: Vidéo "C'est l'état de choc complet" : arrestation par le FBI, détention dans une prison de haute sécurité… un ex-cadre victime collatérale de la vente d'Alstom raconte sa descente aux enfers dans "Affaires sensibles"
Arrêté par le FBI à peine arrivé sur le sol américain, menotté comme un criminel, incarcéré pendant des mois dans une prison de haute sécurité... Dans "Affaires sensibles", un ex-cadre d'Alstom fait le récit d'une descente aux enfers. Frédéric Pierucci est la victime collatérale d'un célèbre épisode de la guerre économique que se livrent la France et les Etats-Unis : la vente d'Alstom Energie à General Electric. Le 25 octobre 2021, le magazine coproduit par France Télévisions, France Inter et l’INA d'après l'émission originale de France Inter raconte les dessous de cette rocambolesque affaire.
L'affaire Alstom, qui a éclaté comme une bombe un jour d'avril 2014 avec une dépêche de l'agence Bloomberg annonçant le projet de rachat de la branche Energie d'Alstom par General Electric, commence en réalité un an plus tôt, à l'aéroport John-F.-Kennedy de New York. Le 25 octobre 2021, le magazine "Affaires sensibles" raconte un thriller sur fond d'espionnage industriel et de corruption. Avec, notamment, le témoignage détaillé de Frédéric Pierucci, victime collatérale de cette vente controversée.
Dans cet extrait, nous sommes le dimanche 14 avril 2013. Le vol de la Cathay Pacific en provenance de Singapour vient de se poser. Une hôtesse annonce que l'un des passagers, Frédéric Pierruci, est attendu sur la passerelle. Ce haut cadre d'Alstom, habitué à se rendre aux Etats-Unis pour son travail, rejoint la porte de débarquement sans méfiance aucune.
"La porte s'est ouverte, et j'avais un comité d'accueil : cinq personnes du FBI qui m'attendaient, et qui m'ont signifié que j'étais en état d'arrestation. Je ne comprends pas du tout pourquoi je suis arrêté, donc c'est l'état de choc complet."
Frédéric Pierucci, ex-cadre d'Alstomdans "Affaires sensibles"
Sans un mot d'explication, il est conduit jusqu'à une tour de Manhattan, au siège du FBI. Au 23e étage, dans une salle d'interrogatoire, le cadre se retrouve menotté au mur comme un criminel. Un procureur du ministère de la Justice américain lui annonce qu'il a enfreint la loi anticorruption en vigueur aux Etats-Unis. Ce procureur enquête sur des pratiques de corruption auxquelles Alstom et Frédéric Pierucci se seraient livrés pour décrocher des contrats. Le Français tombe des nues : il n'avait aucune idée du risque qu'il prenait en venant aux Etats-Unis. Mais le procureur lui propose bien vite un marché. S'il l'accepte, il pourra ressortir libre.
"Là, le procureur me propose de jouer la taupe à l'intérieur de l'entreprise. Ça veut dire que vous allez tous les jours au travail, avec un micro sous votre veste, et que vous enregistrez vos collègues, et notamment le PDG du groupe."
Le PDG du groupe, qui est alors Patrick Kron, serait donc lui aussi dans le viseur de la justice américaine... Mais Frédéric Pierucci veut rester loyal envers son entreprise, et il refuse le marché. Autorisé à passer un coup de téléphone, il appelle le directeur juridique d'Alstom. "Ne t'inquiète pas, tu vas passer simplement cette nuit en prison, lui aurait promis celui-ci. Demain, je vais t'envoyer un avocat, tu seras libéré sous caution, et on réglera le problème une fois que tu seras rentré à la maison."
"Ce n'est pas du tout ce qui s'est passé", poursuit Frédéric Pierucci. Envoyé à la prison de haute sécurité de Wyatt, dans l'Etat de Rhode Island, il va y rester des mois, côtoyant trafiquants et criminels endurcis. Violence, solitude et promiscuité font partie de son quotidien, il vit dans la peur des rixes et des règlements de comptes.
"Très rapidement, ils m'ont mis dans un dortoir. C'était un dortoir de 54 personnes, avec lumière 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, avec des conditions d'hygiène un peu compliquées : 4 toilettes sans porte, sans mur, etc."
A l'époque, les autorités françaises ne sont pas informées de cette arrestation. ''Qui est Pierucci ? Pourquoi est-il arrêté ? C'est passé totalement sous les radars", se souvient Arnaud Montebourg, alors ministre de l'Economie, du Redressement productif et du Numérique (lors de son interview pour "Affaires sensibles", il n'avait pas encore annoncé sa candidature à l'élection présidentielle de 2022).
Extrait de "Affaire Alstom : la guerre secrète", une enquête de Sylvain Pak et Gaël Hubert à voir le 21 octobre 2021 dans "Affaires sensibles", magazine présenté par Fabrice Drouelle et coproduit par France Télévisions, France Inter et l’INA d'après l'émission originale de France Inter.
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