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Journée des droits des femmes: dix exemples qui prouvent qu'elle n'est pas (encore) inutile

La légitimité de cette journée, dont le nom lui-même fait polémique, est contestée chaque année en Occident. Pourtant, elle n'est pas un luxe dans nombre de pays. 

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 9min
Des manifestants forment le symbole du genre féminn à l'occasion de la Journée internationale des droits des femmes, le 8 marqs 2014, à Manille (Philippines).  (ROMEO RANOCO / REUTERS)

Chaque année, c'est le même débat dans les rédactions : faut-il parler de la Journée de la femme ? D'ailleurs, comment s'appelle cette manifestation au juste ? Journée internationale de la femme, Journée internationale des droits des femmes... Au-delà de la sémantique, certains mouvements féministes s'interrogent : pourquoi consacrer une journée au sexe féminin ? Cela signifie-t-il que tous les autres jours de l'année sont réservés aux hommes ? Pour que l'égalité entre les deux genres aille de soi, ne faut-il pas en finir avec ces vieux symboles hérités du début du XXe siècle ?

Reste que dans nombre de pays, cette journée consacrée aux droits des femmes (et non à une représentation stéréotypée de la femme avec ses corollaires sexistes, cadeaux, roses et parfum) n'est pas un luxe, loin s'en faut. Elle permet de rafraîchir la mémoire sur le chemin qui reste à parcourir en matière d'égalité des sexes. La preuve en dix exemples.

1Au Soudan, les femmes n'ont pas le droit de célébrer cette journée

Preuve que cette journée a encore du sens dans certains pays : au Soudan, les femmes n'ont pas pu célébrer leurs droits l'année dernière. Un retour en arrière dans cet Etat puisque l'évènement avait eu lieu sans incidents chaque année depuis huit ans. Mais en 2014, les autorités soudanaises ont refusé d'autoriser un rassemblement à Khartoum, sans réellement se justifier. Pour l'édition 2015, rien n'a été précisé.   

2En Arabie saoudite, les femmes n'ont toujours pas le droit de conduire

Elles devraient enfin acquérir le droit de vote cette année (l'Arabie saoudite est le dernier pays du monde à accorder un droit de vote aux hommes mais pas aux femmes). Mais les Saoudiennes n'ont toujours pas le droit de conduire et s'exposent à la prison si elles bravent cette interdiction. A défaut, elles ont gagné en mars 2013 le droit de faire du... vélo

Un chanteur a décidé de les soutenir sur internet, en interprétant No Woman, No Drive, un détournement de Bob Marley. 

Le Washington Post et Slate ont listé les restrictions les plus ridicules des droits des femmes à travers le monde. Sachez qu'en Russie, la gent féminine n’a pas le droit de conduire des camions agricoles. En Biélorussie, l'interdiction porte sur les scooters des neiges. 

3En Afghanistan, les filles ont du mal à aller à l'école

L'émission "Envoyé spécial" en faisait le constat en 2013 : malgré la chute des talibans en 2001, étudier reste un combat de tous les jours pour les Afghans, surtout pour les jeunes filles. Tout est bon pour décourager leur accès à l'éducation. Selon un rapport de l'ONU (en anglais), plusieurs incidents d'empoisonnement et d'attaques à l'acide contre des écolières ont été relevés dans le pays entre 2012 et 2014. 

L'Afghanistan n'est pas un cas isolé : les Nations unies ont recensé des attaques contre des écoles dans au moins 70 pays ces cinq dernières années et nombre d'entre elles ont visé en particulier des filles.

4Aux Etats-Unis, les femmes gagnent 23% de moins que leurs collègues masculins

Outre-Atlantique, l'actrice Patricia Arquette a fait mouche lorsqu'elle a lancé aux Oscars : "Il est temps pour nous les femmes, d'obtenir l'égalité salariale et l'égalité des droits aux Etats-Unis!" L'écart salarial y atteint 23%. 

Mais c'est loin d'être le seul pays concerné par cette discrimination. La France, avec une différence de 15,2%, se situe dans la moyenne européenne. Selon des statistiques Eurostat publiées jeudi 5 mars, l'Estonie compte l'écart de rémunération entre hommes et femmes le plus élevé dans l'UE, à hauteur de 30% en 2013.

Davantage exposées au chômage et au temps partiel, sous-éduquées, les femmes représentent 70% des pauvres dans le monde, selon les chiffres de l'Institut national des études démographiques

5Au Mozambique, une fille sur deux de moins de 18 ans est mariée de force

Comme le souligne une députée britannique sur son blog, ce pays a l'un des taux les plus élevés de mariages forcés de mineures, avec une fille sur deux âgées de moins de 18 ans conduite de force à l'autel. Le Mozambique n'est pas le seul pays d'Afrique concerné par ce phénomène. France 24 consacrait fin 2013 un long reportage sur cette tradition très ancrée au Cameroun.  

