Libération de Sophie Pétronin : son fils "Sébastien est un héros français" qui "était seul à se battre dans le silence", loue Ingrid Betancourt
L'ancienne otage des FARC en Colombie salue le courage de Sébastien Chadaud-Pétronin. "Je crois que c'est un homme avec des valeurs et des principes extraordinaires".
Ingrid Betancourt, ancienne otage des FARC en Colombie, a salué ce vendredi sur franceinfo le courage de Sébastien Chadaud-Pétronin qui s’est battu pour retrouver sa mère, Sophie Pétronin, libérée après 4 ans aux mains de jihadistes au Mali. "Sébastien est un héros français", car "Il était seul à se battre dans le silence, dans l'abandon", a-t-elle rendu hommage.
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franceinfo : Pensez-vous que Sophie Pétronin réalise ce qui lui arrive ?
Ingrid Betancourt : Elle doit être dans le flou. Je sais, de mon expérience, que tous ces moments qui sont ces chocs de l'arrivée se perdent dans la mémoire. Moi, j'ai beaucoup de mal à retrouver des images du vécu dans mes souvenirs. Je pense que l'émotion est très, très forte. Je l'ai entendue parler. Elle m'a parue très, très maîtresse d’elle-même, très lucide, mais je suis sûre que l'émotion est là. L'émotion, elle est dedans. On gère évidemment les médias. Mais avec le temps, on se rend compte de l'impact émotionnel que cela a de différentes façons. Celui qui m'a beaucoup, beaucoup émue, évidemment, c'est Sébastien. Il était très contrôlé. Il s'était fait un devoir d'être dans la maîtrise de lui-même et cela m’a beaucoup émue de le voir et l’entendre dans ce cri de larmes devant sa maman.
Sébastien Chadaud-Pétronin a été quasiment un médiateur dans ce dossier avec un engagement permanent. Un rôle plutôt rare chez les familles des otages ?
Sébastien est un héros français. Je pèse bien mes mots. Je crois que c'est un homme avec des valeurs et des principes extraordinaires. Il a pris des risques pour retrouver sa mère. Il était seul à se battre dans le silence, dans l'abandon. Il a été mal compris par les autorités françaises à certains moments qui le trouvaient probablement gênant. Mais c'était aussi le cri d'un fils qui voyait que le temps passait. Et on avait l'impression que rien ne se passait. Il a été très, très courageux. Il a véritablement construit une route pour libérer sa mère.
Il a pris les contacts, il a parlé avec les gens avec lesquels il fallait parler. Il était aussi très prudent. On l'a souvent critiqué d'imprudence, mais je pense au contraire qu'il était lucide.
Ingrid Betancourt, femme politique et ancienne otageà franceinfo
Il était prudent et comprenait bien l'enjeu.
Est-ce que sa mère n'est pas libre parce qu’il a fait ce qu’on lui disait de ne pas faire ?
Je ne crois pas qu'il ait fait systématiquement ce qu’on lui a dit de ne pas faire. Je crois que c’était pour lui une contradiction et c'était véritablement quelque chose de très profond en lui de réfléchir comment naviguer dans l'obscurité. Il n'avait aucune information, personne ne le guidait, personne ne lui disait ce qu'il fallait faire ou ce qu’il ne fallait pas faire. Il avait des êtres humains, en face, qui lui tenaient une langue de bois. On lui donnait des tapes dans le dos sans véritablement s'engager pour lui. Je crois que c'était une situation très inconfortable et aussi pour beaucoup de personnes dans le gouvernement. Je crois qu'il essayait de faire de son mieux et de les comprendre. On comprend les impératifs du gouvernement qui sont souvent, même presque toujours, en opposition avec ceux des familles. On veut que tout soit fait pour la libération de la personne aimée. Pour les gouvernements, c’est plus compliqué. Il savait tout ça et il a essayé véritablement d'avoir une attitude mure, responsable, toujours, pour la libération de sa mère. C'est pour cela que j'ai dit que c’est un héros.
Vous connaissez Sébastien Chadaud-Pétronin. Qu’allez-vous dire à sa mère ?
Je veux d’abord l’embrasser.
Je trouve que c'est une femme d'une dignité et d’une élégance extraordinaire.
Ingrid Betancourtà franceinfo
J'ai écouté tous ses mots, son non-jugement sur ses ravisseurs. Il n'y a aucun pathos dans ses mots. Il n'y a pas de victimisation. Elle est une femme très, très forte, très digne, comme son fils. Ce sont deux êtres assez extraordinaires. J’ai vraiment envie de la connaître.
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