Rassemblement pro-palestinien : comment est décidée l'interdiction d'une manifestation ?
Un nouveau rassemblement sera organisé, mercredi, dans la capitale. Mais contrairement à samedi, l'évènement a reçu cette fois l'aval des autorités.
A Paris, le cortège défilera entre les places Denfert-Rochereau et Invalides, mercredi 23 juillet, à partir de 18 h 30. A Dijon, Toulouse, Lille, Lyon ou Reims, les manifestants pro-palestiniens pourront aussi se rassembler pour protester contre l'opération menée par Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza. Ces rassemblements ont été autorisés lundi 21 juillet. Or, dans la capitale, les autorités avaient interdit une manifestation similaire samedi, suscitant la polémique. Décision nécessaire, réclamée par certains ? Ou contre productive, voire scandaleuse, pour d'autres ?
Parmi les dizaines de manifestations organisées ces derniers jours en France en soutien au peuple palestinien, deux rassemblements non-autorisés ont dégénéré samedi 19 et dimanche 20 juillet, à Paris et à Sarcelles (Val-d'Oise). Retour sur une décision épineuse.
Qui décide d'interdire une manifestation ?
Avant de battre le pavé, les organisateurs de manifestations doivent obtenir l'autorisation des autorités locales : il faut adresser un dossier au maire de la ville concernée, ainsi qu'à la préfecture du département, "en joignant en plus un dossier spécifique, lorsque l'événement a lieu pour tout ou partie à l'intérieur de Paris", explique le portail services-publics.fr. Auquel cas, la préfecture de police doit également recevoir une demande d'autorisation.
"Le dépôt doit être réalisé dans des délais permettant son instruction et au plus tard trois jours francs avant la date de la manifestation (même en cas d'urgence)."
Quels sont les critères étudiés ?
Selon les articles L211-1 à L211-4 du code de la sécurité intérieure, un seul motif d'interdiction entre en ligne de compte : le risque de trouble à l'ordre public. Ainsi, "une interdiction ne peut se fonder sur des motifs d’opportunité (l’autorité ne prend pas de décision en fonction de la qualité de l’organisateur ou du motif de la manifestation) mais uniquement sur la préservation de l’ordre et de la sécurité publique", assure la loi.
Les organisateurs doivent ainsi "proposer un itinéraire, prévoir un service d'ordre... donner le maximum d'infos qui permettra au préfet de police d'orienter sa décision", explique Mohamed Douhane, secrétaire national du syndicat Synergie-Officiers, interrogé par francetv info. A Paris, "c'est lui qui décide en dernier ressort, en fonction de ces éléments et des informations que lui donnent les services de police et de renseignements".
Enfin, l'autorité publique "vérifie que l'association organisatrice fait preuve de bon sens dans la conception de l'événement pour assurer la sécurité des biens et des personnes, fait attention à ce que le secours reste facile à apporter [et] démontre que les installations éventuellement prévues répondent toutes aux obligations légales et réglementaires."
Pourquoi avoir interdit la manifestation de samedi et pas celle de mercredi ?
Interrogé lundi, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a expliqué avoir "interdit [la] manifestation [de samedi, à Paris] parce qu'elle pouvait être l'occasion d'affrontements, de diffusion de propos de haine qui sont le contraire de la République". Ainsi, le ministère de l'Intérieur a justifié l'ouverture d'une procédure d'interdiction par un "précédent" : les heurts ayant éclaté aux abords d'une synagogue à Paris en marge d'un premier rassemblement, dimanche 13 juillet. "On remarque qu'il y a des provocations sur les réseaux sociaux qui perdurent, des deux côtés. Certains continuent de s'interpeller sur Twitter. Ce n'est pas la peine de prendre un risque", expliquait le ministère contacté par L'Express.
Citée par Metronews, la préfecture explique que le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), qui figurait parmi les organisateurs de la manifestation de samedi, n'avait par ailleurs pas fourni un "dossier (...) assez solide notamment parce que leur service d'ordre n'était pas assez sérieux", explique-t-elle. Or, mercredi, "c'est le Collectif national pour une paix juste et durable entre Israéliens et Palestiniens qui déclare la manifestation, poursuit la préfecture. Nous les connaissons et nous savons qu'ils sont plus rigoureux sur la sécurité."
Une interdiction peut-elle être contestée ?
La décision d’interdire une manifestation "peut être contestée devant la juridiction administrative territorialement compétente dans les deux mois suivant sa notification, explique la préfecture de police. Le juge opère alors un contrôle très vigilant sur les autorités de police, en exigeant que toutes les mesures de restriction en matière de manifestation soient strictement proportionnées aux nécessités de l’ordre public."
Il ne s'agit pas "d'interdire pour interdire" a précisé à RTL un membre du cabinet de Bernard Cazeneuve. Pour répondre aux craintes des autorités, les organisateurs peuvent notamment accepter un nouveau tracé, "loin des synagogues, et sur un dispositif de sécurité suffisant (...), a noté L'Express. Un rassemblement pro-palestinien a d'ailleurs eu lieu mercredi soir aux Invalides sans faire de heurts."
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