Pourquoi Taubira a reculé sur la refonte de l'aide juridictionnelle
La garde des Sceaux a annoncé que cette refonte ne serait "pas appliquée" en 2014. Elle provoquait la mobilisation des avocats.
Elle faisait débat au sein de la profession et a provoqué une mobilisation des avocats, vendredi 4 octobre. La réforme du financement de l'aide juridictionnelle ne sera pas appliquée en 2014, a annoncé la ministre de la Justice, Christiane Taubira. La garde des Sceaux va présenter, avec l'accord du Premier ministre, un amendement au projet de loi de finances 2014 "pour demander au Parlement d'annuler" cette mesure, a-t-elle déclaré lors d'un discours devant l'assemblée générale extraordinaire du Conseil national des barreaux (CNB). Explications.
Qu'est-ce que l'aide juridictionnelle ?
L'aide juridictionnelle ou aide juridique, dite "AJ", est une aide financière qui permet aux particuliers les plus modestes de bénéficier de la prise en charge des honoraires et frais de justice par l'Etat. Elle peut s'appliquer pour des clients percevant un revenu inférieur à 929 euros par mois. En 2012, 25 098 avocats ont effectué au moins une mission d'aide juridictionnelle, sur les 56 176 que comptait la profession.
Que proposait la réforme ?
Le projet prévoyait une modification du barème d'indemnisation des avocats assistant les justiciables au titre de l'aide juridictionnelle. Elle devait dégager au total 32 millions d'euros d'économies dans le budget du ministère. Mais cela induisait une baisse des tarifs d'indemnisation dans 157 barreaux sur les 161 en France, selon le président du Conseil national des barreaux (CNB), Jean-Marie Burguburu. Une première. Les tarifs sont fixés, depuis 2007, à 188 euros hors taxes, quel que soit le délit. Et cela débouche parfois sur un travail à perte des avocats, comme le montre ce reportage tourné à Nantes.
Pourquoi cette reculade ?
Ce projet a déclenché la colère de plusieurs professionnels du secteur, dont les quatre principaux syndicats d'avocats. Vendredi, plusieurs dizaines de barreaux, dont ceux de Marseille, Bordeaux, Evry et Meaux, ont annoncé leur ralliement à ce mouvement de grève afin de protester contre cette refonte controversée. Au-delà de la profession, les deux principaux syndicats de juges, l'Union syndicale des magistrats (USM) et le Syndicat de la magistrature (SM), ont aussi affiché leur soutien au mouvement.
"Des avocats qui sont moins bien rémunérés ne vont pas réussir à assumer les charges de leur cabinet pour pouvoir défendre la cause des plus démunis", explique une avocate montpelliéraine dans ce reportage.
La garde des Sceaux a donc cédé. "Vous avez raison d'être plus exigeants avec la gauche", a-t-elle lancé à la profession. "Il est plus responsable de considérer effectivement d'autres pistes", a-t-elle reconnu. Parmi elles figure une taxe sur les actes juridiques. "Explorons jusqu'au bout chaque piste. A charge pour vous de la récuser" si elle ne paraît pas souhaitable pour la profession, a poursuivi Christiane Taubira. "J'espère que le fait d'avoir supprimé la démodulation va ramener un peu de sérénité et permettra que l'on travaille et que l'on explore toutes ces pistes-là", a conclu la ministre.
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