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Attentats de janvier 2015 : une "revenante" raconte la nouvelle vie en Syrie d'Hayat Boumeddiene, l'ex-épouse du terroriste Amedy Coulibaly

D'après des documents consultés par l'équipe de l'émission "Complément d'enquête" sur France 2, une revenante de Syrie affirme avoir vu l'ex-épouse du terroriste Amedy Coulibaly dans un camp de réfugiés en Syrie, et donne des éléments sur sa nouvelle vie, cinq ans après l'attentat de l'Hyper Cacher.

Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
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Portraits d'Hayat Boumeddiene et d'Amedy Coulibaly, son ex-mari.  (POLICE FRANCAISE / AFP)

Elle est la seule femme parmi les quatorze accusés du procès des attentats de janvier 2015 qui s'est ouvert mercredi 2 septembre à Paris. Absente de ce procès hors norme, Hayat Boumeddiene n'a plus été aperçue en Europe depuis le 2 janvier 2015. Ce jour-là, elle s'envole de l'aéroport de Madrid, quelques jours avant les attentats de Montrouge (le 8 janvier) et de l'Hyper Cacher de Vincennes (le 9 janvier) perpétrés par son ex-mari, le terroriste Amedy Coulibaly. La jeune femme, soupçonnée de complicité dans ces attentats, serait pourtant en vie.

C'est un témoin clé de l'enquête, entendu dans le plus grand secret par la justice antiterroriste, qui a révélé cette information aux magistrats en mars dernier. Selon les procès-verbaux, consultés par l'équipe de "Complément d'enquête" (émission diffusée jeudi 3 septembre à 23h05 sur France 2), une revenante de Syrie, qui jure s'être repentie, dit avoir vu Hayat Boumeddiene dans un camp de prisonnières en Syrie, en octobre 2019.

Toujours convaincue par l'idéologie de Daech

Elle la reconnaît formellement sur photo. "De ce que je sais, elle était sortie des camps avant moi, elle aurait réussi grâce à des passeurs. Elle était en contact avec des gens de Daech pour qu'ils la fassent sortir." Avant d'être capturées, les deux femmes auraient vécu sous le même toit à Raqqa. Selon cette revenante, Hayat Boumeddiene a refait sa vie après son arrivée dans le califat, en 2015 : "Elle s'est remariée sur place avec un Tunisien. Ils n'ont pas eu d'enfants ensemble et lui est mort à Baghouz", affirme la témoin. La veuve n'aurait pas renoncé à ses convictions jihadistes : "Elle était encore à fond pour l'Etat islamique, raconte la revenante. Son projet était de rester sur zone et de retourner dans un autre califat car c'est ce qu'ils promettaient."

Après son passage au camp d'Al-Hol, Hayat Boumeddiene aurait réussi à rejoindre les derniers bastions de Daech : "Elle ne voulait pas rentrer en France, elle se cachait des autorités kurdes", relate la jihadiste repentie. "Elle m'avait dit qu'elle essayait de se faire payer son passage par des hommes de Daech. Un émir avait dit aux femmes sur Internet de préparer de bonnes chaussures de marche pour tenir deux jours car ils allaient venir." Un témoignage jugé crédible par les services de renseignement, à tel point que le parquet national antiterroriste a ouvert une enquête en avril dernier visant Hayat Boumeddiene pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste."

Donnée pour morte en 2019

Bien avant la chute du califat, en 2015, Hayat Boumeddiene avait donné des nouvelles enthousiastes de sa nouvelle vie en Syrie : "Je suis mieux qu'en France, si tu savais ce qu'il y a ici, wallah… Je suis dans une maison comme j'ai jamais vu de ma vie, ils s'occupent de moi comme si j'étais une princesse", avait-elle soutenu au téléphone à une amie, comme l'avait relayé France Télévisions. Dans une interview au magazine de propagande de l'Etat islamique, un mois après les attentats, elle évoquait son arrivée en Syrie comme un soulagement : "Salam aleikoum, louange à Allah qui m'a facilité la route, c'est une bonne chose de vivre sur une terre qui est régie par les lois d'Allah. Je ressens un soulagement d'avoir accompli cette obligation", affirmait-elle à l'époque.

En mars 2019, après la chute de la dernière grande poche de résistance des jihadistes face aux forces arabo-kurdes, à Baghouz, elle avait été donnée pour morte par Dorothée Maquère, l'épouse du jihadiste français Jean-Michel Clain, dans un entretien à des journalistes européens. "Elle a été tuée (…). On ne peut pas vous dire les conditions, les heures, tout s'est précipité ces derniers jours", affirmait-elle, sans que l'on sache s'il agissait d'un faux témoignage destiné à protéger une "sœur".

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