D'autres régions du monde sont concernées, du Moyen-Orient à l'Asie du Sud. Si les mariages forcés et précoces sont en recul dans le monde, selon l'ONU, 700 millions de femmes ont été mariées alors qu'elles étaient enfants. Pour l'ONG Care cela donne cette statistique effrayante : chaque jour, près de 39 000 filles sont mariées de force, soit environ une fille toutes les deux secondes.

6En Somalie, 98% des femmes entre 15 et 49 ans ont été excisées

Un triste record. Avec 98% des femmes entre 15 et 49 ans qui ont été excisées, la Somalie est le pays où cette pratique est la plus répandue dans le monde. Viennent ensuite la Guinée avec 96%, Djibouti avec 93%, puis l'Egypte, avec 91%.

L'excision consiste en l'ablation des organes génitaux externes féminins. Cette pratique décline, mais lentement. Plus de 125 millions de filles et de femmes dans le monde sont excisées et 30 millions de petites filles pourraient connaître le même sort dans les dix prochaines années, estime l'Unicef.

7En Iran, des femmes "mal voilées" sont attaquées à l'acide

Fin octobre 2014, plusieurs médias s'en sont fait l'écho : durant ce mois, au moins quatre femmes ont été attaquées à l'acide par des hommes à scooter alors qu'elles circulaient en voiture dans la ville d'Ispahan, en Iran. L'une a été brûlée aux mains et au visage, une autre a perdu un œil. Selon Le Figaro, ces agressions pourraient être la conséquence d'un projet de loi en cours, qui encourage les citoyens à veiller à ce que les femmes portent bien le hijab, obligatoire dans le pays depuis 1979. 

8Au Chili, l'avortement est totalement interdit

Le Chili fait partie des sept pays d'Amérique latine qui interdisent totalement l'avortement. Il y est passible de cinq ans de prison pour les femmes, et trois ans pour les médecins. Fin janvier, la présidente Michelle Bachelet a présenté un projet de loi pour l'autoriser en cas de danger pour la vie de la femme, malformation du fœtus et viol. 

L'interdiction totale de l'IVG reste rare dans le monde, nombre d'Etats l'autorisant au moins sous conditions (le risque vital étant le premier argument). En Europe, par exemple, Malte le prohibe complètement alors que l'Irlande l'autorise si la vie de la mère est en danger. Dans les pays où il est acquis, le droit à l'avortement n'en est pas moins menacé. En Espagne, le gouvernement conservateur voulait restreindre son accès. Face à la polémique, il a néanmoins revu sa copie

9En Inde, une femme est violée toutes les 22 minutes

Dans ce pays de plus de 1,2 milliard d’habitants, les violences sexuelles envers les femmes sont légion. Comme le rappellent nos confrères de Géopolis, une femme y est violée toutes les 22 minutes, dont une sur trois qui a moins de 18 ans. En décembre 2012, le viol suivi de la mort d'une étudiante dans un bus de New Delhi avait fait scandale. Depuis, le gouvernement a voté une loi qui prévoit une peine de 20 ans de prison minimum en cas de viol en réunion. Mais l'impunité continue de régner et ni les maris, ni la police ne peuvent être poursuivis pour viol. Récemment, c'est un chauffeur de la société Uber qui a été accusé de viol. 

Les violences sexuelles, dans le monde, sont à 75% subies par les femmes, selon l'ONU. Elles sont souvent une arme en cas de conflit. Plus globalement, l'ONU prédit qu'une femme sur cinq sera victime de viol ou de tentative de viol au cours de sa vie. Le plus souvent (86%) de la part d'un proche.

10En France, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint

Ce qui vaut pour les violences sexuelles vaut pour les violences tout court. Dans le monde, plus de la moitié des femmes victimes d’homicide sont tuées par leur conjoint, ex-conjoint ou compagnon, rappelle l'ONU sur son site. En Australie, au Canada, en Israël, en Afrique du Sud et aux Etats-Unis, ce taux varie de 40 à 70%, selon l'OMS. En Colombie, une femme est tuée par son compagnon ou ex-compagnon tous les six jours.

En France, c'est tous les trois jours qu'une femme meurt sous les coups de son conjoint. Le gouvernement prévoit de systématiser le dépôt de plainte dans les cas de violences conjugales, pour généraliser les poursuites judiciaires.

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