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Nouvelle formule du Levothyrox : après ses analyses, l'AFMT souhaite que "les autorités sanitaires s'en saisissent"

"Il faut que les autorités sanitaires s'en saisissent (...) pour confirmer ou infirmer nos analyses", a réagi jeudi sur franceinfo Gérard Bapt, médecin cardiologue, médecin conseil de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), député honoraire et ancien président de la mission d’information sur le Médiator.

Article rédigé par franceinfo
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 Gérard Bapt, médecin cardiologue et médecin conseil de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), à l'Assemblée nationale, en mars 2016. (AURELIEN MORISSARD / MAXPPP)

L’Association française des malades de la thyroïde (AFMT) révèle jeudi 14 juin les résultats de ses analyses sur la nouvelle formule du médicament contre la thyroïde, le Levothyrox. D’après cette expertise, la molécule active que prennent les patients serait sous-dosée par rapport aux indications données. Les analyses ont également détecté la présence d’une autre molécule ne figurant pas dans la liste des composants, une substance de synthèse non-commercialisée en France à cause de très importants effets secondaires.

Il faut que ça soit "analyse contre analyse", a réagi jeudi 14 juin sur franceinfo Gérard Bapt, médecin cardiologue, médecin conseil de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), député honoraire et ancien président de la mission d’information sur le Médiator.

franceinfo : Que pensez-vous de la manière dont se déroule l’affaire Levothyrox, qui se fait aujourd’hui "analyse contre analyse" ?

Gérard Bapt : Je pense qu’il faudrait justement que ce soit analyse contre analyse. C’est en effet la troisième analyse réalisée aux frais de l’association, qui ne reçoit aucune subvention, ni publique, ni encore moins des laboratoires. Les deux premières analyses n’étaient pas très probantes, elles portaient sur d’autres éléments, mais celle-ci par contre interpelle. La dernière analyse vient d’être faite par un laboratoire américain, certifié par la FDA et dont les résultats doivent être considérés avec attention. Il faut que les autorités sanitaires s’en saisissent. Par une méthode spectrographique, on a recherché la façon dont la thyroxine était présente dans les comprimés en fonction du dosage indiqué. Or il se trouve que cette thyroxine est présente, pour la nouvelle formulation, sous une forme inférieure à l’indication donnée par la boîte, en ce qui concerne la teneur. Mais elle est présente avec une substance supplémentaire, qui pourrait être de la dextrothyroxine.

Vous dites "qui pourrait", donc il n’y a pas de certitude sur la présence de dextrothyroxine ?

Le laboratoire en est pratiquement persuadé mais il faudrait mener une étude complémentaire pour vérifier et confirmer qu’il s’agit bien de dextrothyroxine. Le problème est que l’association a terminé ses subsides, n’a plus de moyens pour relancer des études et cette vérification devient le rôle des institutions de sécurité sanitaire et de l’Agence du médicament. Je pense que c’est urgent. Si véritablement il y a une défectuosité du médicament, se pose le problème de la poursuite de sa commercialisation. Les autorités sanitaires doivent très rapidement mener des études du même type pour confirmer ou bien infirmer nos analyses. Ce n’est pas le rôle d’une association de réaliser ce genre d’analyses. L’association a eu le mérite de le faire, parce qu’il y a ce que la ministre elle-même avait qualifié d’"inconnu scientifique", en ce qui concerne un certain nombre d’effets indésirables notés chez des dizaines de milliers de patients.

Que répondez-vous au laboratoire Merck qui conteste vos résultats et aux médecins qui parlent "d’effets psychologiques" comme seule explication possible ?

Les laboratoires Merck contestent, bien sûr. À l’époque de l’affaire Médiator, le laboratoire contestait aussi. En ce qui concerne ces médecins, je note qu’ils avaient beaucoup annoncé l’effet nocébo. Plus personne ne se prévaut maintenant de cet effet-là, parce qu’il y a deux rapports du centre régional de pharmacovigilance de Rennes, qui ont été avalisés par l’Agence du médicament, et qui montrent bien que les effets indésirables sont là, ils sont quantifiés, et ne sont pas simplement le fait de personnes hystériques. Aujourd’hui, aux malades qui prennent de ces médicaments, je leur dis que lorsqu’on souffre d’effets indésirables et que l’on est toujours sous la nouvelle formulation de Levothyrox, il faut changer de médicament, ce que beaucoup ont fait. Sans doute aujourd’hui près d’un million de patients dans notre pays ont abandonné la nouvelle formulation du Levothyrox, vers une autre spécialité, qu’ils vont chercher soit à l’étranger, soit depuis peu, dans les officines où l’on propose deux autres produits commercialisés. La thyroxine est un médicament extrêmement sensible qu’il faut manier avec beaucoup de précaution, malheureusement ça n’a pas été le cas.

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