Attentat de Nice : non, Mohamed Lahouaiej Bouhlel n'a pas été capturé vivant, contrairement à ce que laisse croire un montage vidéo
Ces images, visionnées des milliers de fois sur internet, ont été largement reprises par des sites conspirationnistes.
Non, l'auteur de la tuerie de Nice n'a pas été évacué vivant par la police après son carnage sur la promenade des Anglais à Nice. C'est pourtant ce que laisse entendre une vidéo publiée le 15 juillet sur YouTube et intitulée "Le terroriste de Nice, Mohamed Lahouaiej Bouhlel a été capturé vivant". Visionnée des milliers de fois, elle a été supprimée de la plate-forme car elle ne "respectait pas les règles concernant le spam, les pratiques trompeuses et les escroqueries", explique Le Monde, qui décrypte ce montage. Francetv info vous démonte cette théorie.
Ce que montre la vidéo
Selon le titre, le spectateur est censé voir "le terroriste de Nice, Mohamed Lahouaiej Bouhlel (...) capturé vivant". Dans la description de la vidéo, on peut lire que "le terroriste lève la tête" puis "communique avec les policiers sans qu’il n’y ait de distance entre eux". Enfin, il est noté que "le terroriste coopère et s’enfuit avec les policiers après avoir été frappé".
Pour étayer cette théorie, et la valider, la vidéo montre le côté gauche du camion à l'arrêt sur la promenade des Anglais, jeudi 14 juillet, quelques minutes après sa course sanglante. Un homme habillé de gris longe la remorque et quitte le champ de la caméra.
On aperçoit ensuite, avec difficulté en raison du flou de l'image, des policiers qui s'approchent d'une personne à terre. Les gestes sont brusques, et les policiers gardent leur arme levée. Le son est trop mauvais pour comprendre ce qu'ils se disent. Puis, ils l'aident à la relever avant de l'évacuer. Pour celui qui a mis en ligne cette vidéo, il s'agit du tueur et ces images remettraient donc en cause la version officielle selon laquelle le chauffeur a été abattu.
Ce qu'elle ne montre pas
A deux reprises sur cette vidéo, on remarque qu'il s'agit d'une captation vidéo diffusée sur un écran d'ordinateur. L'image est coupée, saccadée, voire ralentie. On comprend qu'il s'agit d'un montage et non d'un extrait brut. Et c'est justement le morceau manquant qui permet de comprendre ce qui se passe. Le Monde explique que, dans la version originale (et donc sans montage), "on y voit des policiers braquer leur arme en direction de l’habitacle du camion, et on entend des détonations. Ce n’est qu’ensuite qu’on voit le passant et l’homme entouré par les policiers à l’écran". L'homme à terre n'est donc pas le terroriste, mais une victime. Et cette version correspond à celle retranscrite par le procureur de la République, François Molins.
C'est aussi ce qu'a raconté à l'AFP l'un des policiers participant à l'intervention. "Je n'ai pas tout de suite compris ce qu'il se passait", reconnaît le gardien de la paix. "Ça courait dans tous les sens." Un homme est alors monté sur le cale-pied côté conducteur du camion, les policiers ne savent alors pas s'il tente d'attraper le conducteur ou de le frapper. Deux autres policiers le maîtrisent ; il s'agit en fait d'un passant qui tentait de stopper le tueur.
Une autre vidéo, filmée de l'autre côté du camion, et mise en ligne par Russia Today, confirme, elle aussi, ce scénario. On voit et on entend les tirs des policiers. Et, à l'avant, on devine dans la cabine un corps affalé dont la tête penche sur le côté. Il s'agit de celle de Mohamed Lahouaiej Bouhlel, mort.
Ce que nous apprennent les précédents
Si les gestes sont brusques envers le blessé au sol, c'est sans doute que les policiers sont, à ce moment de l'intervention, sous très haute tension. Il faut se souvenir de l'image de Lassana Bathily, le héros de l'Hyper Cacher, sorti sans ménagement des lieux et menotté par les forces d'intervention en janvier 2015, qui l'ont sans doute pris, l'espace d'un instant, pour le preneur d'otages ou un complice.
Ce n'est pas la première fois que des images de vidéastes amateurs sont détournées pour alimenter les rumeurs les plus folles. On se souvient notamment de la sortie des otages de l'Hyper Cacher utilisées pour affirmer que des complices d'Amedy Coulibaly s'étaient enfuis... Il ne s'agissait en fait que d'otages, courant dans tous les sens après leur libération.
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