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Vidéo "Affaires sensibles". "Tcherno-Blaye" : quand l'inondation d'une centrale nucléaire menace de tourner à la catastrophe, en décembre 1999

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Affaires sensibles. "Tcherno-Blaye" : le 29 décembre 1999, l'inondation d'une centrale nucléaire a failli tourner à la catastrophe
Affaires sensibles. "Tcherno-Blaye" : le 29 décembre 1999, l'inondation d'une centrale nucléaire a failli tourner à la catastrophe Affaires sensibles. "Tcherno-Blaye" : le 29 décembre 1999, l'inondation d'une centrale nucléaire a failli tourner à la catastrophe
Article rédigé par France 2
France Télévisions

Que s’est-il passé dans la nuit du 27 décembre 1999, lors de la "tempête du siècle", dans la centrale du Blayais, en Gironde ? Au bord d'un estuaire français, une centrale nucléaire a failli devenir hors de contrôle. Incident maîtrisé ou scénario catastrophe évité de justesse ? Cet extrait du magazine "Affaires sensibles", coproduit par France Télévisions, France Inter et l’INA d'après l'émission originale de France Inter, fait le récit heure par heure d'une nuit sous tension.

L'incident est passé presque inaperçu, et pourtant, en France, une centrale nucléaire a frôlé la catastrophe. Le 27 décembre 1999, la "tempête du siècle" atteint le sud-ouest de la France, avec des rafales de vent jusqu'à 200 km/h. Elle va déferler sur la centrale du Blayais, construite au bord de la Gironde, dans le plus grand estuaire d'Europe. 

La digue de protection censée protéger les bâtiments a été conçue pour résister à une crue milléniale, mais selon de nombreux spécialistes, elle a été construite trop bas par rapport au niveau du fleuve. Cette nuit-là, elle devient le talon d'Achille de cette centrale. L'eau du fleuve va passer à plus de 50 centimètres par-dessus la digue.

Lorsque la plate-forme de la centrale est submergée par 30 centimètres d'une eau boueuse, les problèmes s'enchaînent. L'eau s'infiltre à l'intérieur des bâtiments par des galeries techniques souterraines et se répand jusque dans les sous-sols, menaçant les systèmes de sécurité. 

0h30 : tous les réacteurs sont hors circuit

A 0h30, le réacteur n°1, qui ne peut plus être normalement alimenté en eau, se met en arrêt automatique. Deux autres se sont déjà arrêtés lorsque, touchées par la tempête, les lignes à haute tension qui alimentent la centrale ont été coupées, et le quatrième est en maintenance. Tous les réacteurs sont désormais hors circuit.

En cette période de fêtes de fin d'année, une cinquantaine d'agents EDF sont à leur poste. Prévenu par des alarmes de la présence d'eau, le chef d'exploitation envoie un agent faire une ronde dans les sous-sols de la salle du réacteur 1. Ce dernier traverse les entrailles de la centrale, puis descend un escalier. Les premières marches sont déjà inondées.

1h30 : les pompes de secours du réacteur n°1 sont noyées

Vers 1h30, constate-t-il, les sous-sols du bâtiment combustible sont immergés dans 4 à 5 mètres d'eau. Les pompes de secours du réacteur n°1, des systèmes de sécurité vitaux en cas d'accident, sont noyées.

A 2h50, le plan d'urgence interne de niveau 1 est activé. Des personnels d'astreinte sont mobilisés pour venir en renfort et aider à pomper l'eau. L'antenne locale de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) est prévenue.

"J'ai été appelé vers 3 heures du matin. Ils venaient de découvrir des entrées d'eau massives dans les locaux nucléaires. On rentrait dans une situation totalement anormale : avoir de l'eau où elle était, c'est pas prévu..."

Christophe Quintin, responsable de l'antenne bordelaise de l'Autorité de sûreté nucléaire

dans "Affaires sensibles"

Tous les réacteurs à l'arrêt, 100 000 mètres cubes d'eau qui inondent les installations… Dans une centrale, c'est une situation sans précédent. La route qui mène aux bâtiments, inondée elle aussi, redevient praticable vers 3 heures du matin, permettant aux renforts d'arriver. Sur place, la tension monte.

Devant la gravité de l'événement, le responsable de l'antenne bordelaise de l'ASN prévient son directeur général à Paris. La crise devient nationale, et le plan d'urgence interne niveau 2 est déclenché, activant la cellule de crise et mobilisant les meilleurs experts.

Après des heures critiques où plane le spectre de Tchernobyl, après une nuit de pompage intense grâce aux deux pompes de secours restantes, le pire sera finalement évité. Le 28 décembre en fin de matinée, la centrale est sauvée : l'eau commence à être évacuée, et les agents d'EDF annoncent que la situation est sous contrôle. Mais l'inondation de la centrale du Blayais n'a pas fini de faire des vagues, médiatiques et politiques...

Extrait de "'Tcherno-Blaye' : Le scénario d’un Tchernobyl français ?", un document de Richard Puech, Grégory Roudier et Damien Pasinetti à voir dans "Affaires sensibles" le 1er novembre 2021.

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