Affaire Vincent Lambert : le Conseil d'Etat demande une nouvelle expertise médicale
Le trentenaire tétraplégique est en état végétatif, sans espoir de récupération, depuis un accident de la route en 2008. Sa femme et une partie de sa famille souhaitent que son alimentation soit interrompue, mais ses parents s'y opposent.
Sa vie reste suspendue à ce jugement. Le Conseil d'Etat a décidé, vendredi 14 février, d'ordonner une nouvelle expertise médicale sur le cas de Vincent Lambert, trentenaire tétraplégique, en état végétatif chronique au CHU de Reims (Marne), depuis un accident de moto en 2008.
La plus haute juridiction administrative française repousse, une fois de plus, sa décision. Le vice-président du Conseil d'Etat, Jean-Marc Sauvé, fait pourtant valoir "l'urgence de la situation". Explications.
Déterminer l'état de santé exact de Vincent Lambert
Trois médecins conduiront cette expertise médicale. Ils devront "se prononcer sur le caractère irréversible" des lésions cérébrales de Vincent Lambert et sur le pronostic clinique. Ils devront déterminer "si ce patient est en mesure de communiquer, de quelque manière que ce soit, avec son entourage". Ils devront aussi apprécier si les réactions éventuellement décelées "peuvent être interprétées comme un rejet de soins, une souffrance" ou, au contraire, comme "un souhait que ce traitement soit prolongé", a expliqué le Conseil d'Etat.
Les experts "rendront leur rapport dans un délai de deux mois à compter de leur désignation". Après, "l'assemblée du contentieux, la plus haute formation de jugement du Conseil d'Etat, se prononcera avant l'été".
Le Conseil d'Etat a également décidé de demander à l'académie nationale de médecine, au Comité consultatif national d'éthique et au Conseil national de l'Ordre des médecins, des "observations écrites" de nature à "l'éclairer utilement sur l'application des notions d'obstination déraisonnable et de maintien artificiel de la vie".
Trancher un différend familial
Depuis septembre 2008 et son accident de moto, Vincent Lambert est plongé dans un coma artificiel au CHU de Reims (Marne). Pour le Dr Eric Kariger, qui dirige le service de soins palliatifs du CHU de Reims, Vincent Lambert "est atteint d'une maladie grave et incurable". En état "pauci-relationnel", il a "des lésions cérébrales graves et irréversibles, une incapacité à exprimer ses volontés".
En avril 2013, un protocole de fin de vie est engagé par le CHU de Reims en accord avec la femme de Vincent, Rachel, mais sans consulter explicitement ses parents. Pour les médecins, le malade multiplie des comportements d'opposition aux soins "faisant suspecter un refus de vivre". Problème : Vincent Lambert n'a pas écrit de directives précisant son opposition à tout acharnement thérapeutique.
Catholiques traditionalistes, les parents de Vincent Lambert sont opposés à l'euthanasie passive de leur fils. Ils saisissent le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne. En mai 2013, la justice a ordonné le rétablissement de l'alimentation
En janvier, le CHU informe la famille de la décision d'arrêter les traitements de nutrition et d'hydratation artificielles du patient, conformément à la loi Leonetti. Une réflexion sur la fin de vie de Vincent Lambert a intégré, pendant quatre mois, l'ensemble de la famille et quatre experts. Seul celui des parents a plaidé en faveur du maintien en vie. Rachel ainsi que sept autres membres de cette famille recomposée soutiennent le protocole de fin de vie.
Les parents, une sœur et un demi-frère de Vincent Lambert saisissent de nouveau le tribunal administratif pour s'opposer au protocole. La justice se prononce contre la décision d'euthanasie passive. Elle juge que "la poursuite du traitement n'était ni inutile, ni disproportionnée" et donc que le cas sortait du champ d'application de la loi Leonetti.
Fin janvier, Rachel Lambert saisit le Conseil d'Etat pour demander l'arrêt du "maintien en vie artificielle" de son mari. Le lendemain, le CHU de Reims se joint à la démarche de l'épouse de Vincent. Prochaine étape : la décision du Conseil d'Etat, "avant l'été".
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