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Faut-il rétablir la loi d'amnistie pour lutter contre la surpopulation carcérale ?

Nicolas Sarkozy y avait renoncé en 2007. Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté estime qu'il faut rétablir cet usage pour soulager les prisons.

Article rédigé par franceinfo
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Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, Jean-Marie Delarue, à l'Elysée, le 02 mai 2011 à Paris. (BERTRAND LANGLOIS / AFP)

Faut-il rétablir la loi d'amnistie ? Fait rare, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), Jean-Marie Delarue, a rendu un avis publié mercredi 13 juin au Journal officiel (et que l'on peut télécharger ici), estimant qu'il faut rétablir cet usage pour les peines très légères pas encore exécutées afin de soulager les prisons surpeuplées.

• Loi d'amnistie et grâces du 14-Juillet en suspens

La loi d'amnistie votée à l'Assemblée après l'élection présidentielle était une tradition, de même que les grâces du 14-Juillet. Ces mesures effaçaient certaines contraventions et tout ou partie des peines pour des petits délits, ce qui soulageait les 192 prisons. Mais en 2007, Nicolas Sarkozy y a renoncé. 

• Des prisons surpeuplées

Le CGLPL s'inquiète et alerte d'abord sur la surpopulation historique que subissent les prisons françaises. Après une tendance à la baisse dans les années 2009-2010, le nombre de détenus a battu ces derniers mois plusieurs records. Il atteint 67 073 au 1er mai, soit une surpopulation carcérale de 117,3%. Dans certaines maisons d'arrêt, le taux d'occupation peut atteindre plus de 200%, alors même que la loi prévoit le droit à une cellule individuelle, avec cependant une application différée à 2014.

• Ce que propose le Contrôleur

Dans son avis, le Contrôleur général estime que le rétablissement de cet usage, uniquement pour des courtes peines non exécutées à ce jour faute de moyens, permettrait d'apporter un début de solution. "S'il est souhaitable que l'amnistie perde de son caractère circonstanciel contraint, on doit cependant admettre que l'amnistie ne constitue ni une incongruité juridique, ni une étrangeté démocratique, et s'étonner qu'elle disparaisse de l'horizon législatif national", peut-on lire.

Dans une interview à 20 Minutes, il précise que cette amnistie pourrait concerner "les peines de moins de six mois de prison et celles qui ont été prononcées il y a plus de deux ans". Il ajoute : "Cela permettra de remettre les compteurs à zéro".

• Une situation "qui favorise la récidive"

La surpopulation, rappelle Jean-Marie Delarue, présente un risque pour la sécurité des Français. "En faisant de la prison une caricature d'elle-même, le système carcéral actuel a toutes chances de faciliter, à l'opposé de sa mission et malgré les efforts déployés, les sorties insuffisamment préparées, par conséquent favorisant, nolens volens, la réitération et la récidive", écrit-il. Mettre en prison des condamnés, même pour une brève durée, avec une ou plusieurs années de retard, "a pour résultat de ruiner l'insertion de ceux qui, postérieurement au jugement, avaient repris vie professionnelle et relations sociales", note encore Jean-Marie Delarue.

• Delphine Batho y est défavorable

"La solution n'est pas d'aller vers des amnisties automatiques, ce n'est pas la bonne solution", a réagi, sur Europe 1, la ministre déléguée à la Justice, jugeant que cela enverrait "un très mauvais signal" dans la lutte contre la délinquance. Delphine Batho a rappelé que François Hollande s'était exprimé lors de la campagne présidentielle contre une loi d'amnistie, qu'il s'agisse des délits routiers ou des peines de prison.

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