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"Ce n'est pas un désaveu", "Darmanin doit en tirer les conclusions"... Les réactions au vote de rejet du projet de loi immigration

L'Assemblée nationale a adopté une motion de rejet préalable au projet de loi immigration. Une très lourde défaite politique au gouvernement.
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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L'Assemblée nationale, le 11 décembre 2023. (LUDOVIC MARIN / AFP)

L'Assemblée nationale a adopté par 270 voix contre 265 une motion de rejet préalable au projet de loi immigration, avec les voix de la gauche, de députés Les Républicains et du Rassemblement national, infligeant une très lourde défaite politique au gouvernement. Cette motion était défendue par le groupe écologiste.

L'adoption de la motion de rejet entraîne l'interruption de l'examen du texte avant même que ne soient abordés les articles au fond. Le gouvernement peut choisir désormais de laisser le texte poursuivre son parcours législatif au Sénat ou en commission mixte paritaire réunissant députés et sénateurs, ou décider de l'abandonner. 

La majorité espère que le gouvernement "poursuive" et réute l'idée d'un "désaveu"

Pour Erwan Balanant, le député du Finistère Démocrate (MoDem et Indépendants), cette motion de rejet adoptée "n'est pas un désaveu". Il estime que ne pas débattre, c'est "refuser l'obstacle". Ce rejet "est loin de l'éthique de la responsabilité quand on est élu", ajoute-t-il. "Je note que c'est la coalition de l'extrême  gauche à l'extrême droite en passant par les Républicains pour ne pas débattre, estime le député. Je trouve que c'est assez préoccupant sur un sujet qui mérite débat. On a le droit de ne pas être d'accord. On a le droit d'avoir des différences mais je crois que le débat est nécessaire, il était attendu par les Franais."

"Tout ce que je souhaite c'est que le gouvernement poursuive, parce qu'il peut le faire, dans sa volonté d'apporter des réponses au problème de l'immigration", a réagi de son côté le président du groupe Horizons (parti d'Edouard Philippe) Laurent Marcangeli, membre de la majorité. "C'est notre responsabilité de  rsévérer et de réussir ce que les Français nous demandent", a réagi sur franceinfo la députée Renaissance Stella Dupont. "On est en majorité relative, donc quand les oppositions s'allient, les textes ne passent pas, y compris quand les oppositions ont des visions totalement opposées", regrette-t-elle, "c'est très dommageable pour notre démocratie".

"Gérald Darmanin a fait le job", estime sur franceinfo Patrick Vignal, député Renaissance de l’Hérault. Selon lui, le vote de ce lundi après-midi s'explique notamment par le groupe Les Républicains : "Olivier Marleix a une haine contre Emmanuel Macron et Gerald Darmanin et quant à Eric Ciotti, il veut faire les poches de Marine Le Pen, mais il n'a pas les bras assez long", tacle-t-il. Il ajoute, "j'ai envie de dire à mes collègues LR, qui m'expliquent depuis des années la valeur travail : ce soir, ils se sont fourvoyés", en référence au refus des LR d'accepter la mesure qui propose d'octroyer des titres de séjour dans les métiers en tension.

"Beaucoup de parlementaires qui depuis des mois et des mois demandent d'avoir un débat sur l'immigration viennent de se priver du débat", a fustigé de son côté le ministre du Travail Olivier Dussopt.

Rassemblement national : "Un désaveu extrêmement puissant", estime Marine Le Pen

"Nous avons protégé les Français d'un appel d'air migratoire", a estimé Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement nationale, face aux journalistes. C'est "un désaveu extrêmement puissant", a encore estimé l'ancienne candidate à la présidentielle. La présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale a déclaré que cette loi était une loi "pro-immigration", "nous ne pouvons donc que nous réjouir de cela". Marine Le Pen a également déclaré qu'elle déposera "dès demain une proposition de loi", "pour modifier un certain nombre d'articles" dans le but de "faciliter l'expulsion des délinquants étrangers qui sont présents et protégés pour l'instant sur notre territoire".

"Gérald Darmanin pèche par inaction, par omission et par distorsion. Son projet de loi ne contient aucune mesure d’ampleur pour reprendre le contrôle", réagit sur X le président du RN Jordan Bardella. Dans une démocratie fonctionnelle, il démissionnerait. Emmanuel Macron doit maintenant organiser un référendum sur l’immigration."

"C'est une extraordinaire défaite pour le gouvernement", s'est réjoui sur franceinfo Julien Odoul, porte-parole du Rassemblement national. Pour le député RN, "la motion de rejet est un outil démocratique qui est à la disposition des parlementaires s'ils souhaitent rejeter un texte" . Il ajoute que "ce n'est pas au gouvernement à nous donner des leçons de débat et de démocratie compte tenu de sa politique et de sa méthode du 49-3. Ça fait 20 fois qu'il l'actionne et qu'il méprise la représentation nationale".

Les Républicains : Éric Ciotti réclame le retour au texte voté par le Sénat

"Nous voulons débattre et adopter dans son intégralité, sans ajout ni modification, le texte adopté par le Sénat", a déclaré Éric Ciotti, le chef des Républicains à la sortie de l'hémicycle, après l'adoption de la motion de rejet préalable sur le projet de loi immigration. "Le texte du gouvernement, tel qu'il a été modifié par la commission des Lois avec une pression de l'aile gauche de la majorité, ne pouvait en rien répondre au défi migratoire." Éric Ciotti a défendu une position de "cohérence". Il précise que les députés LR "[ont] voté cette motion de rejet non pas pour interrompre les débats sur un sujet essentiel, mais pour qu'ils se poursuivent sur une base beaucoup plus crédible que celle qui avait été empruntée par la majorité en détricotant le texte du Sénat, et en refusant notre proposition de loi constitutionnelle".

