Etats-Unis : la Cour suprême restreint les moyens de l’Etat fédéral dans la lutte contre le réchauffement climatique
Six jours après avoir enterré un arrêt qui garantissait le droit des Américaines à avorter, cette décision controversée constitue un nouveau tour de vis conservateur de la part de la juridiction.
Cette décision pourrait avoir un lourd impact sur le réchauffement climatique. La plus haute juridiction des Etats-Unis a décidé, jeudi 30 juin, de limiter les moyens de l'Etat fédéral de lutter contre les gaz à effet de serre.
Ses six juges conservateurs se sont accordés, contre l'avis de leurs trois collègues progressistes, pour limiter les prérogatives de l'Agence pour la protection de l'environnement (EPA), une agence fédérale indépendante du gouvernement qui met en place des standards environnementaux à l'échelle nationale en fonction de la loi. La majorité des juges ont estimé que l'EPA ne pouvait pas édicter de règles générales pour réguler les émissions des centrales à charbon, qui produisent près de 20% de l'électricité aux Etats-Unis.
"Il n'est pas plausible que le Congrès ait donné à l'EPA l'autorité d'adopter une telle mesure", écrit le juge John Roberts dans l'arrêt. Or, d'après ce même juge, "une décision d'une telle ampleur et conséquence appartient au Congrès lui-même, ou a une agence qui agit après avoir reçu une délégation claire" de la part du pouvoir législatif. La conséquence de cette décision, c'est que "chaque fois qu'une agence fait quelque chose d'important et de nouveau, la régulation est présumée invalide, à moins que le Congrès l'ait spécifiquement autorisé à réguler ce domaine", comme le résume la radio publique américaine NPR (article en anglais).
De quoi laisser aux différents Etats du pays le droit d'édicter leurs propres règles en la matière et, s'ils le veulent, de continuer d'exploiter les centrales à charbon, voire même de les développer. Et ce alors que John Roberts reconnaît également que "mettre une limite aux émissions de dioxyde de carbone à un niveau qui imposerait de renoncer au niveau national au charbon pour produire l'électricité pourrait être une solution pertinente à la crise d'aujourd'hui."
L'Agence de protection de l'environnement dans le viseur de la Cour
"Aujourd'hui, la Cour a retiré à l'Agence de protection de l'environnement le pouvoir que le Congrès lui a donné de répondre au 'problème le plus pressant de notre époque'", dénonce dans un argumentaire distinct la magistrate Elena Kagan au nom des progressistes, en rappelant que les six années les plus chaudes ont été enregistrées au cours de la dernière décennie. Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a dénoncé "un recul dans notre lutte contre le changement climatique, alors que nous sommes déjà très en retard dans la réalisation des objectifs de l'accord de Paris".
La Maison Blanche a dénoncé "une nouvelle décision dévastatrice de la Cour qui vise à ramener notre pays en arrière", selon son porte-parole. Le président américain Joe Biden "n'hésitera pas à utiliser les pouvoirs que lui confèrent la loi pour protéger la santé publique et s'attaquer à la crise du changement climatique", a ajouté le responsable dans une courte déclaration transmise à la presse. Le président américain avait rétabli des dispositions environnementales supprimées par son prédécesseurs Donald Trump, mais avait vu certaines de ses mesures écologiques les plus ambitieuses bloquées par le Congrès.
Cette décision controversée constitue un nouveau tour de vis conservateur de la part de la Cour suprême. Vendredi, la plus haute juridiction américaine avait enterré un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter. Dans la foulée, plusieurs États américains avaient annoncé prendre des mesures pour interdire les interruptions volontaires de grossesse sur leur territoire. Cette décision avait provoqué une émotion mondiale chez les défenseurs des droits des femmes.
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