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Les Anonymous parlent d'une seule voix sur franceinfo.fr

Pour la première fois, franceinfo.fr a pu rentrer en contact avec une partie des Anonymous francophones et les interviewer. Le mouvement est structuré de telle manière qu'un individu seul ne peut porter la voix du groupe, ils ont été une centaine à répondre à nos questions.
Article rédigé par Pierre Breteau
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Franceinfo (Franceinfo)

"Un Anonymous ne peut pas répondre seul" selon les règles du mouvement, et si jamais c'est le cas, le membre est désavoué. Pour ces militants, seul le "nous" a une valeur. Autrement dit, pour qu'ils assument ce qui est publié, leur parole doit être collective. C'est pourquoi pour la première fois ils ont décidé de tester un nouveau système de communication, autre que les messages vidéos ou les communiqués qui fleurissent sur Internet à l'occasion d'une action.

Après quelques contacts sur IRC (Internet Relay Chat), l'idée de réaliser cette interview collective est arrivée. C'est d'ailleurs là qu'elle a eu lieu.

Ils sont un peu plus d'une centaine à avoir participé, ils se sont retrouvés sur un canal de discussion pour répondre aux questions. Selon les règles du mouvement "tout est décidé de manière collective" , il en va de même pour les réponses à nos questions. C'est une manière de faire tout à fait nouvelle pour eux de communiquer, tout en conservant leur tradition de se concerter avant de s'exprimer publiquement.

"Nous sommes le peuple d'Internet"

Ils sont étudiants, salariés, administrateurs réseau, artistes, professeurs, etc. et n'ont pas nécessairement tous de solides connaissances en informatique. Loin du cliché du hacker solitaire, ils se présentent comme "le peuple d'Internet" , comme "des citoyens qui se battent pour garder leurs droits acquis" . Parce que c'est bien de cela qu'est né le mouvement Anonymous : "Nous défendons la liberté des individus et la justice. Nous luttons contre les abus de pouvoir et la pensée unique."

Il leur arrive d'utiliser des moyens illégaux, comme le piratage de sites web (récemment immigration.gouv.fr ou encore vivendi.fr). Mais quand ils s'attaquent à des sites institutionnels, ils prennent soin de ne rien détruire. Dans ce type d'action, ils se contentent simplement de changer la page d'accueil par exemple, "une sorte de clin d'oeil à la victime" et récupérer des informations sensibles quand elles sont disponibles.

Parce qu'ils se disent défenseurs des libertés, ils soutiennent les mouvements nés ces derniers mois comme les indignés ou les "occupy" partout dans le monde,* leurs "alliés idéologiques dans la lutte des 99% contre les 1%"* . C'est aussi une partie d'entre eux qui se débrouille pour sortir de Syrie les vidéos tournées sur place, en contournant les blocages mis en place par le gouvernement de Bachar Al-Assad.

"Nous ne sommes pas une bande de gamins qui se mettent à brailler"

  • "Anonymous est garant de la liberté d'expression" , clament les francophones que nous avons interviewés. A ce titre leur "combat du moment, c'est ACTA" , cet accord anti-contrefaçon signé par 22 pays de l'Union européenne et tout juste repoussé par le gouvernement polonais. Avec des associations comme la Quadrature du Net, ils accusent cet accord de vouloir censurer Internet et créer "une police privée"* du copyright.

  • "Nous ne sommes pas une bande de gamins qui se mettent à brailler parce qu'on nous enlève notre accès facile, gratuit et sans scrupules à des œuvres audiovisuelles" , disent-ils. Et si c'est la fermeture du site de partage Megaupload qui les a fait connaître en France par leur riposte, les Anonymous ne veulent pas non plus voler les artistes, les réalisateurs, etc. Ils sont "sensibles au problèmes d'accès à la culture" et expliquent que "le modèle actuel d'accès à la musique ou au cinéma est dépassé" , ils proposent des alternatives "pour permettre aux créateurs d'être reconnus et rémunérés sans devoir passer par la chaîne du copyright qui profite à une minorité"* , des solutions comme la licence globale.

Ils protestaient hier contre les lois SOPA, PIPA aux Etats-Unis ou Hadopi en France. Aujourd'hui, ils veulent s'en prendre "aux mouvements lobbyistes qui monopolisent la commercialisation de la connaissance". P our eux, elle doit "être libre et accessible à tous" et donc libre de toute censure ou limitation. C'est aussi à ce titre qu'ils dénoncent la scientologie, au nom de la lutte "contre l'emprisonnement de l'esprit par les sectes" et de "la pensée unique" .

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