: Vidéo Auschwitz : les derniers survivants témoignent de l'enfer des camps d'extermination
Déportés en 1944, Sarah Montard et Jacques Altmann ils sont parvenus à survire jusqu'à la libération.
Sarah Montard avait 16 ans et Jacques Altmann à peine 20 quand ils furent déportés à Auschwitz-Birkenau (Pologne), durant la seconde guerre mondiale. Soixante-dix ans après la libération du camp de la mort, leurs souvenirs sont intacts. Ils les ont confiés à France 2 :
Leur arrivée : "on entre par la porte, on ressort par la cheminée"
Jacques Altmann : Il franchit les portes d'Auschwitz le 10 février 1944, par le convoi numéro 68. Alors en bonne santé, il est épargné par les gardiens et sélectionné pour travailler dans le camp. S'il bénéficie d'un sursis, il sait immédiatement que pour les femmes et les enfants, c'est la mort qui les attend. "On leur disait qu'elles allaient au camp de famille, mais le camp de familles, c'était les fours crématoires."
Sarah Montard : La vérité, Sarah et sa mère Maria l'apprennent, elles aussi, dès leur arrivée par des Polonaises qui font office de gardiennes du camp. "Elles nous ont dit : 'ici de toute façon, on entre par la porte, mais on sort par la cheminée. Elles ont dit 'maintenant vous n'avez plus de nom, vous êtes un numéro'", qui leur a été tatoué sur le bras.
Leur quotidien : survivre malgré la faim et la terreur
Jacques Altmann : Il est affecté au tri des bagages : sortir les valises des trains, mais aussi sortir les corps de ceux qui sont morts durant le trajet. Il doit également se taire, ne rien dire chambres à gaz qui attendent les enfants, les vieillards et les plus faibles. "Je me suis dit des fois : 'tu es là, au lieu de leur dire où ils vont, tu ne dis rien', mais je ne pouvais rien faire. Mais dans ma tête, je me traitais de complice."
Alors que l'espérance de vie n'est que de deux mois, avec une soupe et 200 grammes de pain par jour. Au tri des bagages, Jacques a pu survire neuf mois, en fouillant dans les valises. "Il y avait de quoi manger et on se bourrait l'estomac. C'est grâce à cela que l'on a survécu."
Sarah Montard : Si la culpabilité ronge Jacques, Sarah est quant à elle terrifiée par les gardiens. "Ils avaient droit de vie et de mort sur nous. C'était des coups sans arrêt. Je n'avais pas peur de la mort elle-même, mais j'avais peur des gens." Pour garder le moral, elle fredonne, avec ses camarades de baraquement, une chanson de Piaff, Le disque usé, avec ce refrain :
"Tant qu'y a d'la vie, y a d'l'espoir. Vos désirs, vos rêves / seront exaucés un soir / avant que votre vie s'achève / le bonheur viendra vous voir.
Il faut l'attendre sans trêve / chassez les papillons noirs / tant qu'y a d'la vie, y a d'l'espoir."
Cette chanson "nous a fait vraiment tenir", confie Sarah, encore émue en l'entonnant.
La libération : "J'étais un mort-vivant"
Jacques Altmann : Comme des milliers d'autres, il est jeté sur les routes en janvier 1945, à l'approche des troupes soviétiques. Il parcourt 90 kilomètres à pied en six jours dans des conditions terribles. C'est la marche de la mort avant l'arrivée à Buchenwald. "Il y avait un grand crématoire", se souvient Jacques. "Mais à côté, il y avait une montagne de morts. Et nous on s'est caché dedans." Il restera deux jours parmi les cadavres avant l'arrivée des Américains. Il ne pesait alors que 29 kilos.
Sarah Montard : Sarah et sa mère ont marché jusqu'à un autre camp : Bergen-Belsen. Elles sont malades du typhus, dénutries, mais elles sont ensemble. "Sans ma mère, je serai morte, mais sans moi aussi, ma mère serait morte aussi. On a tenu l'une pour l'autre"
L'après-guerre : cauchemars et thérapie
Jacques Altmann : Il ne s'est marié que des années plus tard. Auschwitz le hantait, au point d'en faire souffrir sa femme. Au milieu de la nuit, il se réveillait violemment, persuadé qu'elle allait lui voler son pain. "Une nuit, je l'ai attrapé, serré et elle a commencé à crier 'mais tu es fou'. J'ai voulu plusieurs fois la tuer. Alors j'ai été obligé d'aller voir un psychiatre." Mais aujourd'hui, les cauchemars se sont éloignés, et Jacques se dit heureux, "en voyant mes enfants et mes petits enfants".
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