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"J'ai décidé d'arrêter de me taire" : des sportifs aux Gay Games racontent leur combat contre les discriminations

Les Gay Games se tiennent à Paris du 4 au 12 août. À l’occasion de cet événement, des sportifs LGBT témoignent de leur vécu et de leurs difficultés, dans un domaine où l’homophobie est particulièrement importante.

Article rédigé par Noémie Bonnin
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Jai Mulucha, à l'Hôtel de ville de Paris, avant le début des Gay Games, qui se tiennent du 4 au 12 août. (NOEMIE BONNIN / FRANCEINFO)

Jai vient d’Ouganda, il est à Paris pour participer au tournoi de basket des Gay Games : "Je suis très heureux d'être là, parce que la plupart des sportifs homosexuels dans mon pays n'ont pas l'opportunité de pratiquer leur discipline librement", explique-t-il.

La 10e édition des Gay Games se tient pour la première fois en France, à Paris, du 4 au 12 août. Environ 10 000 participants - LGBT ou non - de plus de 80 pays sont annoncés pour ces mondiaux de la diversité, autour de 36 disciplines (athlétisme, football, boxe, etc). Mais au-delà du sport, l’événement se veut festif et militant, pour lutter contre l'homophobie et toutes sortes de discriminations.

En Ouganda, l'identité de Jai rejetée

Jai est transgenre, se sent homme, dans son corps de femme. À l'université, il décroche une bourse pour pouvoir coupler études et basket, sa passion. Tout va bien, jusqu'au jour où l'université apprend son identité sexuelle : "Ils m'ont stoppé dans mes études, ils m'ont enlevé ma bourse. J'étais quasiment en train de finir mon diplôme, tout cela a été arrêté. Ça n'a pas été facile pour moi."

En Ouganda, la transsexualité comme l'homosexualité sont illégales. Mais Jai refuse de baisser les bras, de se cacher. C'est un déclic : "C’est pourquoi j'ai décidé de faire mon coming out et j'ai commencé à militer. Nous avons aussi commencé à lutter au sein de notre équipe de basket. Je savais qu'en restant silencieux, de nombreuses personnes continueraient à souffrir de cela. Donc j'ai voulu revendiquer à voix haute, j'ai décidé d'arrêter de me taire"

Le sport n'est évidemment pas l’unique domaine où vivre son homosexualité est difficile, voire dangereuse, en Ouganda. On peut aller en prison pour cela. "Nous ne sommes pas acceptés comme nous sommes", confie Jay. "Les sportifs cachent leur identité. La plupart le font pour pouvoir faire du sport sans être discriminés. Parce qu'à partir du moment où on apprend leur orientation sexuelle, ils sont sûrs d'être exclus de leur équipe, ils sont sûrs de ne plus jamais participer aux matchs. Pour l'amour de leur sport, ils se cachent et restent dans leur équipe. Ils ne sont pas libres."

En France, Antoine a fait le choix d'un club gay

L’homophobie dans le sport était le thème de la dernière marche des fiertés à Paris, fin juin. Antoine est handballeur, co-capitaine de la délégation française à ces Gay Games. Si le sport fait aujourd'hui fait partie intégrante de sa vie, ça n'a pas toujours été aussi évident : "J'ai rejeté le sport, comme beaucoup de LGBT. Quand j'ai fait mon coming out, j'ai arrêté tout simplement de faire du sport. Je n'avais pas envie de me justifier, à chaque fois. J'avais envie de faire du sport, mais je ne voulais pas le faire dans un club traditionnel, parce que je n'avais pas envie de retourner dans le placard."

Alors qu’il a toujours pratiqué du sport en tant qu’enfant et adolescent, Antoine s’éloigne donc un moment de toute pratique sportive. Il ne veut pas prendre le risque d’entendre des blagues, pas prendre le risque de subir des moments de gêne dans les vestiaires, d’être la cible de remarques humiliantes.

La reconquête et la renaissance

Après sept ou huit ans de traversée du désert sportif, Antoine s'inscrit finalement dans une association : un club gay. "À partir de ce moment-là j'ai vécu des années absolument extraordinaires de redécouverte sociale, corporelle, mentale, à tous points de vue. C'était pratiquement une révolution." Ce club gay, c’est un endroit bienveillant, où il est sûr de ne pas faire l'objet de remarques ou de moqueries.

Mais attention, n'allez pas lui reprocher ce besoin de se retrouver au sein d'une communauté : "Personnellement, j'assume totalement ce mot de ‘communautaire’, qui n'est pas du tout ‘communautariste’. On n'est pas du tout fermé, on se retrouve deux heures par semaine ensemble, comme énormément de groupes sociaux se retrouvent pour faire une soirée entre filles, pour aller à la messe ensemble ou pour parler la même langue pour des communautés immigrées, etc. Je crois qu'on a tous plusieurs cercles affinitaires", analyse Antoine. "Parmi les miens, il y a la communauté homosexuelle et sportive et j'ai besoin de me retrouver avec eux une fois par semaine. C'est quelque chose qui est positif, ce n'est pas du tout quelque chose d'excluant."

Au contraire, ces Gay Games se veulent effectivement porteurs de respect et d’ouverture. Mais il y a encore beaucoup de chemin à faire pour que l’homosexualité soit pleinement acceptée dans le monde du sport. Aujourd’hui les relations entre les clubs gays et lesbiens et les fédérations sportives en France restent en général assez difficiles.

Des sportifs aux Gay Games racontent leur combat contre l'homophobie. Le reportage franceinfo de Noémie Bonnin

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