"Tant qu’on n’aura pas les conditions sanitaires adéquates, on se rebellera" : les prisons françaises sous la pression du coronavirus
Depuis la semaine dernière et l’annonce de la suspension des parloirs pour cause de pandémie de coronavirus, les détenus français ne sont pas tranquilles et se rebellent. Ils dénoncent l’incapacité de l’administration pénitentiaire à les protéger contre le virus.
La pandémie de coronavirus Covid-19 n’épargne pas les prisons françaises, où le virus circule : un détenu de 72 ans a ainsi trouvé la mort dans un établissement d’Ile-de-France et un peu partout, des détenus suspectés de porter le Covid-19 ont été placés à l’isolement dans des cellules individuelles.
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L’administration pénitentiaire estime la situation sous contrôle mais ce n’est pas ce que disent les détenus. Quelques messages diffusés sur des réseaux sociaux comme Snapchat ou Twitter ont ainsi suffi à inciter des détenus à défier l’administration pénitentiaire et sa gestion du Covid-19. Dimanche, une quinzaine établissements ont connu de brefs incidents. Soit trente depuis le début du confinement en France : des refus de réintégrer les cellules, des dégradations. Et un pic de colère, désormais maîtrisé, au centre de détention d’Uzerche, en Corrèze, avec des dizaines de cellules, jusqu’au bureau du directeur, ravagés par le feu. "On ne veut pas mourir en prison, tempête Eric, détenu à Uzerche, qui a participé à cette révolte. Il y a nos familles dehors, il y a nos proches. On n’a aucun contact avec eux…"
On nous a annoncé qu’on allait nous distribuer des kits sanitaires mais il n'y a toujours rien parce qu’ils n’auraient pas les stocks disponibles. Tant qu’on n’aura pas les conditions sanitaires adéquates, on se rebellera.
Eric, détenu à Uzercheà franceinfo
À Uzerche pourtant aucun cas de Covid-19 signalé. Selon la chancellerie, cinq détenus ont été testés positifs au coronavirus dans les prisons françaises, neuf parmi les surveillants. En fin de semaine dernière, plus de 230 détenus étaient déjà placés en confinement sanitaire. Mais le chiffre a certainement monté. La peur des détenus, c’est la proximité. La promiscuité avec les autres détenus en cellule, lors des repas, des promenades où les distances de sécurité ne sont pas appliquées.
Régis est incarcéré à Villeneuve-lès-Maguelones qui compte un cas positif au coronavirus. Pour lui, les mesures de confinement sont mieux respectées à l’extérieur qu’en détention. "Nous on est confinés, mais en fait on n’est pas vraiment confinés", soupire-t-il."
Je vois une centaine de personnes par jour qui n’en ont rien à faire, qui continuent à aller en promenade et ça c’est problématique. Et le virus est là et il circule.
Régisà franceinfo
La peur des détenus, c’est aussi que les surveillants n’apportent le virus de l’extérieur et les mettent en danger. “Les surveillants ne sont pas protégés, constate Régis. On n’est pas en sécurité ! Ils ouvrent les portes tous les jours, ils touchent leurs clefs tous les jours. Ils n’ont pas de gants, ils n’ont rien ! C’est une blague !
"C’est impossible de ne pas la ramener et de ne pas le sortir : il n’y a aucune mesure prise, poursuit Régis. Imaginez que c’est nous, dans les coursives, qui discutons avec l’administration et les surveillants pour leur dire de laisser ouvert, pour qu’on nettoie par terre, les portes, les barreaux, pour ne pas que le virus se transmette." 100 000 masques devaient être distribués pour les surveillants, annonçait le ministère de la Justice. Mais ils n’ont pas pour consigne de les porter sans l’apparition de symptômes.
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