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"Je ne peux pas tomber plus bas", témoigne un lanceur d'alerte à l'heure de l’ouverture du salon "Des livres et l'alerte"

Malgré le renforcement de la loi, la dénonciation d'un scandale peut bouleverser et même détruire la vie d'un lanceur d'alerte, comme le racontent des participants au salon du livre qui leur est consacré à partir de vendredi à Paris. 

Article rédigé par Benjamin Mathieu, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Une manifestation en faveur de la protection des lanceurs d'alerte à Luxembourg le 26 avril 2016 (illustration)   . (JOHN THYS / AFP)

Le 4e salon "Des livres et l'alerte" ouvre vendredi 16 novembre à Paris. Jusqu'à  dimanche, à la Maison des Métallos, des lanceurs d'alerte vont débattre et présenter leurs ouvrages. Au côté de personnalités médiatisées qui ont dénoncé des scandales figurent des participants plus anonymes, dont les vies ont été bouleversées.

Risques et périls pour les lanceurs d'alerte - un reportage de Benjamin Mathieu

Edward Snowden, Julian Assange, Irène Frachon ou Denis Robert. Les combats de ces lanceurs d'alerte ont été médiatisés, et parfois adaptés au cinéma. D'autres n'ont pas connu la même exposition. Une fois passée la phase de l'information, certains se sont retrouvés en extrême précarité. "J'ai fait mon devoir de citoyen, et ma vie a été foirée à cause de ça", lance Karim Ben Ali, 37 ans. Ce chauffeur intérimaire de Moselle s'est filmé en 2017 en train de déverser de l'acide en pleine nature à la demande, dit-il, de son employeur, Arcelor Mittal. La vidéo fait le tour des réseaux sociaux. Il est finalement licencié. Depuis, il est impossible pour lui de retrouver du travail, malgré des recherches étendues, "même pour des boulots d'insertion"

M. Macron dit de traverser la rue pour trouver du boulot. Mais pour un lanceur d'alerte, c'est le grand désert. Des fois, j'ai des regrets.

Karim Ben Ali, lanceur d'alerte

à franceinfo

En revanche, aucun regret pour Mauricio Garcia Pereira, 49 ans, même si sa situation n'est guère différente. Le lanceur d'alerte de l'abattoir de Limoges a perdu son emploi après avoir dévoilé, il y a deux ans, la pratique de l'abattage des vaches gestantes. L'affaire à fait grand bruit, mais la suite a été extrêmement compliquée pour lui. "Oui, il y a eu un scandale. Mais moi, personnellement, j'ai tout perdu, explique-t-il. J'étais dans un appartement F3 superbe. Là, je suis dans un petit studio, un trou à rats. Je ne peux pas tomber plus bas." 

Une législation imparfaite

La loi Sapin 2 a bien créé en 2016 un statut juridique du lanceur d'alerte, censé le protéger, ce qui ne l'empêche pas de rester exposé à du harcèlement, à des pressions. Pour Daniel Ibanez, organisateur du salon "Des livres et l'alerte", il faudrait aller plus loin et cibler "celui qui entrave l'information d'intérêt général présentant un caractère de gravité". "Peut-être serait-il intéressant de réfléchir au fait que celui-ci soit lui-même, en cas de licenciement de la personne qui a publié cette alerte, condamné à reclasser la personne et à prendre en charge ce reclassement", préconise-t-il.

Une Maison des lanceurs d'alerte créée à l'initiative d’une vingtaine d’ONG vient d'être inaugurée à Paris, afin de mieux les protéger.

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