L'avocate Nathalie Roret devient la première femme et la première non-magistrate proposée pour diriger l'Ecole nationale de la magistrature
Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a suggéré ce nom au président de la République, après avoir dénoncé le "corporatisme" de l'institution qui forme les magistrats.
La pénaliste Nathalie Roret, vice-bâtonnière du barreau de Paris, a été choisie par le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti, lundi 21 septembre, pour diriger l'Ecole nationale de la magistrature (ENM). Ce nom doit encore être validé par le président de la République, mais l'avocate devrait donc devenir la première femme et la première non-magistrate à prendre les rênes de la prestigieuse école. "Je préfère les états de service aux états d'âme", a-t-il justifié.
J'ai décidé de proposer à la signature de monsieur le président de la République le nom du 17e directeur, et pour la première fois dans l'histoire de l'école, ce directeur sera une directrice.
Eric Dupond-Moretti
Nathalie Roret a prêté serment en 1989 et est membre du comité d'éthique du barreau de Paris depuis 2015 et vice-bâtonnière depuis 2020. "Je le vis [ce choix] comme une mission majeure dans l'intérêt de la justice et des justiciables qui permettra de renforcer le lien entre avocats et magistrats", a réagi l'intéressée sur Twitter.
Je mesure l’honneur qui m’est fait par @E_DupondM en proposant mon nom à @EmmanuelMacron pour prendre la direction de l’@ENM_France. Je le vis comme une mission majeure dans l’intérêt de la justice et des justiciables qui permettra de renforcer le lien entre avocats et magistrats
— Vice-Bâtonnière de Paris (@NathalieRoret) September 21, 2020
Lors de son annonce, le garde des Sceaux a livré un regard sans concession sur l'ENM. S'il s'est félicité de "l'engagement et l'enthousiasme de la majorité des magistrats", il a également dénoncé "la force d'inertie de certains" et "la frilosité" pour modifier l'institution. Eric Dupond-Moretti a pointé du doigt "les dérives d'une culture de l'entre-soi". Tout en reconnaissant "l'excellence" de l'enseignement dispensé à l'ENM, il a également évoqué un "corporatisme qui éloigne la justice des citoyens".
L'ancien avocat avait évoqué – avant de devenir ministre de la Justice – une suppression de l'Ecole nationale de la magistrature, créée en 1958 et d'où sortent chaque année environ 350 magistrats. "Je n'aurai pas le temps d'opérer une refonte totale" de l'ENM, a-t-il dit, "mais je ne renonce certainement pas à ouvrir davantage cette école. L'ouverture c'est d'abord rompre avec des traditions surannées, c'est rompre avec la tentation du vase clos et de l'entre-soi, c'est vouloir réfléchir et débattre autrement qu'entre pairs".
Sans jamais citer le ministre, les personnels de l'ENM ont tout de même souhaité lui répondre, dans un communiqué paru dans la journée. Ils précisent que l'établissement entretient déjà "au quotidien les échanges interprofessionnels avec l'ensemble de leurs partenaires, au premier rang desquels les avocats". Ils ajoutent que "70% du temps de formation" des élèves magistrats "est consacré à des stages de terrain, en prise directe avec les réalités du pays" et que l'ENM est une "école de dialogue et de débats contradictoires", "ouverte aux autres professions".
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