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Chasse : si on l'interdit le dimanche ou pendant les vacances, "dans cinq ans, la ruralité est à feu et à sang", s'insurge Willy Schraen

Le président de la Fédération nationale des Chasseurs veut relativiser le nombre des accidents de chasse, alors que selon les informations de franceinfo, le gouvernement n'envisage plus l'interdiction le dimanche. "Il y a 67 millions de Français qui se promènent dans la nature et là, on parle de huit accidents, donc on ne peut pas parler d'une catastrophe nationale."
Article rédigé par franceinfo
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Willy Schraen lors d'une assemblée générale de la Fédération nationale des Chasseurs, le 22 mars 2022. (STEPHANE DE SAKUTIN / POOL / AFP)

Si on interdit la chasse le dimanche ou pendant les vacances scolaires, ainsi que le demandent par certains parlementaires écologistes comme le député d'Indre-et-Loire Charles Fournier, "je ne vous donne pas cinq ans et vous avez la ruralité à feu et à sang", s'insurge vendredi 6 janvier sur franceinfo Willy Schraen, président de la Fédération nationale des Chasseurs.

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Lundi 9 janvier, le gouvernement doit dévoiler ses annonces pour la chasse, mais selon les informations de franceinfo l'interdiction de la chasse le dimanche ne figure plus dans les mesures envisagées par l'exécutif. Le gouvernement prépare une application pour smartphones pour aider les promeneurs à suivre en temps réel les chasses en cours et ainsi renforcer leur sécurité. Une mesure loin d'être saluée par Willy Schraen. Le président de la Fédération nationale des chasseurs juge "ridicule" de créer une application alors que "les promeneurs et vététistes (...) ont déjà des applications". Il se dit plutôt favorable à une "cartographie des territoires sans chasse", ce qui réglerait le problème des zones blanches.

franceinfo : Avez-vous confirmation que l’interdiction de la chasse le dimanche n’est plus dans le projet gouvernemental en cours d’élaboration ?

Willy Schraen : Pour l'instant, je suis comme vous, on ne sait pas exactement ce que va annoncer la ministre lundi [Bérengère Couillard, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires chargée de l'Ecologie]. Évidemment, nous sommes totalement contre un dimanche sans chasse ou une demi-journée sans chasse qui n'aurait aucune cohérence sur notre territoire où les propriétés privées représentent plus de 85% du territoire chassable. Ce qui pose problème, dans le fond, c’est les accidents avec les non-chasseurs.

L’année dernière, il y a eu huit accidents avec des non-chasseurs, dont malheureusement deux mortels. Ce sont huit de trop, j'en suis tout à fait conscient, mais il faut remettre les chiffres dans le contexte. Il y a 30 millions d’occurrences de chasse tous les ans, il y a 67 millions de Français qui se promènent dans la nature et là, on parle de huit accidents, donc on ne peut pas parler d'une catastrophe nationale.

"Maintenant, rassurez-vous, on a divisé par cinq les accidents et par quatre les accidents mortels, et ce, sans aucune aide de personne. Ce sont les chasseurs eux-mêmes qui se prennent en main depuis 20 ans et qui diminuent de façon drastique les accidents."

Willy Schraen, président de la Fédération nationale des Chasseurs

à franceinfo

Qu'on laisse les chasseurs continuer à travailler et en plus, il y a des tas de mesures [gouvernementales] que nous allons soutenir. Je suis tout à fait pour améliorer les choses, on ne fait que ça. Mais rappelons que 85 % de la forêt est privée en France. Ça veut dire que dans ce pays des droits de l'Homme qui a inventé le principe de la liberté individuelle, on va expliquer aux gens qu'ils ne peuvent pas chasser chez eux. Si on met des lois comme ça en place, je ne vous donne pas cinq ans et vous avez la ruralité à feu et à sang.

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Selon un rapport du Sénat, si le nombre d’accidents baisse, c’est aussi grâce à la loi, comme celle qui impose depuis 2019 un gilet fluorescent, celle qui édicte que toute faute à un examen de permis de chasse est éliminatoire depuis 2014...

Mais qui a demandé à mettre le gilet orange dans la loi ? Il était déjà dans tous les schémas départementaux des fédérations de chasseurs. C'est nous qui l'avons demandé, comme la formation décennale qui porte déjà ses fruits. C'est moi qui l'ai demandée, je n'ai pas attendu une loi ou un rapport du Sénat pour le demander.

Le gouvernement, dans son futur projet, envisage une application pour signaler les zones de chasse aux promeneurs. Qu’en pensez-vous ?

Il y a deux types de promeneurs. En France, on a des gens qui sont un peu des professionnels de la promenade comme les vététistes, les randonneurs, des gens qui se déplacent sur plusieurs kilomètres. Eux ont tous des applications pour ça. Créer quelque chose en parallèle serait ridicule, il suffit simplement de rajouter la chasse dans leur application. Par contre, on a beaucoup de gens qui, le dimanche, après avoir mangé, ont envie de faire un tour dans la nature pour digérer. Ces gens, qui à force d’écouter les médias ont peur, ils s'en foutent de savoir où ça chasse, ce qu'ils veulent, c'est savoir où ils peuvent se promener et où il n'y a pas de chasseur. Il faut plutôt faire une application où sont cartographiés les territoires sans chasse. Une cartographie, c’est différent d’une application, surtout quand la moitié du territoire rural n'est même pas couverte par internet.

Autre mesure envisagée par le gouvernement, le contrôle de l’alcoolémie des chasseurs. C’est une mesure que vous jugez acceptable ?

J’en suis ravi. D'abord, il y a très peu d'accidents qui sont liés à l'alcool, moins de 10%. C'est quatre fois moins que ce qui se passe au volant d'une voiture. Mais ça me va très bien. On va enfin sortir du sketch des Inconnus, où les gens pensent qu'on est tous des alcooliques et des barbares. Il n'y a aucun problème. Après, il faut mettre en phase avec des moyens. Je veux bien d'ailleurs qu'on laisse la possibilité aux fédérations de retrouver leur pouvoir de police de la chasse, y compris le contrôle [de l’alcoolémie], ce qui permettra à mon avis de faire un bon travail de fond.

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