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La hausse des températures rendra-t-elle le vin meilleur ?

Le temps est le critère essentiel pour produire un vin de qualité. Mais la météo a aussi son importance : la pluie est particulièrement bienvenue avant la saison de croissance (d’octobre à mars), tandis que la chaleur et la sécheresse ont une influence positive pendant la saison de croissance (d’avril à septembre).

Article rédigé par franceinfo
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Les vendanges au domaine de Malavieille, dans l'Hérault, le 2 septembre 2017. (LODI FRANCK / SIPA)

Jean-Christian Tisserand, auteur de cet article, est professeur en économie à la Burgundy School of Business. La version originale de cet article a été publié sur le site de The Conversation dont franceinfo est partenaire.


Si les dérèglements climatiques apparaissent catastrophiques à de nombreux égards, il est un domaine où ses effets pourraient au contraire se révéler positifs : sous certaines conditions, la viticulture bénéficierait, selon les principales recherches sur les sujets, d’une amélioration de la qualité de ses vins.

Plusieurs éléments sont réputés avoir de l’influence sur la qualité d’un vin – "la météo", "l’année de production" et "l’âge" nous viennent souvent à l’esprit. Mais dans quelle mesure ces paramètres jouent-ils un rôle réellement déterminant ?

L’équation bordelaise

Parmi les nombreux chercheurs qui ont étudié la question, les travaux d’Orley Ashenfelter restent de loin les plus connus. Le chercheur américain a utilisé une base de données contenant les prix de vente de vins de Bordeaux, produits entre 1952 et 1980, pour établir une relation chiffrée entre la météo et l’âge d’un vin avec son prix de vente aux enchères.

Le modèle statistique utilisé, plus connu sous le nom de « l’équation bordelaise » dans le monde académique, montre que le temps est le critère essentiel pour produire un vin de grande qualité. Bien que la pluie soit particulièrement bienvenue avant la saison de croissance (d’octobre à mars), la chaleur et la sécheresse ont une influence positive sur le prix du vin pendant la saison de croissance (d’avril à septembre).

Tandis que la température moyenne au cours de la saison de croissance a varié de 15 °C à 17,7 °C à Bordeaux entre 1952 et 1980, on constate qu’une augmentation de 1 degré de la température moyenne au cours de la saison de croissance entraîne une augmentation des prix des grands crus de Bordeaux de 61,6 %. Il est également intéressant de noter que ce modèle statistique ne tient compte que de la météo et de l’âge du vin, et permet pourtant d’expliquer plus de 80 % de la variation des prix de la base de données !

Une hausse des températures opportune ?

Une équipe de chercheurs américains s’est appuyée sur des données de 1950 à 1999 du Global Historical Climatology Network pour étudier l’effet du changement climatique sur la qualité de 30 vins différents. Les résultats montrent en particulier que toutes les régions de l’étude ont connu un réchauffement, et plus particulièrement les régions viticoles américaines et européennes.

Parmi les 30 vins analysés, 25 présentent des tendances significatives d’amélioration de la qualité avec des variations importantes d’un pays ou d’une région à une autre – la qualité des vins est mesurée chaque année par une note attribuée par un ou plusieurs experts pouvant aller de 0 à 20 ou de 0 à 100. En effet, tous les pays ne semblent pas faire jeu égal devant le réchauffement climatique. Si la France et l’Australie semblent avoir été particulièrement avantagées par cette tendance à la croissance des températures, le Chili, l’Afrique du Sud et la Californie ont connu une amélioration de la qualité qui ne semble pas liée au changement climatique mais davantage aux avancées technologiques et à l’évolution des méthodes de production.

Les résultats montrent que certaines régions connaissent actuellement des températures très proches de leur optimum – calculées par les auteurs à l’aide d’un modèle économétrique supposant une relation quadratique entre la température et la qualité des vins – pourraient donc être affectées négativement si les températures continuent d’augmenter. L’évolution des températures produira donc probablement des gagnants et des perdants.

De nouveaux risques de maladies

Les régions à fortes chaleurs telles que le sud de la Californie ou le sud du Portugal, par exemple, pourraient dépasser leur seuil de température optimal et s’orienter vers une diminution de la qualité du vin produit. A contrario, les régions aux températures plus douces telles que la Bourgogne, la Champagne ou l’Alsace semblent toujours disposer d’une marge d’amélioration dans les années à venir.

Aussi, il est important de noter qu’au-delà de la qualité des vins produits, les conditions climatiques jouent également un rôle important dans le développement des maladies de la vigne. L’ensemble des producteurs doit donc être préparé à faire face à une probable évolution des maladies en raison du changement climatique. Certaines d’entre elles pourraient disparaître tandis que d’autres pourraient s’aggraver ou même émerger notamment par l’apparition de nouveaux micro-organismes.

Une équipe de chercheurs européens, dont les membres de la School of Wine & Spirits Business de Dijon font partie, s’intéressent actuellement de près à ce sujet et travaillent ensemble sur la création d’un outil automatisé visant à accompagner les producteurs dans la gestion des maladies de la vigne.The Conversation

Jean-Christian Tisserand, Professeur permanent en économie, Burgundy School of Business

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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