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Parlement envahi, drapeau colonial... Pourquoi la tension est brusquement remontée d'un cran à Hong Kong

Des groupes de manifestants opposés au projet de loi autorisant les extraditions vers la Chine ont fait irruption lundi dans le Conseil législatif (LegCo), le Parlement de la mégapole.

Article rédigé par franceinfo
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Des opposants au gouvernement hongkongais sous un nuage de gaz lacrymogène, mardi 2 juillet 2019 au matin non loin du Parlement de la mégalopole. (ANTHONY WALLACE / AFP)

Des murs maculés de graffitis et un drapeau de l'époque coloniale britannique déployé en plein hémicycle. La colère des contestataires a pris un tour inédit, lundi 1er juillet à Hong Kong, quand des groupes de manifestants opposés au projet de loi autorisant les extraditions vers la Chine ont fait irruption dans le Conseil législatif (LegCo), le Parlement de la mégapole.

Cette montée de tension spectaculaire intervient après une quinzaine de jours de calme relatif dans le territoire, alors même que le projet de loi décrié a été suspendu par la très contestée cheffe de l'exécutif, Carrie Lam. Comment expliquer ce regain de mobilisation ? Éléments de réponse.

Parce que la journée de lundi marquait un anniversaire symbolique

La date de la manifestation, qui a réuni 550 000 personnes dans les artères du centre-ville selon les organisateurs, n'a pas été choisie au hasard. Le 1er juillet marque la date anniversaire de la rétrocession par le Royaume-Uni de Hong Kong à la Chine, en 1997. Ce jour est férié dans ce territoire.

Cet anniversaire est l'occasion chaque année de manifestations pro-démocratie, avec entre autres revendications d'ouvrir le poste de chef de gouvernement à une élection directe. Comme l'explique Le Figaro (article abonnés), le chef de l'exécutif hongkongais est en effet désigné par un comité électoral de 1 200 membres censés représenter la population hongkongaise, "alors même que le suffrage universel faisait partie des promesses formulées dans l’accord de rétrocession". En outre, "sa composition garantit dans les faits que Pékin contrôle le processus" électoral, ajoutait Le Monde lors du dernier scrutin.

Le rassemblement de lundi, organisé par plusieurs partis politiques et le Front civil des droits de l'homme, qui fédère les ONG et associations pro-démocratie de l'archipel, était donc particulièrement attendu après les manifestations monstres de juin. Le trajet prévu était d'ailleurs identique à celui emprunté par les manifestants des dernières semaines, entre un parc du centre financier et le Conseil législatif.

L'exécutif a montré des signes de fébrilité. Par crainte que les opposants, qui s'étaient réunis dès 4 heures du matin, ne perturbent la traditionnelle cérémonie de lever des drapeaux chinois et hongkongais, les autorités "ont prétexté la pluie, et ce malgré un soleil radieux, pour cantonner les festivités à l’intérieur et trinquer à l’avenir du pays", raconte l'envoyée spéciale de Libération (article abonnés).

Parce que les revendications des manifestants se sont durcies

Les manifestants ne se satisfont pas de la simple suspension du projet de loi visant à autoriser les extraditions vers la Chine, annoncée le 15 juin par Carrie Lam, et réclament la suppression pure et simple de cette proposition, qui mettrait selon eux fin, de fait, au régime "un pays, deux systèmes" mis en place en 1997 et qui garantit la liberté d'expression et l'indépendance de la justice dans l'archipel jusqu'en 2047. Les opposants appelent par ailleurs depuis plusieurs semaines à la démission de la cheffe du gouvernement favorable à Pékin, à la fin des poursuites contre les protestataires arrêtés ces dernières semaines, ainsi qu'à la fin de la répression policière.

Les méthodes des forces de l'ordre sont en effet de plus en plus contestées par les manifestants. A deux reprises lors des dernières semaines, certains d'entre eux ont bloqué le quartier général de la police, pour protester notamment contre un recours à la force excessif. "La police a fait preuve de la plus grande tolérance à l'égard des manifestants qui se sont rassemblés devant le quartier général mais leur manière d'exprimer leurs revendications est devenue illégale, irrationnelle et déraisonnable", avaient réagi samedi 22 juin les forces de l'ordre.

Signe supplémentaire de la rupture entre l'exécutif et une partie des manifestants, une banderole sur laquelle était inscrit "Il n'y a pas d'émeutiers, seulement un gouvernement tyrannique !" a été déployée lundi dans l'hémicycle du Parlement hongkongais envahi par les protestataires. Devant cette bannière ont été déposés des portraits de différents ministres.

Des portraits de différents ministres hongkongais, dont la cheffe du gouvernement Carrie Lam (deuxième portrait sur la gauche), déployés par des manifestants dans l'hémicycle du parlement, lundi 1er juillet 2019. (ANTHONY WALLACE / AFP)

Parce que de récents suicides de manifestants ont marqué le mouvement

Le cortège de lundi a enfin été marqué par une ambiance empreinte d'émotion après les récents suicides de trois personnes liées au mouvement. "Leurs photos étaient partout lundi et les manifestants ont fait de ces trois personnes des martyrs, en ignorant les avertissements concernant la crainte d'une contagion de ce phénomène", rapporte CNN (article en anglais).

La mort de Lo, l'avant-veille du rassemblement du 1er juillet, a profondément marqué les opposants. Âgée de 21 ans, cette étudiante s'est jetée du 24e étage d'un immeuble du nord de l'archipel. Elle avait auparavant inscrit sur le mur de son bâtiment un message réclamant "le retrait total de la loi d’extradition, la libération des manifestants emprisonnés, la démission de la cheffe de l’exécutif, une enquête sur les exactions de la police". "J’échange ma vie pour combler les vœux de deux millions de personnes. S’il vous plaît, tenez bon", concluait son message, rapporté par le média local HKFP (article en anglais).

"Nous sommes en train de perdre la jeunesse", se désolait un jeune homme auprès de Libération (article abonnés) lors d'une veillée organisée dimanche soir. "On se sent tous totalement désespérés, nous perdons confiance dans la société et le gouvernement, ce qui ne devrait pas arriver dans une société moderne".

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