Risques liés à l'Androcur : des victimes du médicament poursuivent l'État en justice

L'Androcur a été massivement prescrit à des femmes contre l'endométriose, l'acné ou comme moyen de contraception mais il peut provoquer des tumeurs au cerveau chez certaines patientes.
Article rédigé par franceinfo
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À hautes doses, l'Androcur peut augmenter le risque de développer une tumeur au cerveau. (ARNAUD DUMONTIER / MAXPPP)

Deux requêtes administratives ont été déposées contre l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) devant le tribunal administratif de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, a appris franceinfo auprès de l'avocat de deux victimes de l'Androcur, Charles Joseph-Oudin, confirmant une information du Monde.

Ces requêtes visent à obtenir auprès de l'État une indemnisation pour les victimes de ce médicament, l'Androcur, un dérivé de la progestérone, qui peut provoquer des méningiomes, des tumeurs au cerveau, chez certains patients. Ce médicament, développé initialement contre l'hirsutisme, et commercialisé par Bayer depuis les années 1980, a été massivement prescrit à des femmes contre l'endométriose, l'acné ou comme moyen de contraception. En plus de l'Androcur, l'avocat met en cause "toutes les hormones sexuelles de synthèse, les progestatifs, comme l'Androcur, le Lutéran, le Lutényl et leurs génériques".

Les risques de l'Androcur connus depuis les années 2010

Les victimes accusent notamment l'État de retard dans la mise en place de mesures de prévention, alors que la dangerosité de l'Androcur et les risques de méningiomes sont connus depuis plusieurs années. Sur une publication de l'ANSM datant de 2022, on peut lire que "ce risque est connu depuis les années 2010". En 2009, l'Androcur a, en effet, fait l'objet d'une surveillance particulière au niveau européen pour le risque d'apparition de méningiome. En 2011, l'Agence européenne du médicament a demandé à ce que ce risque figure sur la notice.  Pour Charles Joseph-Oudin, ces effets secondaires sont connus depuis plus longtemps encore, "depuis 2004, il existe des indices, des suspicions" et cela constitue donc "une faute des autorités de santé qui attendent que le risque soit certain pour informer les patientes, alors qu'il faut informer dès lors qu'une suspicion de risques existe".

À partir de 2018, l'ANSM a publié un rapport sur le risque de méningiome lié à la prise d'Androcur. Elle y établissait notamment "une augmentation du risque de méningiome avec la durée d'utilisation". L'ANSM avait également mis en place un numéro vert pour les patients exposés à ce médicament. Sans interdire l'usage de l'Androcur et de ses génériques, l'ANSM recommandait alors aux médecins "d'informer les patients du risque de méningiome", d'"évaluer le rapport bénéfice/risque pour chaque patient, en tenant compte du risque de méningiome", ou encore de ne le prescrire que "dans le respect des indications de l'autorisation de mise sur le marché et aux doses les plus faibles possibles, et sur une courte durée".

450 victimes identifiées

Deux requêtes ont donc été déposées à l'heure actuelle, mais l'avocat Charles Joseph-Oudin évoque plus d'une cinquantaine de recours en préparation, sur près de 450 dossiers identifiés. "Vu le nombre de victimes et la responsabilité de l'État, nous souhaitons la mise en place d'un dispositif d'indemnisation pour ces femmes, sur le modèle de ce qui a été mis en place pour le Médiator ou la Dépakine", déclare l'avocat. Il résume ainsi, l'action de ses clientes : "elles demandent réparation auprès de l'Etat, qui apparaît comme le principal responsable de ce désastre sanitaire immense".

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