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Voitures électriques : la Norvège reste en pointe en Europe malgré la baisse de certains avantages

Le marché progresse en France mais reste bien loin de la Norvège, où plus de huit voitures neuves vendues sur dix sont électriques, grâce notamment à des incitations financières.
Article rédigé par Lauriane Delanoë
Radio France
Publié
Temps de lecture : 6min
Une station de recharge pour voitures électriques à Oslo (Norvège), le 8 décembre 2022. (GORM KALLESTAD / NTB)

À la COP28, les discussions se concentreront sur le sujet de l'énergie mardi 5 décembre, avec la question centrale de la sortie des énergies fossiles. Peut-on se passer de pétrole, par exemple dans les transports ? C'est l'un des secteurs qui émettent le plus de gaz à effet de serre et participent donc au réchauffement climatique. L'une des pistes est la transition vers la voiture électrique.

En France, ce marché progresse : ces derniers mois, près d'une voiture neuve vendue sur cinq est électrique. Mais nous sommes encore loin de la Norvège où ce sont plus de huit voitures neuves sur dix. Les conducteurs sont fortement encouragés à acheter une voiture électrique avec toute une série d'incitations financières.

Eric Dubern roule en électrique depuis une dizaine d'années, dans les rues plus silencieuses et moins polluées d'Oslo. Ce Français de 46 ans a d'abord été attiré par le prix compétitif, grâce à la forte baisse voire la suppression des taxes à l'achat. "La voiture électrique est très rapidement arrivée à parité avec la voiture thermique", estime Eric Dubern, qui a aussi été séduit par tous les autres avantages.

Certains avantages de la voiture électrique se réduisent

Mais ces avantages se réduisent peu à peu. "On pouvait se garer gratuitement, se recharger gratuitement dans les rues à Oslo, dans les voies de bus accessibles, se souvient ce Français. Typiquement, là, on est sur une voie de bus. Les jours de fort trafic, c'était très efficace. Sachant qu'on est maintenant à 80% de voitures neuves électriques, ces petites attentions se réduisent. Les places de recharge sont maintenant payantes. Une recharge pendant la nuit, pour 400 kilomètres, me coûte une vingtaine d'euros. Cela reste très compétitif, notamment dans ce pays qui, bien que producteur de pétrole, a l'essence la plus chère du monde. Deux euros le litre, déjà il y a dix ans !"

En parallèle, le réseau de bornes s'est largement développé ces dernières années en Norvège. "J'habite dans un appartement, je recharge donc ma voiture dans la rue. Les parkings sont très souvent équipés de bornes qui sont de plus en plus efficaces. Quand vous déposez un enfant pour un match de handball ou autre, vous faites très rapidement 150 kilomètres de recharge", indique-t-il.

"Sur les trajets longs, il y a un réseau qui est extrêmement bien distribué pour les recharges rapides"

Eric Dubern, un Français vivant en Norvège

à franceinfo

"Les stations-service par exemple commencent à installer des bornes", poursuit le Français. Pour ces recharges rapides, il faut compter une pause d'une vingtaine de minutes.

L'objectif de la Norvège, c'est qu'en 2025, toutes les voitures neuves vendues soient à faibles émissions, c'est-à-dire soit électriques soit à hydrogène. Pour y arriver, il y a deux axes de travail d'après l'Association des propriétaires de véhicules électriques en Norvège. En premier lieu, les dirigeants ne doivent pas retirer trop vite tous ces avantages pour les particuliers. Pourtant, cette année, la TVA a été réintroduite pour les voitures électriques les plus chères, au-dessus de 45 000 euros environ. Il y a aussi une nouvelle taxe sur le poids des voitures.

Il faut donc faire attention à ne pas trop ré-augmenter le coût d'achat, alerte Petter Haugneland, l'un des porte-paroles de cette association. Il appelle aussi à des mesures pour accélerer la transition des véhicules professionnels. Et là, il s'adresse à la fois aux politiques et aux constructeurs automobiles : "La technologie a été plus lente à mettre en place pour les camionnettes, donc la gamme sur le marché n'était pas assez développée pour les conducteurs professionnels. Maintenant, il y a beaucoup plus de choix et de modèles. Par exemple, les utilitaires Renault sont bien mieux qu'il y a quelques années, mais il n'y a pas eu d'incitation financière dès le début. Alors nous devons ajuster cela et peut-être ajouter des avantages".

"Nous demandons ainsi une exonération des taxes sur les péages routiers pour les fourgons électriques"

Petter Haugneland, de l'Association des propriétaires de véhicules électriques en Norvège

à franceinfo

"Ça, ça pourrait inciter les professionnels qui conduisent beaucoup", estime-t-il. Cela soulève la question très politique des péages qui est l'une des limites du système d'incitation en Norvège. Ces péages à l'entrée et à la sortie des villes servent en fait à financer les travaux pour les transports, notamment les transports en commun. Les conducteurs en électrique paient un tarif réduit, c'est l'un des avantages. Or, mathématiquement, plus il y a de voitures électriques plutôt que thermiques en circulation, moins il y a de recettes.

L'argent des péages sert à financer des projets

Les villes peinent donc à boucler leur budget. C'est le cas à Oslo, selon l'élu Haakon Riekeles, président de la commission du développement urbain au conseil municipal. "Oslo est en train de construire une nouvelle et grande ligne de métro qui coûte très cher, explique-t-il. C'est le plus grand investissement de la ville depuis très longtemps. Les projets qu'on a maintenant, on peut les financer, mais les projets de demain ne sont pas encore financés. On aimerait faire rouler les voitures dans des tunnels, par exemple, pour réduire le bruit et la pollution et pour améliorer les conditions des cyclistes. Il y a beaucoup de choses qu'on veut faire avec l'argent du péage. On sait déjà que les projets qu'on veut réaliser nécessitent une augmentation des prix".

Les conducteurs sont donc prévenus. Malgré tout, cet élu promet que les péages resteront moins chers pour les voitures électriques que pour les thermiques. Les villes norvégiennes sont finalement en quête d'un équilibre difficile à trouver, entre encourager la transition et réduire globalement le trafic routier.

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