et la Pologne s'inquiètent par ailleurs de la faiblesse des sanctions imposées à la Russie. C'est même l'objet du Conseil européen qui se déroule dans le même temps à Bruxelles. La veille, la France avait reporté au mois d'octobre sa décision de livrer ou non deux navires de guerre Mistral commandés par l'armée russe.

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