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"On ne devrait plus mourir mal en France en 2018", témoigne une infirmière réclamant l'application de la loi existante sur la fin de vie

Le Comité consultatif d'éthique prône mardi un meilleur respect de la loi Clayes-Leonetti. Une position que partage une infirmière, voyant que "souvent" des malades "demandent l'euthanasie parce que leurs douleurs sont mal prises en charge". 

Article rédigé par Solenne Le Hen
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Un service de soins palliatifs à Saint-Grégoire, au nord de Rennes en 2012 (illustration). (MARC OLLIVIER / MAXPPP)

Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) a jugé, mardi 25 septembre, que la loi Clayes-Leonetti sur la fin de vie, ne devait pas être modifiée. Cependant, il souhaite que le texte de 2016 soit mieux respecté. Il ne l'est pas, notamment en matière de prise en charge de la douleur, selon une infirmière exerçant en région parisienne. 

Une "obstination déraisonnable" toujours active

Marion Broucke, infirmière en unité de soins palliatifs à l'hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne) voit "des patients qui souffrent, qui ont des traitements contre la douleur inadaptés". "Des médecins considèrent que la prise en charge de la douleur, c'est presque un détail, affirme-t-elle, comme si la morphine était réservée aux patients en toute fin de  vie, alors qu'elle peut être utilisée bien en amont, quand on a des patients dont l'état le nécessite." 

Marion Broucke déplore que des médecins soient mal formés contre la douleur et pratiquent, pour certains, l'acharnement thérapeutique sur des malades condamnés, ce qu'on appelle "l'obstination déraisonnable", pourtant interdite par la loi. 

Plus de 50% des chimiothérapies sont administrées dans les quinze derniers jours de la vie des patients, alors que l'on sait pertinemment que le pronostic est engagé à court terme.

Marion Broucke, infirmière

à franceinfo

L'infirmière explique que "ces chimiothérapies peuvent provoquer des effets secondaires absolument épouvantables", citant le risque de douleurs majorées, de nausées, de vomissements, de perte d'appétit. 

Des souhaits d'euthanasie liés à la douleur 

Marion Broucke entend des patients qui implorent de mourir. "Elles existent, ces demandes d'euthanasie", reconnaît-elle, en pointant une cause récurrente. "On a souvent des patients qui font cette demande parce qu'ils sont extrêmement mal pris en charge, qui ont des douleurs insupportables. Du coup, ils disent 'je n'en peux plus, je veux que ça s'arrête'."  Selon l'infirmière, il s'agit souvent d'une douleur mal prise en charge. Une fois les symptômes correctement gérés, dit-elle, on se rend compte que les demandes d'euthanasie disparaissent parce que c'était juste ça le problème : quelqu'un qui était mal soulagé".     

Soulager la douleur physique, notamment en dernier recours, en endormant profondément le patient jusqu'à la mort, c'est ce que prévoit la loi de 2016. Avec ce texte, les hôpitaux ont suffisamment d'outils pour apaiser les patients, reste persuadée Marion Broucke, comme d'ailleurs la plupart des Français qui ont contribué aux États généraux de la bioéthique. "La question de l'euthanasie est une fausse question. On ne devrait plus mourir mal en France en 2018", assure-t-elle. 

On devrait pouvoir bénéficier de traitements qui existent depuis très longtemps, mais qui ne sont pas appliqués correctement.

Marion Broucke

Mieux appliquer la loi, mieux la faire connaître, voire l'adapter légèrement, plutôt que l'euthanasie, c'est aussi la ligne de la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Ainsi, le gouvernement ne devrait pas légiférer à nouveau sur la question de la fin de vie.

Le témoignage d'une infirmière plaidant en faveur de l'application de la loi existante sur la fin de vie - un reportage de Solenne Le Hen

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