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Présidentielle au Brésil : on vous explique pourquoi le retour de Lula représente un espoir pour l'Amazonie

Article rédigé par franceinfo
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Luis Inacio Lula da Silva, lors d'un meeting sur le développement durable à Manaus (Brésil), le 31 août 2022.  (MICHAEL DANTAS / AFP)

Après quatre ans au pouvoir de Jair Bolsonaro, l'élection de Lula est vue comme "un bon signal" pour la planète. La figure de la gauche brésilienne entend par exemple mettre fin à "la politique de dévastation" de son prédécesseur.

"Le Brésil et la planète ont besoin d'une Amazonie en vie." Dès sa réélection à la tête du Brésil, dimanche 30 octobre, Luiz Inacio Lula da Silva a placé la question environnementale au centre des débats. Selon lui, le Brésil est "prêt à jouer à nouveau les premiers rôles dans la lutte contre le changement climatique". Une affirmation qui semble convaincre de nombreux chefs d'Etat ou ministres étrangers. Sa victoire en est une pour le "climat", a ainsi déclaré la cheffe de la diplomatie allemande, Annalena Baerbock, lundi 31 octobreUrsula Von der Leyen, la présidente de la Commission européenne, s'est dite désireuse de travailler avec lui sur les "défis urgents" du climat et du libre-échange.

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Le retour de Lula à la présidence du Brésil peut-il alors sauver l'Amazonie ? Il y a urgence. Dès le début du mandat de Jair Bolsonaro, en 2018, la déforestation a bondi pour atteindre aujourd'hui son plus haut niveau depuis 2008, selon la revue Nature (en anglais). En trois ans, de 2018 à 2021, plus de 34 000 km2 de forêt ont disparu, "une surface plus grande que la Belgique", souligne le site spécialisé Carbon Brief. Une étude de Nature en 2021 concluait même que la forêt était devenue une source de CO2, au lieu d'assurer son rôle de "puits de carbone" en l'absorbant. "La déforestation et la dégradation de la forêt réduisent les capacités de l'Amazonie à agir comme puits de carbone", écrivaient les auteurs. Parmi les causes de cette dégradation, les forêts brûlées pour faire place à l'élevage et à l'agriculture.

Il a promis de réduire la déforestation

Le changement climatique est également un facteur-clé : les températures pendant la saison sèche ont gagné près de 3°C par rapport à l'ère pré-industrielle, soit près de trois fois plus que la moyenne mondiale. La combinaison de tous ces facteurs "remet en cause la capacité des forêts tropicales à séquestrer à l'avenir de larges volumes de CO2 dérivé des énergies fossiles", note Scott Denning, de l'université du Colorado, cité dans la revue Nature.

"Il est impératif de défendre l'Amazonie de la politique de dévastation mise en place par le gouvernement actuel", promet le programme de Lula. Si la législation environnementale est respectée à la lettre pendant le mandat à venir, la déforestation pourrait être réduite d'environ 90% à la fin de la décennie, ont calculé les experts de Carbon Brief. La plateforme a évalué les conséquences de l'application du "Code de la forêt", un texte de 1965 qui impose aux propriétaires terriens de maintenir une certaine proportion de forêt sur leur parcelle et de restaurer les terres qui ont subi de la déforestation illégale, explique Carbon Brief.

Même si le respect total de ce texte semble difficile à atteindre, les experts sont optimistes en analysant le précédent bilan de Lula, de 2003 à 2011. "Le fait marquant des deux mandats de Lula est qu'en huit ans, il a réussi à réduire la déforestation de 80%"remarquait Plinio Sist, écologue et directeur de l'unité de recherche sur les forêts au Cirad, sur franceinfo. Un bilan dont se félicite également l'ancien président dans son programme. Et qu'il promet de reproduire.

Il pourrait relancer le Fonds amazonien

Le retour de Lula au pouvoir est donc "un très bon signal" pour la planète, opine l'économiste Catherine Aubertin, spécialiste des politiques environnementales, auprès de franceinfo"Bolsonaro a coupé les vivres à tous les organes d'Etat de l'environnement, déplore-t-elle. Que ce soit la police de l'environnement qui ne pouvait plus mettre d'amende ou l'Institut de conservation de la biodiversité qui n'avait plus son mot à dire." Catherine Aubertin espère donc que le nouveau gouvernement remettra en place des structures de concertation entre ministères, les Etats fédérés et la société civile et se félicite de l'annonce de la création d'un ministère des peuples autochtones.

Le Fonds amazonien, qui finance des projets pour préserver la forêt primaire, avait aussi été bloqué. "Ce blocage du président Bolsonaro a privé les défenseurs de l'Amazonie d'un milliard de dollars", rappelle l'économiste. Le retour au pouvoir de Lula semble néanmoins ouvrir la voie à un renouvellement de ce fonds. La Norvège, qui avait suspendu son aide pendant le mandat de l'ancien président, a annoncé être disposée à la verser à nouveau. Le pays scandinave est l'un des principaux contributeurs à ce fonds jugé essentiel par les experts, avec environ 1,2 milliard de dollars versés depuis sa création en 2008. 

Catherine Aubertin relativise toutefois les espoirs pour la protection de l'Amazonie, rappelant que l'écologie n'est pas la priorité du président Lula, focalisé sur "le combat contre la faim". Selon elle, au Brésil le symbole environnemental que représente l'Amazonie n'est pas aussi fort qu'à l'international. "C'est une région éloignée, c'est 10% du PIB. Moins de 10% de la population", précise-t-elle.

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