Soupçons de fichage de "gilets jaunes" par l'AP-HP : "C'est illégal", dénonce l'avocat d'un manifestant blessé
"On va essayer de retrouver les personnes fichées et multiplier les plaintes pour obtenir des réponses", a affirmé sur franceinfo l'avocat d'un "gilet jaune".
"Aucun de mes clients n'a été soumis à un consentement s'agissant de ce fichier, c'est complètement illégal", s'est indigné maître Arié Alimi, membre de la Ligue des droits de l'Homme, mercredi 24 avril sur franceinfo. Cet avocat réagissait à l'annonce de l'AP-HP : l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris a reconnu avoir déclenché le fichier SI-VIC pour recenser les "gilets jaunes" blessés, expliquant qu'il s'agissait d'une "utilisation inappropriée" de la case commentaires de ce fichier, tout en se défendant d'avoir voulu ficher les manifestants. Le client d'Arié Alimi, Sébastien Maillet, un "gilet jaune" grièvement blessé à la main lors d'une manifestation, a annoncé vouloir porter plainte contre X pour possible fichage illicite.
franceinfo : Que pensez-vous de la réponse de l'AP-HP ?
Arié Alimi : J'en ai assez des mensonges à répétition, dont le dernier, celui du ministère de l'Intérieur qui prétend ne pas avoir accès au fichier SI-VIC alors que c'est écrit noir sur blanc, par décret, que ce SI-VIC est consultable par le ministère de l'Intérieur par l'interface SINUS. On sait maintenant qu'il y a un fichier constitué sur des 'gilets jaunes' blessés, que le ministère de l'Intérieur peut s'en servir éventuellement pour poursuivre les blessés. Je demande donc la suppression immédiate et intégrale de ce fichier SI-VIC qui a été constitué.
Selon vous, ces informations ont-elles été transmises au ministère de l'Intérieur ?
Elles sont automatiquement transmises via une interface que le ministère de l'Intérieur peut consulter. Le fait même qu'il peut l'utiliser, c'est dramatique. Je rappelle que ce fichier SI-VIC a été créé à la base pour des victimes d'attentats terroristes, pour permettre aux familles d'être prévenues et de ne pas être dans l'anxiété. Ensuite, il a été étendu, en 2018, à toutes les situations et circonstances sanitaires exceptionnelles. Mais pourquoi l'a-t-on utilisé pour des blessés 'gilets jaunes' ? C'est ce principe même qui est dérangeant. Et puis, bien évidemment, il y a toutes les utilisations illégales, les données pathologiques rentrées dans les commentaires mais également et surtout, aucun de mes clients n'a été soumis à un consentement s'agissant de ce fichier, c'est complètement illégal.
Que craignez-vous ? Quel risque voyez-vous ?
On craint qu'on puisse avoir des informations sur ces victimes et qu'on se retourne contre elles, qu'on les convoque au commissariat pour d'autres infractions dans le but de les poursuivre. La deuxième crainte, parce que ce sont des opposants politiques, c'est de savoir quelle va être l'utilisation de ce fichier à l'avenir par ce gouvernement ou par une alternance politique. Et puis, au-delà de l'inquiétude, c'est illégal. On va donc essayer de retrouver les personnes fichées et multiplier les plaintes pour obtenir des réponses. Ensuite on attend que le procureur de Paris ouvre une enquête. Ce sont des infractions pénales dont on parle.
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