"Votre gouvernement a laissé piétiner en commission le texte de fermeté du Sénat", a lancé le patron du groupe LR Olivier Marleix à Gérlad Darmanin. "La majorité présidentielle n’a que ce qu’elle mérite, réagit sur X Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat. En détricotant en commission des Lois la version du Sénat qui avait durci le texte du gouvernement, les députés macronistes ont donné le signal que cette loi ne servirait à rien. Dès lors, pourquoi débattre d’un texte inutile."

Sur franceinfo, Philippe Gosselin, député LR de la Manche estime qu'il s'agit d'un "camouflet pour le gouvernement" et "aussi un camouflet personnel pour Gérard Darmanin, qui s'était impliqué, qui s'était engagé." "Nous avons toujours combattu les régularisations, celle de François Mitterrand, celle de Lionel Jospin, nous ne pouvions évidemment pas voter pour un tel texte", a réagi de son côtéPierre-Henri Dumont, le député LR de la 7ème circonscription du Pas-de-Calais, porte-parole des Républicains à l’Assemblée nationale et secrétaire général adjoint des Républicains.

Parti socialiste : Gérald Darmanin "doit en tirer les conclusions", estime Olivier Faure

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin est "désavoué" et "doit en tirer les conclusions", estime Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste. "Il est temps de travailler à un projet de loi conforme aux principes républicains", ajoute le patron du PS, qui souligne que "les étrangers ne peuvent être présentés comme des suspects" et qu'Emmanuel Macron a été élu "pour être une digue au RN".

"On a aujourd'hui un gouvernement qui est face à ses propres contradictions, a expliqué le Premier secrétaire du PS sur franceinfo, le gouvernement explique qu'il est pour un équilibre, un 'en même temps' et il n'a pas su le trouver". Pour Olivier Faure, "la recherche du compromis" a existé "exclusivement avec Les Républicains qui lui ont renvoyé la balle en lui disant que ce n'était pas suffisant."

Europe Écologie-Les Verts : "Le gouvernement doit abandonner ce texte", estime Marine Tondelier

"Le projet de loi immigration n'aurait rien changé au quotidie des Français mais fait beaucoup de mal à celles et ceux qui cherchent refuge", a réagi lundi sur X Marine Tondelier, secrétaire nationale d'Europe Écologie-Les Verts (EELV), après le rejet préalable sur le projet de loi immigration du gouvernement. "Le gouvernement doit en tout cas en tirer toutes les conséquences et n'a pas d'autre choix politique que d'abandonner ce texte", ajoute Marine Tondelier.

"C'est un camouflet politique pour le gouvernement, un acte politique très fort qui a été posé par le Parlement", affirme sur franceinfo Benjamin Lucas, député EELV-Nupes des Yvelines, à l’origine de la motion de rejet. Pour l'élu, le vote des députés "n'est pas une surprise. C'est la réalité politique, arithmétique de l'Assemblée nationale, dans la mesure où il n'y avait pas de majorité sur ce texte". Il y voit "la confirmation par le vote, par le scrutin public, de la réalité électorale et arithmétique du Parlement en 2023"

Delphine Batho, seule députée écologiste-Nupes à ne pas avoir voté la motion, dénonce sur X la formation "à l'insu de notre plein gré, une coalition avec LR et l’extrême droite sur l’immigration" qui "est incohérent".

Parti communiste : "Le texte doit être retiré définitivement", selon Fabien Roussel

"Le texte, rejeté à l’Assemblée Nationale doit maintenant être retiré définitivement ! Nous resterons mobilisés pour la régularisation des travailleurs sans papier", réagit lundi sur X Fabien Roussel, le secrétaire national du PCF.

La France Insoumise : "Ça sent le bout du chemin" pour Gérald Darmanin, juge Jean-Luc Mélenchon

"Ça sent le bout du chemin" pour Gérald Darmanin et sa loi immigration, a jugé le leader insoumis Jean-Luc Mélenchon sur X, après l'adoption d'une motion de rejet préalable au projet de loi immigration. Gérald "Darmanin a dompté les groupuscules macronistes. Mais pas l'Assemblée nationale", a-t-il ajouté. 

"Le texte est rejeté. Mais c'est surtout la macronie qui a fini par exaspérer toutes les oppositions", a ajouté Jean-Luc Mélenchon. L'arrogant Darmanin a braqué tout le monde. Le début de la fin est commencé."

"C'est une grande victoire : le texte de Darmanin a été rejeté", a réagi la députée Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise à l'Assemblée nationale. "Nous épargnons au pays deux semaines de discours racistes. Sans 49.3, lorsque le Parlement vote, la macronie est minoritaire. C'est le début de la fin pour le pouvoir présidentiel."

"C'est une défaite pour le gouvernement" et "sur cette motion de rejet d'un texte emblématique pour Gérald Darmanin, il a été battu et je trouve qu'il aurait dû démissionner", a réagi sur franceinfo Alexis Corbière, député LFI de Seine-Saint-Denis. "Je ne sais pas pourquoi il est resté parce que M. Macron lui a dit de rester. Sa ligne politique, sa méthode, sa stratégie ont été battues. Il n'a pas de majorité, a poursuivi Alexis Corbière. C'est un texte qui ne règle pas les problèmes des Français, qui vise à rendre les étrangers responsables de tous les problèmes que rencontrent les Français. Les étrangers ne sont ni meilleurs ni moins bons que les Français. Ils travaillent."

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