Covid-19 : la troisième dose est "le schéma vaccinal optimal" qui permettra d'"éviter le pire", selon un infectiologue
Face à un redémarage de l'épidémie de Covid-19, la généralisation d'une troisième dose de vaccin est indispensable selon le chef du service des maladies infectieuses à l’Hôpital Henri Mondor à Créteil.
"A l'échelon individuel, le schéma à trois doses est probablement le schéma le plus pertinent" contre le Covid-19, a affirmé samedi 6 novembre sur franceinfo Jean-Daniel Lelièvre, chef du service des maladies infectieuses à l’Hôpital Henri Mondor à Créteil, spécialiste de la vaccination et expert à la Haute Autorité de Santé et auprès de l’OMS, après que le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal a affirmé vendredi 5 novembre que l'idée d'une troisième dose de vaccin "faisait son chemin" au sein de l'exécutif. Le schéma à deux doses "est un schéma d'urgence", rappelle Jean-Daniel Lelièvre. Et la troisième dose va permettre d'avoir "une protection qui va être différente et plus puissante".
franceinfo : Quelle est l'utilité de cette troisième dose de vaccin ? A partir de combien d'anticorps est-on protégé contre les formes graves du Covid-19 ?
Jean-Daniel Lelièvre : Ce qu'on appelle les corrélats de protection, c'est-à-dire le taux d'anticorps qui va vous protéger véritablement contre les formes graves, ne sont pas complètement définis. On a quelques idées, évidemment. C'est un sujet sur lequel la communauté internationale travaille d'arrache-pied depuis plusieurs mois. Mais c'est assez difficile de le définir. On a déjà des réponses sur la partie clinique, c'est-à-dire sur la réapparition de maladies Covid chez des gens qui avaient été vaccinés avec deux doses. Et au cours du temps, on voit réapparaître ces infections qui sont la raison pour laquelle on propose à l'heure actuelle une troisième dose.
Est-ce que ce n'est pas plus intéressant de faire une sérologie pour connaître son taux d'anticorps avant de faire sa troisième dose ?
Non, parce qu'elle n'est pas complètement prédictive de la protection. Il est évident que si vous avez des taux d'anticorps très élevés, il est possible que vous soyez protégés. Mais attention, même si ces taux d'anticorps sont très élevés, ils ne sont pas forcément pertinents ou efficaces pour vous protéger contre les variants du Sars-Cov2. Si vous avez été vaccinés il y a très longtemps, il n'y a pas eu ce qu'on appelle une maturation suffisante d'une partie de vos cellules, qu'on appelle les cellules B mémoires. Et si vous faites un rappel vaccinal, vous allez stimuler ces cellules un peu particulières. Vous allez retrouver avec un taux d'anticorps qui va être plus important, mais qui, en plus, va vous permettre d'être beaucoup plus actif contre le variant delta. Donc la simple sérologie n'est pas le paramètre le plus efficace pour prédire la protection contre la maladie. Si vous faites une troisième dose de vaccin, vous allez avoir une protection qui va être différente et plus puissante qu'avec deux doses. Et il est probable que le schéma vaccinal optimal soit un schéma à trois doses et pas un schéma à deux doses. Il faut comprendre que le schéma à deux doses est un schéma d'urgence qui visait à empêcher les infections de manière très importante sur l'ensemble de la population. Mais à l'échelon individuel, le schéma à trois doses est probablement le schéma le plus pertinent.
Est-ce que vous pensez que la population française est prête aujourd'hui à se soumettre à de nouvelles restrictions et à cette troisième dose de vaccin qui conditionnera éventuellement un pass sanitaire ?
Je pense qu'il faut que l'on garde tous en tête que, dans le passé, la seule possibilité qu'on ait eu de bloquer les vagues épidémiques quand elles étaient présentes, c'était de faire du confinement. Et on voit bien les difficultés et les conséquences majeures qu'a eu ce confinement, à la fois sur notre vie économique, mais aussi sur notre vie de tous les jours. Cela a été un facteur de troubles psychologiques majeurs chez un grand nombre de gens dans ce pays, notamment les enfants. Pour éviter tout cela, il faut avoir la couverture vaccinale la meilleure possible. Et il faut pouvoir respecter les gestes barrières chaque fois que cela va être important. Tout ceci va nous éviter demain de nouvelles mesures drastiques, comme cela a été le cas dans d'autres pays du monde. Si on ne le fait pas, on va être obligé de confiner. Alors il y a d'autres pays qui n'ont pas confiné et qui n'ont pas eu les mêmes problématiques que nous. Mais les pays qui n'ont pas eu recours au confinement étaient des pays avec une densité de population qui était complètement différente de la nôtre. Donc il ne faut absolument pas se comparer aux autres. Et encore une fois, on voit bien la pertinence de la vaccination et des mesures de distanciation. Continuons dans cette voie là pour éviter, demain, le pire.
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