Drogue : une délégation de magistrats mexicains appelle la France à prendre des mesures d'urgence contre le narcobanditisme

Dans une note confidentielle sur les règlements de comptes entre trafiquants, la police judiciaire a constaté de fortes similitudes entre les profils d'une nouvelle génération de criminels et les tueurs à gages des cartels d'Amérique latine.
Article rédigé par David Di Giacomo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Un agent du RAID devant un immeuble , à Marseille lors de la visite surprise du président français Emmanuel Macron pour lancer l’opération Place nette XXL, une nouvelle stratégie nationale antidrogue, le 19 mars 2024. (JULIE GAZZOTI / HANS LUCAS)

Alors que le terme de "mexicanisation" est employé par certains policiers pour évoquer l'ampleur du narcobanditisme en France, une délégation de magistrats mexicains vient justement de rendre visite au parquet de Paris et à la juridiction nationale de lutte contre la criminalité organisée. Les Mexicains tirent la sonnette d'alarme.

Et leur message est on ne peut plus clair : ils appellent la France à prendre des mesures d'urgence pour ne pas se retrouver d'ici quelques années dans la même situation qu'au Mexique, où les violences liées aux cartels de la drogue ont fait plus de 450 000 morts en 20 ans. L'un des magistrats mexicains en visite au parquet de Paris le 14 mai dernier, a estimé que l'attaque mortelle du fourgon de Mohamed Amra, montrait bien que forces de l'ordre et organisations criminelles ne jouent pas à armes égales.

Modifier la loi pour lutter contre le narcotrafic

Il conseille à ses homologues français de mettre plus de moyens humains mais aussi de modifier la loi pour mieux lutter contre le narcotrafic. Selon ces professionnels, la France est à un seuil pour prendre des mesures et ne pas commettre les mêmes erreurs : "Les crimes organisés s’internationalisent, se globalisent. Nos systèmes pénaux garantissent les droits et libertés des personnes, mais il faudrait aussi organiser la manière de travailler contre le crime organisé. Au Mexique, il y a des menaces de mort, qui se traduisent par des actes, cela modifie la manière de travailler : il faut protéger les magistrats. La France peut encore proposer des modifications législatives et donner plus de pouvoir aux parquets, à la police et aux juges pour intervenir de manière efficace. Des peines plus fortes sont nécessaires", peut-on ainsi lire via un post LinkedIn du Parquet de Paris.

Dans une note confidentielle sur les règlements de comptes entre trafiquants, la police judiciaire dit avoir déjà constaté de fortes similitudes entre les profils d'une nouvelle génération de criminels ; et les jeunes sicarios, les tueurs à gages des cartels d'Amérique latine.

Invitée du 8h30 franceinfo, lundi 27 mai, Laure Beccuau, procureure de la République de Paris, a toutefois répondu que "nous n'en sommes pas là" en France : "La définition d'un narco-état, c'est le fait que toutes les instances décisionnelles sont finalement pénétrées, infiltrées par les trafiquants, y compris des juges, parfois des magistrats, et que dès lors, les décisions qui peuvent être prises au niveau législatif, judiciaire ou tout autre sont influencées par les trafiquants. Mais nous sommes loin d'en être là". 

Une commission d'enquête du Sénat sur l'état du narcotrafic en France dressait un bilan accablant, le mardi 14 mai sur l'expansion territoriale du trafic, la corruption d'agents publics, et le manque de moyens des acteurs de terrain. Les sénateurs de la commission ont formulé une série de propositions afin de mettre en place une "stratégie globale et ambitieuse" pour sortir le pays "du piège du narcotrafic".

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