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Salon de l'agriculture : les doutes et les aspirations des agriculteurs avant la présidentielle

Le Salon de l’agriculture ouvre ses portes samedi porte de Versailles, à Paris. La profession attend beaucoup des candidats à la présidentielle. Pour comprendre les préoccupations des acteurs de terrain, franceinfo s’est rendue en Bretagne.

Article rédigé par Guillaume Gaven - Edité par Cécile Mimaut
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Loïc Guines, président de la FDSEA d'Ille-et-Vilaine, ci-contre dans son exploitation laitière. (GUILLAUME GAVEN / RADIO FRANCE)

Le Salon de l’agriculture ouvre ses portes samedi 25 février porte de Versailles, à Paris. Plus de 600 000 visiteurs y sont attendus jusqu’au 5 mars. Mais aussi des politiques. Année électorale oblige, tous les candidats à la présidentielle vont arpenter les allées du salon sous l’œil d’agriculteurs qu’on imagine un peu désabusés. Car des politiques, ils en ont vus tellement défiler sans que rien ne change vraiment. Pour comprendre leurs préoccupations sur le terrain, franceinfo s’est rendue en Bretagne, une terre agricole en crise où on continue malgré tout d'aller de l'avant, tout en ayant des messages à faire passer aux candidats.

Salon de l'agriculture : les doutes et les aspirations des agriculteurs avant la présidentielle

Un éco-système fragile

L’exploitation de Jean-Jacques René se situe dans la baie de Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor. Au total, 250 truies sont élevées ici, en plein cœur de la Bretagne porcine, frappée fortement par la crise il y a deux ans. "Ça va mieux mais c’est plus conjoncturel que structurel,  explique Jean-Jacques René. On a eu une opportunité avec la Chine, le marché s’est ouvert l’année dernière, mais sur le long terme on a toujours les mêmes interrogations. On n’a rien changé sur le fond et c’est toujours sensible. On a vécu l’an dernier l’embargo du marché russe suite à un problème politique… et on peut toujours être exposé à ce genre de situation". Jean-Jacques René déplore la fragilité du secteur et attend du futur président de la République des garanties sur le futur. Pas seulement pour lui mais pour son fils, à qui il est en train de transmettre l'exploitation.

Moi j’aimerais qu’un président de la République aujourd’hui ait un minimum de fermeté quant à l’Europe et quant aux marchés internationaux. On aimerait bien dormir tranquille

Jean-Jacques René, éleveur porcin

à franceinfo

"On comprend que le consommateur ait une garantie sur son produit. Par contre on a une administration qui est très gourmande et très friande en papiers", poursuit l’éleveur.

Des lourdeurs qui plombent la compétitivité

Les pesanteurs administratives et les contrôles de tous bords reviennent souvent dans le discours des agriculteurs rencontrés. Tous y sont confrontés, comme Patrick Hamon, à la tête d’un poulailler industriel de 133 000 poules élevées en cages à Saint-Martin des Prés, en Centre-Bretagne.

On est surdimensionné au niveau administratif

Patrick Hamon, éleveur de gallinacés

à franceinfo

"Trop de gens nous sortent des papiers. Je sais que la traçabilité est un atout… mais on l’a déjà avec le numérique ! Ils sont incapables de se numériser ?", tempête l’éleveur pour qui la paperasse n’est que la partie émergée de l’iceberg.  

Car là où le bât blesse surtout c’est sur les prix. "On manque de compétitivité aussi en France", constate-t-il. Alors pour tenter de se relancer, Patrick Hamon va se reconvertir dans l'élevage en plein air, poussé par les exigences des consommateurs et de la grande distribution. Il aurait bien attendu un peu car son poulailler industriel n'a que cinq ans et il n'a pas fini de le rembourser.

Une agriculture sous perfusion

La compétitivité. C’est un autre terme qui revient souvent dans la bouche des agriculteurs. Tous, à leur niveau, savent qu'ils évoluent dans un marché globalisé, que les cours du blé, du lait ou du porc sont mondiaux. Comment faire face à la concurrence ? L'agriculture française, on le sait, dépend largement des aides européennes et surtout de la PAC, la politique agricole commune. C'est ce qui a permis le maintien d'un tissu agricole. Mais à quel prix ? Celui d'une industrialisation du secteur, dénonce la Confédération paysanne. Jean Cabaret en a été un animateur virulent dans les années 90. Aujourd'hui proche de la retraite, il élève ses 40 vaches et ses 4 000 poulets, tous bio, du côté de Rostrenen, en plein Centre-Bretagne. Et malgré les années, il ne décolère toujours pas.

"En l’espace de 20 ans on a perdu un million de paysans. Ça a été un choix à un certain moment. On a industrialisé la production et fait croire que ça allait permettre de baisser le coût du panier alimentaire de la famille. Or, ce n’est pas ça", déplore-t-il.

On a substitué des éléments du revenu agricole, de prix, par des aides publiques qui coûtent très cher à la société

Jean Cabaret, de la Confédération paysanne

à franceinfo

Une profession essentielle au tissu économique

Mais l’agriculture ce sont aussi des emplois et bien plus qu'on ne croit. Loïc Guines est le président de la FDSEA d'Ille-et-Vilaine. Son exploitation laitière est installée à Saint-Marc-sur-Couesnon, l’une des 52 communes du Pays de Fougères, entre Rennes et le Mont-Saint-Michel. Il souvient encore d'une certaine réunion publique.

"Le président du Pays de Fougères, un jour à son assemblée générale, parlait des entreprises. À la fin de son intervention, il en avait oublié une et certainement la plus  importante du Pays de Fougères", raconte l’agriculteur. Et pourtant, "les exploitants agricoles représentent la plus grosse entreprise du Pays de Fougères", poursuit-il. C’est globalement "peut-être 2 000 ou 2 500 emplois. Il n’y a pas une entreprise de cette taille là sur le Pays", insiste Loïc Guines. Un manque de visibilité que les agriculteurs voudraient bien voir changer.

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