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L'économie sociale et solidaire, solution pour sortir de la crise ?

Benoît Hamon a présenté en Conseil des ministres son projet de loi sur l'économie sociale et solidaire. En dynamisant ce secteur, le ministre espère créer de l'emploi et, pourquoi pas, relancer l'économie.

Article rédigé par Clément Parrot
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Benoît Hamon, ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire, visite la Scop Aprobois à Carhaix (Finistère), le 8 avril 2013. (MAXPPP)

Concilier performance économique et utilité sociale, c'est le mot d'ordre de l’économie sociale et solidaire (ESS). Benoît Hamon, ministre délégué à l'Economie sociale et solidaire, a présenté, mercredi 24 juillet en Conseil des ministres, un projet de loi qui ambitionne de développer ce domaine. Les Français fréquentent l'ESS au quotidien, souvent sans le savoir. Mutuelles de santé, banques mutualistes, coopératives, commerces équitables sont quelques exemples d’un secteur qui compte environ 200 000 entreprises, emploie 10% des salariés du pays et représente 10% du PIB.

L'ESS, économie marginale ou secteur d'avenir ?

Avec cette nouvelle loi, le cabinet de Benoît Hamon évoque la création de 100 000 emplois nets. L'ESS serait-elle un outil efficace contre le chômage et une solution à la crise économique ? C’est la conviction de Claude Alphandéry, le président du Labo de l’ESS (think tank de promotion du secteur) interrogé par francetv info, qui se réjouit des avancées de la loi présentée par le ministre. Mais nombre d’économistes ne partagent pas son avis.

Claude Alphandéry a conscience que dans l’esprit de beaucoup, ce secteur reste "ponctuel, marginal et souvent réparateur", c'est-à-dire qu'il vient combler les absences de l'Etat-providence. Il tient à rappeler pour autant que "des milliers de projets se montent chaque année" dans des secteurs d'avenir tels que la transition énergétique ou l'économie numérique.

Tous les économistes ne partagent pas son enthousiasme. En janvier, Philippe Frémeaux a interrogé ses confrères sur leur vision de l’ESS avant de produire une note de synthèse sur la question. "Son poids très faible fait qu'elle a plutôt une dimension de témoignage", considère Dominique Plihon, professeur à l’université de Paris-XIII. D’autres, comme Christian Chavagneux, jugent "marginale" la contribution de l’ESS à la dynamique de la société.

L'ESS, un outil pour sortir de la crise ?

Pour Claude Alphandéry, l'ESS apparaît comme l'une des solutions pour sortir la France de la crise : "C'est une sorte de troisième voie entre l’austérité et la politique de relance", estime-t-il. La prévision du cabinet de Benoît Hamon de 100 000 emplois créés est d'ailleurs crédible pour le président du Labo de l'ESS : "De nombreux secteurs d’activités sont concernés et il existe en France une créativité, une intelligence collective qui devraient permettre de développer le secteur." 

Faux, estime l'économiste Philippe Askenazy : "Il est naïf de croire que la crise, et la croissance de la pauvreté qui l'accompagne, va donner plus de place aux organisations de l’ESS. Bien au contraire, je pense que cet appauvrissement touchera nécessairement aussi l'ESS", assène-t-il dans la note de synthèse de Philippe Frémeaux. Difficile pour l’ESS d’apparaître comme une solution à la crise si le secteur souffre en priorité de l’appauvrissement.

Claude Alphandéry conditionne d'ailleurs cette sortie de crise par un "important changement dans nos comportements et dans nos choix politiques".

Les Scop, un refuge ?

Le projet de loi de Benoît Hamon prévoit plusieurs avancées pour les Scop (sociétés coopératives et participatives) qui facilitent pour les employés la reprise de leur entreprise en cas de cession. Une bonne nouvelle pour Claude Alphandéry, qui considère les Scop comme "un vrai levier de croissance".

Le Figaro rappelait en mars que les Scop avaient en moyenne mieux supporté la crise, puisque 56% d'entre elles étaient encore debout cinq ans après leur création, contre 52% pour les autres entreprises. Pour autant, le quotidien classé à droite refusait d'y voir une "recette miracle", expliquant que ces structures étaient soumises "aux mêmes aléas que les autres" (concurrence, niveau de commandes...).

Claude Alphandéry lui-même voit deux limites à des sociétés coopératives et participatives. D’abord, il n'est pas possible de généraliser ce type de structure à toutes les entreprises : "Une entreprise comme Airbus ne sera jamais une Scop." Il remarque ensuite que des projets de coopératives échouent encore trop souvent, "car tous les salariés qui souhaitent créer une Scop ne sont pas capables de gérer la situation". Claude Alphandéry soulève enfin une solution, qui passerait par une "amélioration de la formation, notamment à travers les écoles de commerce, pour aider les Scop dans leur gestion".

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