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A Djibouti, grâce à Omar Guelleh, la Chine est en son jardin

Ce 9 avril 2021 se déroule l'élection présidentielle à Djibouti. Le président Ismaël Omar Guelleh brigue un cinquième mandat. En vingt-deux ans de pouvoir, il a tissé des liens étroits avec la Chine.

Article rédigé par Jacques Deveaux
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le 4 juillet 2018 à Djibouti, sous le portrait du président Ismaël Omar Guelleh, la foule agite un drapeau chinois lors de la pose de la première pierre d'un complexe de 1 000 logements financé par la Chine. (YASUYOSHI CHIBA / AFP)

"Ismaël Omar Guelleh a reçu en héritage la présidence de Djibouti en 1999." Une formule reprise par France 24, qui en dit long sur la perception de la démocratie pour ce champion de la longévité politique. Mais force est de constater qu'Omar Guelleh a donné à son pays un poids politique, que l'indépendance en 1977 ne lui avait pas conféré.

Position stratégique

Situé entre la mer Rouge et le Golfe d'Aden, le pays a su tirer un avantage économique de sa position stratégique. Longtemps, Djibouti a été une chasse gardée de la France, ancienne puissance coloniale qui y entretenait une forte présence militaire. Mais Djibouti sous la présidence d'Omar Guelleh s'est ouvert à d'autres nations. Les Etats-Unis, le Japon, l'Italie s'y sont installés, garantissant au pays une rente annuelle estimée à 200 millions de dollars.

L'arrivée la plus spectaculaire et la plus commentée a été celle de l'armée chinoise, le 1er août 2017. Une base navale et un cantonnement militaire assurent à Pékin une présence permanente de 1 000 soldats et permettent d'en accueillir dix fois plus. Cette installation a jeté un froid dans les chancelleries occidentales, inquiètes des réelles intentions chinoises.

Financements de Pékin

Pour Djibouti, cela a scellé une alliance prédominante. Au-delà de la redevance de vingt millions de dollars annuels, Djibouti a attiré les capitaux et le commerce chinois. Pékin est devenu le premier fournisseur et investisseur du pays. "Les investissements annuels du dragon asiatique sur place équivalent au Produit intérieur brut djiboutien actuel", résume le site spécialisé Geostrategia.

La Chine a ainsi financé la construction de nouveaux terminaux portuaires. Elle a récupéré la gestion des ports après que Djibouti a remercié la société émirati DP World. Les capitaux chinois sont également présents dans le projet de la future cité d'affaires, estimé à 350 millions de dollars. Pékin a aussi financé et construit la nouvelle ligne de chemin de fer entre Addis-Abeba en Ethiopie et Djibouti.

Commerce et "soft power" chinois 

Ultime illustration de ce lien étroit, Djibouti a bénéficié des vaccins chinois pour lutter contre la pandémie du coronavirus. Un événement largement médiatisé qui permet d'alimenter à peu de frais le "soft power" chinois. "Ce don a été rendu possible également grâce aux relations d'amitié et de coopération solides existant entre Beijing et Djibouti", précise l'agence de presse officielle chinoise.

Arrivée à Djibouti des vaccins chinois contre le Covid-19, le 18 mars 2021. (XINHUANET.com)

Ainsi, d'année en année, Ismaël Omar Guelleh a transformé son pays en tête de pont du commerce chinois en Afrique et de sa nouvelle route de la soie. Le régime autoritaire imposé par le président djiboutien ne doit pas déplaire non plus à Pékin. Il assure une stabilité essentielle au commerce. Au point qu'on peut se demander si ce petit pays de moins d'un million d'habitants n'est pas devenu une forme moderne des comptoirs commerciaux des XIXe et XXe siècles. Quand pouvoir et richesses échappaient à la population au profit des empires coloniaux.

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