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Après la polémique sur les affiches anti-VIH, Aides lance sa propre campagne : "C'est notre rôle de choquer"

Avec des photos de nus, l'association de lutte contre le sida veut rappeler que les personnes séropositives sous traitement ne sont pas contagieuses, quelques jours après une polémique sur une autre campagne anti-VIH. Franceinfo a interrogé le président d'Aides. 

Article rédigé par franceinfo - Alice Maruani
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La dernière campagne de l'association Aides, diffusée depuis le 23 novembre 2016. (AIDES)

Des corps dénudés et sexy. La publicité utilise souvent cette technique pour attirer l'attention, Aides aussi. Après le retrait d'une campagne de prévention du VIH imposé par certains maires, l'association de lutte contre le sida diffuse à son tour, mercredi 23 novembre, quatre photos suggestives en noir et blanc : sur les clichés, des couples sont montrés nus, en train de faire l'amour, tout en pratiquant des activités sportives ou en jouant de la musique. Sur chacun d'entre eux, on peut lire : "Les séropositifs sous traitement ont beaucoup de choses à nous transmettre. Mais pas le virus du sida."

Une campagne "subversive"

"Le rendu est très beau, très léché, commente Aurélien Beaucamp, président de l'association de lutte contre le sida, interrogé par franceinfo. On donne à voir des personnes séropositives amoureuses et épanouies. Mais évidemment, c'est subversif."

On a l'habitude d'être des sales gosses, on considère que c'est notre rôle de choquer

Aurélien Beaucamp, président de Aides

à franceinfo

En plein Euro de foot, la dernière campagne de l'association montrait déjà des gens peinturlurés aux couleurs de leur équipe, et entièrement nus. Mais cette fois, c'en est visiblement trop pour l'ARPP, l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité. "C'était passé cet été, mais cette nouvelle campagne a été retoquée parce que les images, notamment les positions sexuelles, ont été considérées comme étant de nature à choquer certains publics sensibles", affirme Aurélien Beaucamp. Du coup, les œuvres du photographe Mathieu César ne seront pas visibles dans le métro ou sur les panneaux d'affichage, mais uniquement sur les réseaux sociaux et dans des encarts publicitaires. 

Un climat particulier

Le timing est "compliqué", de l'aveu même d'Aurélien Beaucamp, après la polémique autour de la campagne de prévention du VIH lancée par le gouvernement. Plus soft, elle représentait simplement des couples d'hommes qui s'enlaçaient tendrement, et évoquait, entre autres, les relations d'un soir. De quoi scandaliser certaines familles, notamment les militants de La Manif pour tous.

Aujourd'hui, on a des relations sexuelles hors couple uni et marié. Il faut arrêter d'être hypocrite. Sachant qu'on vend des voitures avec du sexe et en utilisant le corps de la femme de façon dégradante, mais que ça ne choque personne. Pour moi, c'est clairement de l'homophobie.

Aurélien Beaucamp, président de Aides

franceinfo

Les affiches du gouvernement ont été vandalisées un peu partout, et plusieurs maires de droite ont été jusqu'à l'interdire au nom de la "protection de l'enfance". "Cette campagne décrivait une réalité : 50% des contaminations par le VIH se font dans la communauté gay", rappelle Aurélien Beaucamp. "C'est grave que des élus, des représentants de la République, soient dans le déni", accuse-t-il.

Ne pas "ajouter du débat au débat"

Aurélien Beaucamp dit avoir été surpris par la violence de la polémique. "Aujourd'hui, notre objectif n'est pas de donner dans la surenchère, d'ajouter une pièce dans la machine ", assure-t-il. La nouvelle campagne d'Aides est prévue depuis plus de quatre mois, donc bien avant la controverse. "On fait deux campagnes par an, une avant l'été, et l'autre avant le 1er décembre, journée mondiale de lutte contre le sida", précise-t-il.

En pleine primaire de la droite, Aides espère que cette nouvelle initiative "n'ajoutera pas du débat au débat". L'important, pour les militants, est que le message passe. "Même si on diffuse cette information depuis 2008, on se rend compte que beaucoup de gens ne savent pas que les traitements antiviraux empêchent la contagion, regrette Aurélien Beaucamp. Les personnes séropositives font encore peur." L'association espère toujours que la maladie disparaîtra totalement dans deux générations, "si l'on permet le dépistage de tous". De telles campagnes ne seraient alors plus nécessaires.

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